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Chili

« Michelle Presidenta ! »

Avec plus de 53% des voix, Michelle Bachelet est la première femme élue présidente du Chili.(Photo : AFP)
Avec plus de 53% des voix, Michelle Bachelet est la première femme élue présidente du Chili.
(Photo : AFP)
La première présidente du Chili, et l’une des rares d’Amérique latine, a remporté haut la main, dimanche, l’élection avec 53,49 % des voix. Les espoirs qu’elle porte sont grands, mais son mandat est court.

De notre correspondante au Chili

« Qui aurait pensé, il y a 20, 10 ou 5 ans en arrière, que le Chili élirait une femme comme présidente ? ». C’est par ces mots, avec émotion, que la première presidente du Chili, la socialiste Michelle Bachelet, s’est adressée dimanche soir, suite aux résultats des élections, aux 200 000 personnes venues fêter sa victoire sans appel. Souriants, certains les larmes aux yeux, les Chiliens, portant drapeaux et pancartes à son effigie, étaient sortis spontanément dans la rue, en famille, exprimer leur joie. Ce qui ne s’était plus vu, sûrement, depuis la victoire du « non » au référendum qui a destitué Augusto Pinochet de la présidence de la République en 1988.

Car c’est d’abord un grand espoir que porte cette pédiatre de 54 ans, qui représente la coalition de centre-gauche au pouvoir depuis 16 ans, formée des démocrates-chrétiens, radicaux et socialistes. Et d’abord l’espoir d’un « Chili plus juste ». Dans ce pays parmi les plus inégalitaires au monde, la classe moyenne et pauvre profite peu de la croissance, alors qu’elle oscille entre 5 et 6 % par an. Michelle Bachelet a donc promis qu’au cours de son mandat, « nous ferons en sorte que les succès de ce pays merveilleux entre dans le foyer de tous les Chiliens, parce que je veux qu’on se souvienne de mon gouvernement comme celui de tous et pour tous. » Ce qui s’accompagnera de réformes dans les secteurs de la santé, de l’éducation, des retraites.

« Un grand changement pour les femmes »

Elle incarne également un immense espoir pour ses paires. Les femmes, qui votent traditionnellement plus à droite, ont voté cette fois plus à gauche. « Je pense qu’il va y avoir un grand changement pour les femmes au Chili », lance ainsi Haidi Garrillo, quand on lui demande pourquoi elle a voté en faveur de Michelle Bachelet. Car cette petite brune de 60 ans qui travaille comme femme à tout faire dans une famille aisée, a toujours voté en faveur de la UDI, le parti d’extrême-droite chilien (lié à la dictature de Pinochet).

Le Chili fait partie des pays les plus conservateurs d’Amérique latine, et la situation des femmes n’est pas enviable. La loi sur le divorce a été adoptée il y a seulement deux ans, quand l’avortement, même thérapeutique, est encore un délit. Seule 37 % des femmes travaillent. Une femme sur deux serait victime de violences conjugales. « La Michelle », comme l’appellent affectueusement les Chiliens, a promis un gouvernement paritaire, une tolérance zéro face aux violences intrafamiliales, des crèches pour les femmes qui travaillent…

Beaucoup d’espoirs, beaucoup d’engagements

Entourée de la société civile durant toute sa campagne, elle promet également un gouvernement au « style plus citoyen, plus proche, plus participatif ». Ce qui met sa coalition un peu mal à l’aise. Après 16 ans de pouvoir, il est dur de céder du terrain. Or, c’est ainsi qu’elle s’est présentée, comme la candidate citoyenne. Un style de politique que certains mettent sur le compte de sa condition de femme. « Elle ne s’est pas convertie en homme pour obtenir le respect de ses pairs, et moins encore en potiche », souligne Monica Gonzalez, rédactrice en chef du quotidien Siete. « C’est femme qu’elle mène sa politique ».

Beaucoup d’espoirs donc, beaucoup d’engagements pris. Et quatre années de mandat seulement pour les réaliser. Si le président bénéficie de pouvoirs énormes au Chili, étant à la fois chef d’Etat et chef de gouvernement, si pour la première fois depuis la fin de la dictature une coalition de centre-gauche a la majorité aux Parlement et Sénat, « la presidenta » devra négocier avec les partis de sa coalition, et surtout avec les démocrates-chrétiens, plus conservateurs et centristes. C’est maintenant que commence le vrai défi.


par Claire  Martin

Article publié le 17/01/2006 Dernière mise à jour le 17/01/2006 à 08:30 TU