Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Côte d’Ivoire

Quels déchets ?

C'est sur le Probo Koala que sont arrivés les déchets toxiques déversés dans la région d'Abidjan dans la nuit du 19 au 20 août. 

		(Photo : AFP)
C'est sur le Probo Koala que sont arrivés les déchets toxiques déversés dans la région d'Abidjan dans la nuit du 19 au 20 août.
(Photo : AFP)
Trois semaines après le déversement de déchets toxiques dans des décharges autour d’Abidjan, la pollution diminue car une partie des polluants s’est évaporée. Environ 9 000 personnes ont été soignées pour vomissements, nausées, ou difficultés respiratoires. Des symptômes qui semblent montrer que ces déchets sont des résidus de l’industrie du raffinage. L’affréteur du navire pour sa part se déclare inquiet et affirme que le Probo Koala a déchargé des «eaux usées».

«Trafigura est très inquiète au regard des informations publiées sur la santé de la population d’Abidjan et recherche activement par quels moyens elle peut aider les autorités». Trois semaines après la catastrophe industrielle qui a coûté la vie à 6 personnes et qui a fait souffrir plusieurs milliers de personnes de nausées, de vomissements, ou de problèmes respiratoires, l’affréteur du navire, la multinationale Trafigura, réagit sur son site internet aux événements d’Abidjan à travers un communiqué. La compagnie, qui avait donc loué les services du Probo Koala pour ce transport d’«eaux usées», explique dans ce texte que «de hauts responsables de la compagnie sont actuellement à Abidjan et travaillent avec les autorités pour essayer d’établir ce qui s’est passé après le déchargement des déchets». 

Sur son site internet, Trafigura indique également qu’elle est spécialisée dans toutes les activités liées au pétrole. La gamme des produits traités par l’entreprise «couvre l’ensemble des produits issus du raffinage». Le groupe est également positionné dans le commerce du pétrole ainsi que son transport, aussi bien par navire, pipe-line, voie ferroviaire ou camion. Dans son communiqué concernant Abidjan, Trafigura explique avoir «demandé par écrit à Tommy» de s’occuper de ces déchets en respectant les normes de sécurité. Tommy est la société locale qui a déchargé la cargaison du navire. La multinationale précise enfin qu’il venait du Nigeria où il avait livré de l’essence chargée en Estonie.

Quelques jours après le déversement des déchets dans les décharges ivoiriennes, des techniciens français et d’autres envoyés par les Nations unies, sont venus apporter leur soutien logistique aux spécialistes ivoiriens de la pollution. Plus de vingt jours après la catastrophe, rien n’a encore filtré concernant les résultats des analyses effectuées, notamment sur une éventuelle pollution de l’eau. Cependant une nouvelle rassurante a été donnée par le ministère de la Santé. Son porte-parole a indiqué que la pollution atmosphérique a fortement diminué. «Ils ont dit que c’était le sulfure d’hydrogène qui avait posé un problème», a expliqué le porte-parole Simeon N’Da. «Heureusement, ils ont dit qu’une grosse quantité s’était évaporée dans l’air, ce qui signifie que le danger est moins important pour la population». Respirer trop de sulfure d’hydrogène peut être mortel mais en petites quantités, cette substance est inoffensive.

La signature du sulfure d’hydrogène

Selon l’association écologiste Greenpeace, les déchets toxiques qui ont été expédiés dans les décharges ivoiriennes sont des boues issues du raffinage du pétrole. Ces boues sont riches en matière organique et en éléments soufrés très toxiques comme l’hydrogène sulfuré ou les mercaptans, à l’odeur nauséabonde. A Abidjan les victimes ont été rendues malades par l’inhalation de ce genre de substances.

Que ce soit l’information donnée par le ministère ivoirien de la Santé ou par Greenpeace, le sulfure d’hydrogène  semble donc être en cause dans cette pollution. Ce produit se trouve à l’état naturel en particulier dans le pétrole, le gaz naturel, les gaz qui jaillissent des volcans ou des sources d’eau chaude. Les activités industrielles génèrent elles aussi du sulfure d’hydrogène, comme le traitement des eaux usées ou le raffinage du pétrole. La mauvaise odeur de ce composant chimique permet à l’homme de s’en méfier.

Plus de résidus de raffinage en Afrique qu’ailleurs

«Eaux usées» ou résidus de raffinage ? Les informations en provenance de la capitale ivoirienne font pencher la balance vers la seconde hypothèse. Sur un plan purement économique, il  n’aurait pas été logique que le Probo Koala reparte à vide du Golfe de Guinée. A-t-il chargé les déchets en question dans l’un des Etats côtiers du Golfe ? Les enquêtes le diront peut-être. Une chose cependant est sûre : l’industrie africaine du raffinage n’est pas performante. Elle ne répond pas à la demande et le continent doit importer les dérivés du pétrole dont il a besoin. Les pays africains qui bordent la côte atlantique ont pourtant tous une raffinerie ou le projet d’en construire une, même si c’est au Nigeria que cette industrie est la plus développée. Ces installations sont le plus souvent vieillottes et produisent beaucoup de déchets. Les procédés de fabrication ne permettent pas d’utiliser au maximum ce que contient l’or noir.

Dans les pays développés, un raffinage plus performant permet de produire moins de résidus. En France, ces restes sont considérés comme des déchets industriels spéciaux et sont stockés dans des décharges dédiées. Souvent, ils sont incinérés. Les boues de raffinage contiennent des métaux lourds utilisés dans les processus d’extraction. Ces métaux sont dangereux pour la santé.    



par Colette  Thomas

Article publié le 12/09/2006 Dernière mise à jour le 12/09/2006 à 17:32 TU

Audio

Boris Fleuranceau

Journaliste à RFI

«La Côte d'Ivoire n'était pas préparée à réagir en cas d'intoxication de la population.»

[12/09/2006]

Articles