Pérou
Présidentielle : trois candidats dans un mouchoir

(Photo : AFP)
De notre envoyée spéciale à Lima
Il faut dire qu'il a été la cible d'attaques récurrentes et d'accusations graves de la part de ses adversaires politiques et de la presse. Entre sa participation présumée à des tortures et à des disparitions forcées en 1992, alors qu'il était le chef de la base militaire Madre de Dios dans une région ou sévissaient la guérilla et le narcotrafic ; les déclarations intempestives, racistes et hostiles aux homosexuels de son encombrante famille, adepte de méthodes de pouvoir autoritaires ; et ses propres maladresses de langage, Ollanta Humala a prêté le flanc à cette campagne hostile.
Une campagne qui commence donc à porter ses fruits, et que les partisans du candidat nationaliste attribuent à la peur des milieux possédants et des compagnies étrangères qui ont beaucoup investi dans l'exploitation des ressources naturelles, les mines, le gaz, le pétrole, de voir Ollanta Humala mettre en oeuvre ses promesses de renégociation pour des contrats souvent conclus a leur avantage.
Le bébé enveloppé d'un fichu multicolore
Face à ce rival venu de nulle part, les deux candidats des forces politiques traditionnelles ont tente de préserver leurs chances. A droite, Lourdes Flores s'est trouvée handicapée par sa réputation de candidate des riches. Son programme économique est en effet celui qui s'accommode le plus du néo-libéralisme ambiant et du traité de libre échange que Lima est en train de négocier avec les Etats-Unis. Mais en tant que femme, elle a aussi trouvé les faveurs de ses semblables dans tous les milieux. La présence dans ses meetings à Lima de nombreux groupes de femmes aux traits typés des indiennes quechuas, le bébé enveloppé d'un fichu multicolore souvent installé dans le dos, en témoigne.
Côté social-démocrate, Alan Garcia, qui porte les couleurs du parti APRA, revient dans la course, après avoir exercé un premier mandat, de 1985 a 1990, marqué par des affaires de corruption et des atteintes aux droits de l'Homme. Et malgré les douloureux souvenirs qu'il a laissé, il n'est pas impossible qu’il accède au second tour. C'est qu'au scrutin de dimanche participeront pour la première fois quelque 2 millions de jeunes, qui n'ont pas connu Alan Garcia président et qui auront peut-être été sensibles à ses indéniables talents de tribun. En outre, l'APRA est le parti le plus ancien et le mieux organisé du pays et il offre à son candidat la solidité de ses structures réparties dans toutes les régions du Pérou.
D'après les tous derniers sondages d'avant élection, l'écart s'est resserré entre les trois principaux candidats, au point que les analystes refusent de prédire qui figurera au second tour, et qui donc aura été éliminé au premier. Après avoir nettement mené la course pendant plusieurs semaines, Ollanta Humala aurait reculé de plusieurs points dans les intentions de vote.
par Michèle Gayral
Article publié le 08/04/2006 Dernière mise à jour le 08/04/2006 à 16:32 TU