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Inde

Bénarès sous haute tension après des attentats

Des nationalistes radicaux hindous crient vengeance et brûlent l'effigie d'un militant islamiste suspecté d'être à l'origine des trois explosions.(Photo : AFP)
Des nationalistes radicaux hindous crient vengeance et brûlent l'effigie d'un militant islamiste suspecté d'être à l'origine des trois explosions.
(Photo : AFP)
Les autorités indiennes, qui redoutent des violences inter-religieuses, ont placé le pays en alerte maximale après trois explosions meurtrières mardi à Bénarès, ville sainte de l’hindouisme située sur les bords du Gange, dans l’Etat de l’Uttar Pradesh (nord du pays). Le bilan s’élève à 23 morts et 68 blessés. Un suspect islamiste a été abattu. Le Premier ministre a appelé dès mardi « à maintenir la paix et le calme », mais mercredi, des fidèles hindous criaient vengeance dans les rues de cette ville de 3,7 millions d’habitants qui compte une forte minorité musulmane.

Bénarès, à qui les Indiens ont rendu son ancien nom de Varanasi, est le plus haut des lieux saints de l'hindouisme en Inde, où les pèlerins viennent en masse se purifier de leurs péchés dans les eaux sacrées du Gange. Les terroristes ont frappé un mardi, sachant que les fidèles hindous seraient nombreux à se rassembler dans le temple Sankat Mochan, l’un des plus révérés de la ville ; les services y sont dédiés ce jour-là au dieu Hanuman, divinité très populaire de l’hindouisme. C’est à l’heure des prières du soir, vers 18h30 locales, que la première bombe a explosé, provoquant un vaste mouvement de panique. « J’étais venu ici pour prier. Il y a eu une énorme déflagration, tout le monde courait, a raconté un témoin sur une chaîne de télévision locale. Il y avait des corps tout autour, les gens avaient vraiment peurIls étaient en sang, leurs habits en lambeaux. »

Quelques minutes plus tard, une deuxième explosion se produisait dans la gare de la ville, immédiatement suivie d’une troisième dans une voiture du Shiv Ganga Express, un train bondé en partance pour New Delhi. La police, affirme un inspecteur, a également retrouvé deux bombes prêtes à exploser près du principal site de crémation de la ville sainte. « Dix personnes sont mortes au temple, 11 autres à la gare », a déclaré un responsable local. Le bilan s’est alourdi dans la nuit à 23 morts et 68 blessés.

Des nationalistes radicaux hindous crient vengeance

Ces actions sanglantes, perpétrées une semaine avant Holi, la fête hindoue des couleurs, n'ont été revendiquées par aucun des nombreux groupes islamistes, maoïstes ou tribaux auxquels sont généralement attribués les attentats. Mais les autorités suspectent des « terroristes », terme générique désignant les militants islamistes. Une chasse à l’homme a été immédiatement déclenchée, et mercredi à l’aube, la police antiterroriste abattait un suspect dans la banlieue de Lucknow, la capitale de l’Etat de l’Uttar Pradesh située à 300 km au nord de Bénarès. Il s’agit d’un militant islamiste présumé qui, selon les enquêteurs, était porteur d’un pistolet et de 2,5 kg d’explosifs.

« Il était probablement impliqué dans les explosions de Bénarès », a indiqué le chef de la police régionale. L'homme, nommé Salar, recherché depuis plusieurs années, était soupçonné d'être membre d’un groupe islamiste radical, le Lashkar-e-Taiba, basé au Pakistan et opérant au Cachemire indien. Il avait déjà été suspecté par la police indienne lors du triple attentat de New Delhi qui avait fait 66 morts le 29 octobre 2005. « Si nous soupçonnons les terroristes, poursuit le responsable policier, c’est parce que le mode opératoire est similaire à ce qui s’était passé à Delhi. » A l’époque, les autorités indiennes avaient immédiatement déclaré que les auteurs avaient des liens avec l’étranger, et avaient demandé au Pakistan de faire davantage pour combattre le terrorisme.

Selon le ministre de l’Intérieur Shivraj Patil, qui a placé le pays en alerte maximale, « le temple Sankat Mochan a été manifestement visé pour entraîner des tensions communautaires dans le pays. » Dès mardi soir, le Premier ministre Manmohan Singh appelait au « calme ». Plusieurs attaques contre des sites hindous ont généré dans le passé des violences inter-religieuses en Inde, faisant au total des milliers de morts. Mercredi matin, tandis que les touristes avaient déserté les bords du Gange et se terraient dans leurs hôtels, des groupes de nationalistes radicaux hindous convergeaient vers le temple, criant vengeance et hurlant des slogans contre le gouvernement de centre-gauche, sous l’œil vigilant des policiers et soldats qui quadrillent la ville.


par Philippe  Quillerier

Article publié le 08/03/2006 Dernière mise à jour le 08/03/2006 à 17:12 TU