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Haïti

Trente-deux candidats au fauteuil présidentiel

Des vendeurs d'oranges devant les affiches électorales.(Photo : Manu Pochez/RFI)
Des vendeurs d'oranges devant les affiches électorales.
(Photo : Manu Pochez/RFI)
Les Haïtiens sont appelés mardi à élire leur président. Depuis le départ de Jean-Bertrand Aristide, contraint à l’exil pour cause de rébellion, le pays a vécu dans une sorte d’intérim politique nourri de violences et de tensions. Les électeurs vont également choisir leurs sénateurs et leurs députés.

Il pourrait y avoir 4 millions et demi d’électeurs en Haïti mais 3 millions et demi seulement se sont inscrits sur les listes électorales. Sur tout le territoire haïtien, 9 211 bureaux de vote vont fonctionner toute la journée de mardi. Malgré ce maillage, les électeurs devront parfois faire un effort pour reprendre en main le destin de leur pays. Certains d’entre eux devront en effet parcourir 16 kilomètres pour aller dans le bureau de vote où ils sont inscrits. Vincent de Herdt a souligné cette difficulté. Il représente l’institut Ifes. L’International Foundation for Election Systems offre son aide aux pays qui le souhaitent afin d’avoir un bon déroulement des opérations de vote.

Deux-cent-dix observateurs étrangers et 36 000 observateurs haïtiens vont surveiller les scrutins pour éviter la fraude. Le coût de ces trois consultations populaires (présidentielle, sénatoriale et parlementaire) est estimé à 80 millions de dollars. Il est financé par la communauté internationale. Le Conseil électoral provisoire haïtien s’est engagé à publier les résultats trois jours après le vote.

Si beaucoup d’Haïtiens déplorent un nombre trop limité de bureaux de vote, d’autres sont prêts à se déplacer même s’il y a un risque pour leur sécurité. Certains Haïtiens se souviennent du scrutin de 1987. Des électeurs avaient été massacrés lorsqu’ils s’étaient rendus dans une école pour voter. Le scrutin avait été interrompu. « Même si on me dit que je vais mourir, j’irai voter quand même parce que si tout le monde dit qu’il a peur d’aller voter, le pays n’aura aucune chance d’aller de l’avant », a lancé une habitante de Port-au-Prince.

Le Premier ministre haïtien, Gérard Latortue, a annoncé qu’il quitterait ses fonctions mardi, jour des élections. Après la chute de Jean-Bertrand Aristide, en 2004, Gérard Latortue avait pris la tête d’un gouvernement provisoire. Les détracteurs de ce Premier ministre par intérim l’accusent de n’avoir pas désarmé les milices haïtiennes. L’insécurité est toujours un obstacle à une vie normale dans ce petit pays, le plus pauvre du continent américain.

« Nous avons sauvé le pays d’une guerre civile, d’une énorme explosion sociale et nous avons introduit plus de civilité dans la vie politique », rétorque Gérard Latortue. Pour le professeur d’histoire haïtien Cary Hector, le bilan de cette période transitoire est mitigé. Gérard Latortue « a fait trop de promesses mais il est parvenu à l’essentiel, l’organisation d’élections pour sortir du tunnel vers une normalisation relative de la vie politique haïtienne », analyse le professeur.

Les élections ont été reportées quatre fois, pour des raisons de logistique et parce que la vie reste chaotique. Il y a quelques semaines, les Nations unies ont cependant demandé au pouvoir intérimaire de choisir une date ferme et définitive pour le déroulement du scrutin. Il se tient donc le 7 février. Les Nations unies sont impliquées dans la vie politique haïtienne car elles ont envoyé sur place une force de maintien de la paix composée de plus de 7 500 militaires et de 2 000 policiers. Ces hommes, principalement des Jordaniens et des Brésiliens, ont été chargés de restaurer un semblant de vie sociale. Mi-2004, ils ont remplacé les « marines » américains qui s’étaient temporairement déployés dans le pays, au moment où le président Aristide était obligé, par la force, de quitter le pouvoir. Les militaires de la Minustah assurent que les différents scrutins prévus ce mardi se dérouleront dans le calme.

