Colombie
Le président Uribe favori pour un deuxième mandat

(Photo : AFP)
Après quatre ans de pouvoir, Alvaro Uribe et son discours musclé restent populaires. Il avait promis de pacifier le pays. Il a - partiellement - tenu promesse. Sous la pression de l’armée, la guérilla a battu en retraite loin des grandes villes. Et 30 000 paramilitaires ont accepté de rendre les armes en échange d’une généreuse amnistie. Les défenseurs des droits de l’homme s’indignent de cette politique sécuritaire «dure contre la guérilla, douce avec les paras». Les scandales qui s’accumulent révèlent l’emprise croissante de ces miliciens sanguinaires sur l’administration publique et les pouvoirs locaux. Et la Colombie reste le premier exportateur mondial de cocaïne. Mais, après des années de violences quotidiennes, les assassinats et les enlèvements ont diminué. Le pays a repris confiance.
Les investisseurs étrangers aussi. L’économie a retrouvé le chemin de la croissance (+ 5 % en 2005). Alvaro Uribe vient de signer un traité de libre-échange avec les Etats-Unis et les milieux d’affaires se frottent les mains. Le chômage est en baisse. Pour les économistes, la reprise est imputable au cours des matières premières énergétiques et au dynamisme des partenaires commerciaux de la Colombie (les Etats-Unis et le Venezuela). Les uribistes, eux, vantent la bonne gestion du président.
Austère et froid, Alvaro Uribe suscite une vraie ferveur. «C’est le premier bon président que nous avons, après une longue série de corrompus et d’incapables» note Fabio, électricien. Il est «furibiste» : partisan furibond d’Uribe. Toujours en déplacement, toujours au travail, Alvaro Uribe tient le pays en main. Et se charge de le faire savoir. Les longs «conseils communautaires» qu’il tient aux quatre coins du pays sont retransmis à la télévision. Le président y écoute ses compatriotes. Ici, il s’inquiète du comportement de la police locale. Là, il promet de faire réparer le tout à l’égout. A l’occasion, il tance en direct un général ou un ministre. Les politologues voient dans ces talents de «micro-gestionnaire» une forme de populisme de droite. «M. Uribe sait faire oublier qu’aucune des grandes réformes structurelles que requiert le pays n’a été engagée» note l’analyste Ricardo Garcia.
Favori des sondages et des médias
Le président se défend d’être à droite, «un concept complètement dépassé». Mais, la semaine dernière, exalté, il a sommé les électeurs de choisir entre sa candidature et «le communisme déguisé» de ses adversaires. Alvaro Uribe a refusé tout débat public avec ceux-ci. Les humoristes politiques raillent son talent pour éviter les questions encombrantes.
Favori dans les sondages, favori des medias, Alvaro Uribe a dominé la campagne électorale. Carlos Gaviria et Horacio Serpa ne manquaient pourtant pas d’arguments. A commencer par le maigre bilan de M. Uribe en matière de lutte contre la pauvreté et de réduction des injustices sociales.
Toison blanche et physique de Père Noel, Carlos Gaviria a sur le candidat libéral l’avantage de la nouveauté. A 70 ans, cet ex-magistrat à la Cour constitutionnelle incarne le renouveau de la gauche colombienne. Il jouit d’une image d’intellectuel intègre, fervent défenseur de la justice sociale et des libertés individuelles. Magistrat, il avait voté la dépénalisation de la «dose individuelle» de drogue, il approuve celle de l’avortement (récemment décidée par la Cour) et se prononce en faveur du mariage des homosexuels. Il n’en faut pas tant pour se faire traiter de communiste masqué par M. Uribe.
par Marie-Eve Detoeuf
Article publié le 27/05/2006 Dernière mise à jour le 27/05/2006 à 18:46 TU