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France - Chili

Chirac rattrapé par les affaires françaises

Le président français a voyagé avec Michelle Bachelet dans le métro de Santiago, une réalisation en grande partie française, pour valoriser les succès de la technologie hexagonale.(Photo : AFP)
Le président français a voyagé avec Michelle Bachelet dans le métro de Santiago, une réalisation en grande partie française, pour valoriser les succès de la technologie hexagonale.
(Photo : AFP)
Rattrapé par les affaires nationales et notamment le scandale Guy Drut, Jacques Chirac fait une visite éclair d’un jour et demi à Santiago, après son passage par le Brésil, un peu morose.

Vendredi après-midi, le président arrive sur le tarmac de l’aéroport de Santiago, accompagné de cinq ministres et d’une vingtaine de chefs d’entreprise. Sous les images retransmises par la chaîne chilienne Mégavision, on lit «Jacques Chirac arrive en pleine affaire de corruption, d’espionnage et de financement politique ilégal». Et les portraits du président français ne sont pas des plus révérencieux. L’affaire Clearstream ne cesse d’être évoqué sur toutes les chaînes, on rappelle aussi les manifestations récentes contre le CPE, celles des banlieues. Et le taux de popularité de 30 % de Chirac, «le plus bas jamais atteint par un président de la cinquième République», insistent les journalistes.

Malgré le tapis rouge, c’est donc sans gloire que débarque le chef de l’Elysée, pour une visite éclair d’un jour et demi, après un passage par le Brésil. Il arrive 42 ans après la dernière visite d’un président français au Chili, Charles De Gaulle. Il est le premier président à rendre une visite officielle d’Etat depuis que Michelle Bachelet a pris ses fonctions de présidente, le 11 mars. Et, déjà, sur toutes les lèvres, cette question : pourquoi le Chili ?

Dans une interview donnée au Mercurio, le journal national d’influence, Jacques Chirac explique : «Nous partageons une vision commune qui est la nécessité d’humaniser la globalisation, et la nécessité du multilatéralime. Nous avons également une commune préoccupation tant pour les problèmes sociaux que pour le développement économique. Ceci nous conduit à vouloir fortifier de manière permanente nos relations économiques, techniques, scientifiques et culturelles.»

La «fracture sociale» à la chilienne

L’évolution du Chili, qui, partie de l’ultralibéralisme sous la dictature de Pinochet, tente aujourd’hui d’apporter plus de protection sociale à ses citoyens dans une démocratie apaisée, résonne chez le Chirac de la «fracture sociale». Lors de la conférence de presse, après son entrevue avec la présidente, il se pâme devant les quatre priorités établies par Michelle Bachelet pour ses quatre années de mandat, lors de son discours le 21 mai dernier au Congrès : un meilleur système de retraite, une éducation publique de qualité, une impulsion à l’innovation et la qualité de la vie dans les quartiers difficiles.

Pour aider le Chili à atteindre ses objectifs, six accords de coopération sont signés entre les ministres chiliens et français dans les domaine de la culture, de la santé, de l’éducation et de la recherche notamment. Ce que Jacques Chirac oublie, c’est que le Chili est loin, malgré un certain effort, d’être un modèle social : il fait partie des dix pays les plus inégalitaires au monde.

Ce passage par l’Amérique latine est aussi perçu comme un voyage d’adieu à ses amis : d’abord Lula, président du Brésil, ensuite Ricardo Lagos, le prédécesseur de Michelle Bachelet à la tête du Chili. C’est avec eux, et il ne manque pas de le rappeler, qu’il a créé une aide au développement, grâce à un système de taxation internationale : la taxe sur les billets d’avion, déjà perçue au Chili.

Rattrapé par l’amnistie de Guy Drut

Mais le Chirac social, pourfendeur de la pauvreté, est rattrapé, au milieu des sourires chiliens et des protocoles, par le tollé suscité en France par la grâce présidentielle accordée à Guy Drut. Il qualifie nerveusement l’amnistie de Guy Drut - condamné dans l’affaire des marchés publics d’Ile de France - de «parfaitement légitime» et nécessaire pour «garantir l'influence de la France» au sein du Comité international olympique (CIO).

Le président n’est pas le seul à se voir rattrapé par les affaires nationales. La télévision nationale chilienne interroge, quant à elle, Bachelet sur les plus de 100 000 étudiants du secondaire en grève dans les collèges et lycées, qui réclament leur droit à une meilleure éducation publique. Un premier conflit social test pour Michelle Bachelet et sa volonté de gouverner de manière plus citoyenne.

De cette visite dont ils se sentent fiers, les Chiliens retiendront sûrement le baise-main devant le palais de la Moneda, qui a fait de Chirac une icône de la galanterie, et la bousculade dans le métro de Santiago. En revanche, si l’on a beaucoup parlé de ventes d’hélicoptères français ou d’un satellite, rien n’a encore été signé.


par Claire  Martin

Article publié le 28/05/2006 Dernière mise à jour le 28/05/2006 à 14:12 TU