Transport aérien
Le prix du pétrole pèse sur les compagnies
(Photo: AFP)
Alors que le trafic aérien est en pleine croissance, le directeur général de l’Association internationale du transport aérien (IATA) a une vision pessimiste des résultats des compagnies aériennes pour l’année 2006. C’est à cause du pétrole et du surcoût de la facture de kérosène que ces compagnies aériennes vont encore perdre de l’argent. « Cette année, nous prévoyons une facture carburant supérieure à 100 milliards de dollars, elle était de 92 milliards en 2005 et de 44 milliards en 2004 », a expliqué le patron de l’IATA, Giovanni Bisignani.
Avec 261 compagnies membres de l’organisation, l’IATA a une vue d’ensemble du trafic car ces compagnies représentent 94% du total du trafic aérien. Depuis 2001, le secteur a été obligé de faire des économies car après le 11-Septembre, le trafic passager s’est effondré. En cinq ans, les pertes des compagnies ont atteint 40,7 milliards d’euros. « Nous commençons à entrevoir la lumière au bout du tunnel (…) Depuis 2001, la productivité a progressé de 33%, les coûts de vente et distribution ont baissé de 10% et tous les coûts non liés au pétrole, de 13% », a déclaré, au cours de cette assemblée générale de l’IATA, Giovanni Bisignani, son directeur général.
Des économies absorbées par la hausse du pétrole
Selon l’IATA, l’alourdissement de la facture pétrolière est venu perturber des résultats qui étaient proches de l’équilibre. Avec l’augmentation du prix du baril de pétrole, la facture carburant du transport aérien devrait, cette année, atteindre 86,75 millions d’euros, soit 26% des coûts. Les compagnies pétrolières avaient fait leurs prévisions pour l’année en cours sur un baril de pétrole à 57 dollars. Finalement, son prix devrait atteindre une moyenne de 66 dollars. Et les économies financières réalisées ces dernières années vont être absorbées par la hausse du prix du kérosène.
Les perspectives pour l’année en cours sont un peu faussées par les mauvaises performances des compagnies américaines. Comme en 2005, ce sont elles qui ont eu les plus grandes pertes. Les Etats-Unis et l’Afrique mises à part, toutes les autres régions du monde sont tout de même bien parties pour dégager des résultats positifs en 2006. L’IATA modère un peu la tendance en annonçant des performances à la baisse pour les compagnies européennes et asiatiques. En tout cas, malgré la hausse du prix du pétrole, l’IATA estime que le retour aux bénéfices est un objectif viable pour 2007.
Nouvelle économie avec le billet électronique
« La rentabilité du secteur ne s’est pas détériorée. Les pertes de 2006 devraient être légèrement inférieures à celles de 2005, à quelque 3 milliards de dollars », a encore expliqué Giovanni Bisignani. Il faut dire que le trafic passagers est reparti à la hausse. Dans le même temps, les économies d’exploitation vont continuer à faire baisser les prix de revient des lignes. Et fin 2007, le billet électronique devrait complètement remplacer le billet en papier. Cette généralisation permettra de nouvelles économies substantielles. « Aujourd’hui, un billet sur deux est un billet électronique. Mais il faut accélérer le mouvement. Il n’est plus possible de revenir en arrière. Il nous reste 574 jours », a estimé Giovanni Bisignani.
Pour l’IATA, émetteur de 315 millions de billets en papier en 2005, le billet électronique a plusieurs avantages. D’abord il évite à certains voyageurs de perdre leur billet. Et surtout, le coût de fabrication est bien moindre : 1 dollar pour un billet électronique contre 10 pour un billet traditionnel. Cette petite révolution inquiète les salariés qui travaillent aux comptoirs d’enregistrement. Le billet électronique va souvent de pair avec l’enregistrement automatique. Des réductions de personnel sont à craindre à l’occasion de cette petite révolution informatique.
Les compagnies cherchent également à accroître leur rentabilité en remplissant plus leurs avions. L’IATA estime que le profit se situe à un taux de remplissage de 63,3%. En 2006, il se situera aux alentours de 62%.
La polémique entre l’Union européenne et les Etats-Unis sur les informations concernant les passagers fait du tort au transport aérien. C’est le sentiment du patron de l’IATA. Il faut savoir que, suite à une plainte du Parlement européen, la Cour de justice européenne a décrété illégal de transmettre 34 informations sur tout passager se rendant aux Etats-Unis. Pourtant, la réglementation américaine impose de fournir ces renseignements dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Rien n’est réglé et « cela illustre l’incapacité actuelle des gouvernements à se concerter, y compris sur un sujet aussi important que la sûreté aérienne », a commenté Giovanni Bisignani. Il a par ailleurs souligné que le trafic aérien entre les Etats-Unis et l’Europe représente 60% du total mondial.
Autre sujet de préoccupation pour les compagnies aériennes : la multiplication des taxes. La Suède a son projet avec un prélèvement destiné à financer la protection de l’environnement. La France, elle aussi, a créé une taxe de solidarité. Ces surcoûts déplaisent aux compagnies. L’IATA les estime « particulièrement absurdes ». D'ailleurs aucun représentant du gouvernement français ne s’exprimera à la tribune de l’assemblée générale de l’IATA, comme c’est la tradition.par Colette Thomas
Article publié le 05/06/2006Dernière mise à jour le 05/06/2006 à 16:23 TU