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Liban

Hassan Nasrallah se veut rassurant

Rassurant, Hassan Nasrallah l’a été aussi avec l’armée libanaise et la force des Nations unies (Finul). 

		(Photo : AFP)
Rassurant, Hassan Nasrallah l’a été aussi avec l’armée libanaise et la force des Nations unies (Finul).
(Photo : AFP)

Dans sa première interview télévisée depuis l’arrêt des hostilités, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, s’est voulu rassurant envers la population et la force internationale des Nations unies appelée à se déployer au sud du Liban. Mais il a lancé des critiques parfois acerbes contre le gouvernement libanais et contre ses détracteurs.


De notre correspondant à Beyrouth

Hassan Nasrallah est apparu calme et souriant, comme à son habitude, mais son discours était teinté d’amertume. Ses critiques sont allées au gouvernement, qu’il accuse de laxisme dans la reconstruction, et à ses détracteurs politiques au Liban, qu’il soupçonne d’avoir souhaité, en secret, la défaite de la Résistance du Hezbollah face à Israël. Dans cette première longue interview télévisée depuis la cessation des hostilités, le chef du Hezbollah s’est voulu rassurant. S’adressant aux Libanais, il a assuré qu’il n’y aurait pas de second round entre Israël et le Hezbollah. Selon lui, les menaces de responsables israéliens prophétisant une prochaine reprise des combats visent à intimider le Liban afin qu’il cède aux exigences de l’Etat hébreu concernant le déploiement de la Finul à la frontière syrienne et le contrôle des ports et aéroports par la force internationale.

Hassan Nasrallah s’est longuement étendu sur la reconstruction des 15 000 appartements totalement détruits et des 30 000 unités partiellement endommagées durant les 33 jours de guerre. Il a reproché au Premier ministre Fouad Siniora son manque de transparence sur ce sujet. «C’est à l’Etat de procéder à la reconstruction, a-t-il dit. S’il ne veut pas le faire, qu’il nous le fasse savoir clairement et nous assumerons nous-mêmes cette responsabilité». Au lendemain de l’arrêt des hostilités, le 14 août, le Hezbollah avait commencé à verser 12 000 dollars à toutes les familles dont les maisons avaient été détruites ou endommagées, afin qu’elles s’installent momentanément en attendant la reconstruction de leurs logements. Chiites, sunnites et chrétiens dans toutes les régions du pays ont bénéficié de cette aide.

«Le Hezbollah sera un soutien pour l'armée libanaise»

Rassurant, Hassan Nasrallah l’a été aussi avec l’armée libanaise et la force des Nations unies (Finul), appelées à se déployer entre la rivière Litani et la frontière avec Israël, conformément à la résolution 1701 du Conseil de sécurité. «Le Hezbollah sera un soutien pour l'armée libanaise et il n'y aura pas de problème avec la Finul tant que sa mission n'est pas de désarmer la Résistance», a-t-il précisé. Il a ajouté qu’il n'y aura pas de présence armée du Hezbollah au Liban sud. «Si des soldats libanais rencontrent un homme armé dans cette région, ils auront le droit de le désarmer», a-t-il dit.

Le secrétaire général du Hezbollah a indiqué que son parti faisait preuve d’une grande retenue malgré les «provocations israéliennes» au sud du Liban, où l’armée israélienne maintient toujours neuf positions à l’intérieur du territoire libanais. «Mais notre retenue a des limites. Nous ne resterons pas indifférents indéfiniment aux exactions israéliennes», a-t-il précisé. Faisant allusion aux fermes de Chebaa, occupées par Israël et revendiquées par le Liban, il a souligné que tant que des terres libanaises restent occupées, la résistance est un droit légitime. «C’est une victoire historique et stratégique sur l’Etat hébreu, a répété Hassan Nasrallah. Ses conséquences vont apparaître dans les semaines et les mois à venir aussi bien en Israël que dans le monde arabe».  

Le chef du Hezbollah a révélé que des négociations indirectes avaient commencé par l'intermédiaire du président du Parlement Nabih Berry pour un échange de prisonniers entre Israël et son parti. Il semble que l'Italie et les Nations unies soient intéressées pour y participer, a-t-il dit. La capture par les hommes de Hassan Nasrallah de deux soldats à l’intérieur d’Israël, le 12 juillet dernier, avait déclenché une guerre dévastatrice qui a fait, côté libanais, quelque 1 400 morts dont 1 280 civils, et 4 500 blessés. Israël, pour a part, a eu 156 morts, dont 122 militaires. Le chef du Hezbollah a assuré que son parti n'aurait pas capturé les deux soldats israéliens s'il avait su que cela allait mener à une «guerre d'une telle ampleur».

Appel à la formation d'un cabinet d'union nationale

Lorsqu’il a évoqué des questions de politiques internes, Hassan Nasrallah n’a pas pu cacher son amertume. «Tous ceux qui ont combattu avec la Résistance, accueilli des réfugiés, défendu la cause par la plume, ou ont versé une larmes pour les morts, peuvent considérer que cette victoire est la leur, a-t-il dit. Mais pour les autres, je ne peux rien faire. Aurions-nous dû être vaincus par les Israéliens pour leur faire plaisir?» Répondant à ceux qui accusent le Hezbollah d’ignorer l’accord de Taëf, qui a mis un terme à la guerre civile, en 1990, Hassan Nasrallah a appelé à la formation d’un cabinet d’union nationale. «C’est l’une des premières exigences de cet accord, a-t-il dit. Pourquoi refusent-ils de la mettre en application? Pourquoi ne veulent-ils pas intégrer au gouvernement les représentants authentiques des chrétiens», en allusion du général Michel Aoun, qui s’est résolument rangé aux cotés du Hezbollah pendant la guerre. Selon le chef du Hezbollah, la situation des chrétiens n’a pas changé malgré le départ des Syriens. «Ils étaient marginalisés hier, ils le sont toujours aujourd’hui», a-t-il dit.

Le chef du Hezbollah a affirmé qu’il ne participerait plus, pour des raisons de sécurité, à la conférence du dialogue national, suspendue à cause de la guerre. «Les Israéliens n’hésiteraient pas à m’assassiner avec d’autres responsables qui ont reçu des menaces de mort pendant la guerre», a-t-il déclaré en faisant encore allusion au général Aoun. Hassan Nasrallah vit dans un endroit secret depuis le début de la guerre. Il n’apparaît plus en public et ne reçoit que ses proches collaborateurs. La journaliste de la chaîne libanaise NTV qui a recueilli l’interview a été transportée d’un endroit à l’autre dans des voitures aux vitres sombres, avant d’atterrir plusieurs heures plus tard dans un appartement qu’elle était incapable d’identifier.



par Paul  Khalifeh

Article publié le 28/08/2006 Dernière mise à jour le 28/08/2006 à 15:37 TU