Le chômage touche 60% de la population active haïtienne et la majorité des 8,5 millions d’habitants vit avec moins de deux dollars par jour. Une faible participation est à redouter car la population est dans une logique de survie plutôt que d’engagement politique. De plus, une partie de l’île reste toujours sous la coupe de gangs armés vivant de trafics de toutes sortes.

Depuis la dictature sanglante de la famille Duvalier de 1957 à 1986, Haïti n’a connu que des crises, entrecoupées de coups d’Etat. Après le dernier épisode qui a contraint le président Aristide à s’exiler en Afrique du Sud, Haïti cherche donc à retrouver une vie politique normale. Mais avec 32 candidats à l’élection présidentielle et 1 300 candidats pour les 130 sièges de parlementaires, le paysage politique s’annonce d’emblée très morcelé. La majorité parlementaire sera sans doute difficile à trouver étant donné cet émiettement et la multitude de candidatures.

« On va chercher une majorité. Il y aura assez de sénateurs et de députés conscients que le pays ne peut plus continuer dans les débats, dans les affaires politiques », a déclaré René Préval, l’un des favoris du scrutin présidentiel. En Haïti, « les gens veulent travailler, ils n’ont pas besoin de marchandage politique, ils en ont marre des belles promesses », a-t-il encore indiqué.

Les principaux candidats à la présidentielle

Nombreux sont les candidats affichés sur les murs.(Photo : Manu Pochez/RFI)
Nombreux sont les candidats affichés sur les murs.
(Photo : Manu Pochez/RFI)

Originaire d’une famille aisée, René Préval est le fils d’un ancien ministre haïtien. En 1963, sa famille fuit le régime dictatorial de François Duvalier. René Préval suit des études d’agronomie en Belgique puis séjourne aux Etats-Unis. De retour au pays en 1975, il ouvre une boulangerie en 1983. Entamant une carrière politique, il est Premier ministre de 1991 à 1993 et président de 1996 jusqu’à la première élection d’Aristide. Depuis la chute du régime Duvalier, Préval reste le seul président élu à ne pas avoir été contraint à l’exil.

Son principal concurrent est Charles Henri Baker. En 2004, ce dernier a pris une part active à la mobilisation contre le régime de l’ex-président Aristide. Lui aussi a séjourné aux Etats-Unis à la fin des années 60. Charles Henri Baker possède une entreprise textile.

Leslie François Manigat vient de la bourgeoisie du nord du pays. Avec René Préval et Charles Henri Baker, Leslie François Manigat fait partie du tiercé arrivant en tête des intentions de vote. Président de février à juin 1988, il est renversé par un coup d’Etat militaire. Expulsé, il s’installe à Paris puis à Genève.

Evans Paul est le candidat de la coalition « Alliance ». Ancien maire de Port-au-Prince, il a été l’un des opposants à la dictature des Duvalier. Allié dans un premier temps à Jean-Bertrand Aristide, il est devenu l’un de ses opposants.

Marc Louis Bazin a été Premier ministre en 1992, après le coup d’Etat qui avait renversé, une première fois, le président Aristide. Il a été ministre des Finances sous le régime de Jean-Claude Duvalier.

Guy Philippe est un ancien lieutenant de l’armée. Il s’est exilé en 2000 en raison de tensions avec le gouvernement, peu de temps avant l’arrivée au pouvoir de Jean-Bertrand Aristide. En 2004, Guy Philippe revient en Haïti et participe à la rébellion armée qui aboutit au renversement du président contesté.

Serge Gilles est un opposant aux Duvalier. Il a passé 25 ans en exil. Il a été sénateur de 1991 à 1993.

Dany Toussaint est parti en exil après le premier renversement d’Aristide. Ancien militaire, il est revenu en 1994 à la suite de l’intervention militaire américaine. Il a été quelque temps chef de la police. Il a été élu sénateur en 2000.


par Colette  Thomas

Article publié le 06/02/2006 Dernière mise à jour le 06/02/2006 à 17:48 TU

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