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Israël

La colère des réservistes israéliens

Soldats israéliens de retour du Liban, le 15 août 2006. 

		(Photo: AFP)
Soldats israéliens de retour du Liban, le 15 août 2006.
(Photo: AFP)
En Israël, la conduite de la guerre suscite une mise en cause croissante des responsables politiques et militaires. Tandis que le gouvernement tente de calmer la grogne, les réservistes de retour du front ont pris la tête de la campagne de protestation.

De notre correspondante à Jérusalem

Combien de temps le général Dan Haloutz réussira-t-il à se maintenir à la tête de l’armée israélienne ? Les critiques avaient déjà commencé à s’élever dans les derniers jours de la guerre mais, depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, elles ont redoublé d’intensité. Manque de préparation de l’armée, impression de flou dans le commandement, hésitations, erreurs tactiques : les tribunes dans les journaux se multiplient ainsi que les appels à la démission. «Le chef d’état-major est responsable du manque de confiance des Israéliens en la capacité de l’armée à gagner», affirmait mardi le quotidien Haaretz dans son éditorial. «Il est responsable, même si d’autres personnes au-dessus et au-dessous de lui partagent cette responsabilité. Les politiques seront jugés à la Knessset, lors des prochaines élections et peut-être aussi par une commission d’enquête (…). Mais ce qui doit encore arriver doit commencer par la démission du chef d’état-major, ce qui donnerait un signal clair que le changement est imminent », poursuit le journal.

Danny Rothschild

Franck Weil-Rabaud a rencontré l'ancien patron du renseignement militaire israélien

«Si vous me dites les objectifs de cette guerre, je pourrais vous dire s'ils ont été atteints ou non...»

La conduite de la guerre va faire l'objet d'une enquête du contrôleur de l'Etat, le juge Micha Lindenstrauss. Mais les conclusions du rapport seront non contraignantes et de nombreux Israéliens réclament la mise en place d’une commission d’enquête dotée de réels pouvoirs. Ehud Olmert, lui-même très affaibli, s’est insurgé contre cette campagne. «Nous n'avons pas d'autre Tsahal. Que voulez-vous qu'on fasse ? Qu'on mette en rang les militaires et qu'on les gifle ? Que nous les immobilisions en les soumettant quotidiennement à des commissions d'enquête pour qu'ils ne parviennent pas à se préparer à la prochaine confrontation ? Et après, le leur reprocher ? Je ne jouerai pas ce jeu-là», a déclaré le Premier ministre, invectivé par la population et les élus locaux lors d’une visite hier dans le nord du pays.

«Nous ne sommes plus sûrs de rien»

Pour l’instant, Dan Haloutz, qui se qualifie de «punching ball», résiste aux appels à la démission. Mais la campagne lancée à leur retour de la guerre par des réservistes mécontents le place, tout comme le gouvernement, dans une situation de plus en plus délicate. Lundi, des centaines d’entre eux ont adressé une lettre ouverte cinglante au ministre de la défense et au chef d’état-major, dénonçant des carences dans la gestion de la guerre qui les ont «privés de victoire» et exigeant une enquête approfondie. D’autres ont manifesté leur désarroi et leur colère sous les fenêtres du Premier ministre, à Jérusalem.

Yossi Magor, un réserviste de 29 ans, fait partie de l’unité Alexandroni, la première à avoir été appelée au Liban, le 21 juillet dernier. Son récit est accablant. «Nous sommes partis à pied. Nous avons marché 15 kilomètres avec 35 kilos sur le dos. Notre mission devait durer entre 18 et 36 heures, mais on a mis deux semaines à se sortir de là». Après trois jours, les provisions en eau et en nourriture étaient épuisées. «On a crevé de faim et de soif pendant plus de deux jours, et puis il a bien fallu faire quelque chose. Alors on dû briser les vitres d’une station service pour trouver à boire et à manger pour les 400 soldats de notre unité», raconte ce futur papa d’une petite fille, qui travaille pour un transporteur à l’aéroport de Tel-Aviv.

Michel Paul

Correspondant de RFI à Jérusalem

«La réserve fait partie de la vie quotidienne des Israéliens.»

«Nous manquions également de lunettes infra-rouges, et d’équipements spécifiques pour les combats de nuit», renchérit un autre. Mais tous sont d’accord pour dire que le plus grave reste l’absence de leadership. «La confusion était évidente. On l’entendait, on le sentait chez ceux qui nous commandaient sur le terrain. On avait besoin de savoir ce qu’on faisait, où on allait, mais les ordres changeaient toutes les heures», raconte Yossi, qui réclame une enquête pour ne pas répéter les même erreurs à l’avenir. En attendant cette «prochaine fois» à laquelle tous les Israéliens semblent résignés, certains comme Itchko veulent que les têtes tombent. «Un homme qui revient de la guerre devrait se sentir fier de lui, avoir l’impression qu’il a accompli quelque chose d’important. Mais ce n’est pas notre cas. Nous étions très motivés au début, mais maintenant, nous ne sommes plus sûrs de rien. Je ne crois pas que les gens qui nous dirigent aient la compétence de le faire. Le gouvernement n’a pas fait son travail. L’état-major n’a pas fait son travail. C’est la raison pour laquelle je crois qu’ils doivent partir».

par Sonia  Chironi

Article publié le 22/08/2006 Dernière mise à jour le 22/08/2006 à 14:07 TU

Audio

Franck Weil-Rabaud

Envoyé spécial de RFI à Jérusalem.

«En regagnant son bureau, Ehud Olmert peut désormais lire des calicots appelant à sa démission. Cantonnées jusqu'à présent dans les colonnes des journaux, les critiques sur sa conduite de la guerre gagne la rue.»

[22/08/2006]

Hubert Védrine

Ancien ministre français des Affaires étrangères

«La résolution 1701 ne suffit pas. Il faut un réengagement très clair pour le respect de la mise en oeuvre de cette résolution par les Israéliens, par l'ensemble des forces libanaises, par les Syriens, et les Iraniens.»

[22/08/2006]

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