Proche-Orient
Une bouffée d’oxygène pour les Palestiniens
(Photo : AFP)
C’est après la récente mise en garde de la Banque mondiale et suite à des entretiens avec des responsables jordaniens, égyptiens et saoudiens que les membres du Quartette pour le Proche-Orient ont décidé, mardi à New York, d’assouplir la suspension de leur aide financière aux Territoires palestiniens.
Selon un rapport de la Banque mondiale publié le 7 mai, le retard dans le paiement des salaires – les 165 000 fonctionnaires palestiniens ne sont plus payés depuis mars – est dangereux à la fois sur les plans social et sécuritaire. Il « pourrait notamment provoquer un relâchement de la discipline au sein des services de sécurité ». Ces derniers jours en effet, les affrontements sanglants entre factions palestiniennes se sont multipliés, faisant plusieurs morts et de nombreux blessés.
Les interlocuteurs arabes du Quartette l’ont également convaincu des risques de guerre civile et de désastre humanitaire liés à l’étranglement financier des Territoires palestiniens. L’Autorité palestinienne, privée depuis l’arrivée au pouvoir du Hamas, fin mars dernier, de fonds européens (500 millions d’euros par an), américains, et du reversement des taxes et droits de douane collectés en son nom par Israël (60 millions de dollars mensuels), est en cessation de paiements.
Tâche délicate
Les Etats-Unis, qui ont été les premiers à refuser d’aider un gouvernement palestinien dirigé par le Hamas, considéré par les Occidentaux comme une organisation terroriste, s’opposaient initialement à l’idée européenne de verser l’aide par le biais d’une institution internationale comme la Banque mondiale. Finalement, sur l’insistance européenne et russe – Moscou voit dans la suspension de l’aide une « erreur » -, ils ont accepté le principe d’un système spécifique.
« Le Quartette a exprimé sa volonté d'approuver un mécanisme temporaire international qui ait une portée et une durée limitées, qui fonctionne en toute transparence et responsabilité, qui assure la fourniture directe de toute sorte d'assistance au peuple palestinien », a indiqué le Quartette dans un communiqué.
Commentaire de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, lors d'une conférence de presse au siège des Nations unies à New York aux côtés de Kofi Annan, le secrétaire général, et des autres responsables du Quartette : « L'idée maîtresse de cette déclaration est que la communauté internationale tente encore de répondre aux besoins du peuple palestinien. (…) Il s'agit de lui fournir une aide afin qu'il ne souffre pas de privations. »
Kofi Annan a souhaité que la mise en œuvre de ce mécanisme intervienne le plus rapidement possible, et qu’il soit évalué dans les trois mois pour décider de sa pérennité. C’est l’Union européenne qui est chargée de le mettre au point. Tâche délicate, si l’on en croit la commissaire européenne aux Relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner : « Nous proposons de tenir une réunion d'experts dès que possible à Bruxelles afin de déterminer les paramètres » du mécanisme, a-t-elle indiqué, ajoutant : « Ce n'est pas une question de jours... J'espère que c'est une question de semaines ».
L’espoir d’une reprise « rapide » de l’aide
Dans l’immédiat, les réactions palestiniennes sont partagées. Le gouvernement dirigé par le Hamas assure « apprécier les efforts déployés par les parties internationales pour alléger le siège économique imposé au peuple palestinien. » Mais il « regrette profondément l’insistance du Quartette à poser des condition préalables », c’est-à-dire la renonciation à la violence, la reconnaissance d’Israël, et le respect des accords signés par les précédents gouvernements palestiniens, notamment la Feuille de route.
De son côté, le chef des négociateurs palestiniens Saëb Erakat, proche du président Mahmoud Abbas, aurait préféré un déblocage immédiat de l’aide financière. Mais il a émis l’espoir que le dispositif conduirait à une reprise « rapide », afin qu’une « catastrophe humanitaire soit évitée ». Il en a profité pour appeler, à nouveau, le gouvernement islamiste à respecter « les engagements de l’Autorité palestinienne » auprès de la communauté internationale.
Les Israéliens, eux, sont favorables au principe. Mercredi, la ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, l’a ainsi jugé « acceptable, dans la mesure où le mécanisme qui doit être mis au point permettra de transférer des fonds aux Palestiniens sans qu'ils parviennent au Hamas (…) Israël s'efforce de favoriser l'octroi d'une aide humanitaire aux Palestiniens. »
par Philippe Quillerier
Article publié le 10/05/2006 Dernière mise à jour le 10/05/2006 à 17:38 TU