Bénin
Election présidentielle : calme, pagaille et doutes
(Photo : AFP)
Partout et surtout dans les grandes villes les bureaux de vote ont pratiquement tous ouverts avec beaucoup de retard. Dans certaines localités, faute de pouvoir ouvrir les salles de classe, les clés ayant disparu, les autorités locales ont souvent pris la décision d’installer les bureaux de vote sous des arbres avec des isoloirs de fortune. Tout cela se passe dans une ambiance bon enfant au grand dam des candidats qui auraient préféré plus de solennité dans l’accomplissement de ce devoir civique. Pour le coup, la transparence est totale ! Les bureaux de vote comme d’habitude aussi ont fermé avec plusieurs heures de retard et les procès verbaux ont souvent été dressés à la lumière des lampes à pétrole.
Les préfectures de régions et la gendarmerie ont eu la charge d’acheminer les cantines portant les procès verbaux et les bulletins de vote qui arrivent au compte-gouttes à Cotonou au siège de la Commission électorale nationale autonome (CENA). Un décompte rigoureux du nombre des malles contenant les documents du scrutin a immédiatement débuté avant le gros du travail qui consiste à compter les voix. Au total 17 480 bureaux de vote ont ouvert pour accueillir 4 021 626 inscrits sur les listes électorales.
Trois candidats se détachentMais, dans l’état-major des principaux candidats les spécialistes des estimations avancent déjà des chiffres qui situent les candidats Boni Yayi, Adrien Houngbédji et Bruno Amoussou largement en tête des 23 autres candidats dont deux femmes. Deux de ces trois candidats, iront au second tour et déjà leurs représentants se rencontrent entre eux. Pour de nombreux électeurs cette célérité dans les négociations est inquiétante et toutes les imperfections d’avant le vote deviennent des arguments pour conclure à la magouille. Une voix autorisée et pas des moindres, celle du président sortant Mathieu Kérékou se mêle au débat pour jeter un grand doute sur «la transparence» de ce scrutin. «Ceux qui sont chargés des élections le savent et ne disent rien», a-t-il déclaré après avoir accompli son devoir de citoyen. Cette liberté de ton qui le caractérise a tout de même quelque chose d’incongru puisque c’est son gouvernement qui organise les élections.
La menace d’une invalidation pèse donc sur ce scrutin. De nombreux observateurs pronostiquent que les «petits» candidats s’engouffreront dans la brèche ouverte par le président de la République lui-même pour demander aux institutions compétentes d’invalider le vote. De nombreux partis, en rangs dispersés pour l’instant, contestent déjà la constitution des listes électorales. Elles ont connu un taux de progression de 30% par rapport à la dernière élection, ce qui semble curieux. Par ailleurs, ils font remarquer que le Bénin compte un peu plus 4 millions d’inscrits sur les listes, alors que 5 millions de cartes d’électeurs ont été imprimées.
Les prochains jours seront décisifs. Le point d’orgue est prévu le 9 mars, date à laquelle la CENA a prévu de donner les résultats provisoires qui seront ensuite transmis à la Cour constitutionnelle pour validation.
par Didier Samson
Article publié le 06/03/2006 Dernière mise à jour le 06/03/2006 à 18:28 TU