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France

Un prof de philo menacé par les islamistes

«<em>Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ?</em>» tribune signée par Robert Redeker dans les pages Débats du quotidien <em>Le Figaro</em>. 

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«Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ?» tribune signée par Robert Redeker dans les pages Débats du quotidien Le Figaro.
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Des menaces de mort ont été proférées contre Robert Redeker, professeur dans un lycée français de la banlieue toulousaine, depuis la parution d’une tribune critique sur l’islam et sur «l’islamisation des esprits en France», dans le Figaro du 19 septembre dernier. Les propos, loin de passer inaperçus, ont fâché et enflammé quelques esprits au sein de la communauté musulmane. Depuis, l’enseignant n’assure plus ses cours et se trouve placé sous protection policière permanente pour échapper aux menaces d’extrémistes. Les réactions oscillent entre revendication du droit constitutionnel à la libre-opinion au sein d’une démocratie et réponses pondérées du gouvernement pour ne pas exacerber les tensions. Gilles de Robien, ministre de l’Education s’est déclaré «solidaire» de l’enseignant mais a rappelé que, «en tant que fonctionnaire, il aurait dû se montrer prudent, modéré et avisé». Avec hauteur, la Grande Mosquée de Paris déplore les propos de «ce monsieur» et déclare : les «menaces de mort sont inacceptables. C’est uniquement par la plume qu’il faut le combattre».

Depuis la parution d’une tribune au vitriol sur l’islam, signée par Robert Redeker, professeur de philosophie, l’auteur a reçu plusieurs menaces de mort et se trouve sous protection policière jour et nuit ; le lycée Pierre-Paul Riquet de Saint-Orens de Gameville où il enseignait jusqu’à présent, près de Toulouse, est en panne de professeur de philo et placé sous haute surveillance ; enfin, c’est l’ensemble de la petite bourgade de Haute-Garonne qui s’émeut et craint les représailles vengeresses des «fous de Dieu.» Le philosophe s’interrogeait : «Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ?». L’article incriminé faisait écho à la polémique suscitée par les déclarations du pape Benoît XVI à Ratisbonne la semaine précédente. Traqué, l’auteur de la tribune insiste sur la légitimité de son interrogation et déclare : «En quelque sorte, les islamistes ont réussi à me punir sur le territoire de la République comme si j’étais coupable d’un délit d’opinion. Je demande à la France de prendre conscience de cette chose. Déjà, il y a une petite victoire des islamistes car je ne peux pas exercer, je ne peux pas aller et venir, je suis obligé de me cacher».

«Engagé dans un combat du XVII ou du XVIIIe siècle»

De l’avis de certains, parmi ses élèves et ses collègues, Robert Redeker affectionne le ton polémique et la provocation qui suscitent des débats. Si tel est le cas, cette fois il a fait mouche. Le Coran, a-t-il déclaré, «exalte la violence et la haine», et le prophète Mahomet est un «maître de la haine», un «pillard, massacreur de juifs et polygame». Plus qu’une interrogation, ces affirmations virulentes ont suscité des réactions immédiates au point que  les journalistes français ont reçu la consigne de quitter Gaza le lendemain matin de la parution de l'article. Au Caire, le gouvernement égyptien a interdit par décret, dimanche, la vente des numéros récents de trois grands journaux européens, dont le Figaro, estimant que ces journaux contenaient des articles «insultants» et «hostiles à l’islam» (*). Robert Redeker, quant à lui, s’est vu aussitôt indiqué par courrier électronique : «Vous ne serez plus jamais en sécurité sur cette terre, un milliard trois cents millions de musulmans sont prêts à vous tuer».

«Ce qui m’est fait correspond tout à fait à ce que je dénonce dans mes écrits : l’Occident se retrouve sous surveillance idéologique de l’islam (…) J’agis ici strictement dans le cadre de notre légalité républicaine. Je ne fais qu’exercer un droit constitutionnel, celui qui nous garantit la liberté d’expression», plaide le philosophe qui regrette d’avoir «le sentiment d’être engagé malgré [lui] dans un combat du XVII ou du XVIIIe siècle, celui qui consistait à s’opposer à l’intolérance religieuse». «Au fond, depuis Voltaire, il n’y a plus eu de délit d’irrévérence en matière de religion. On ne va tout de même pas abolir tout cela», a déclaré Robert Redeker à la Dépêche du Midi, de sa résidence clandestine.

«Qu'il aboie avec les loups!»

Selon l’enseignant et la police, des forums djihadistes donnent toutes les coordonnées pour pouvoir assassiner l’auteur aux propos sulfureux : «Il y a ma photo, mon adresse, les endroits où je travaille qui sont ciblés et un plan très précis pour pouvoir se rendre à mon domicile avec la mention ‘ce porc doit avoir la tête coupée’», a-t-il confié à la presse. Robert Redeker et sa famille sont physiquement protégés jour et nuit par la DST. Pourtant, le philosophe se sent seul et abandonné, regrettant que le ministre de l’Education n’ait «pas daigné [lui] demandé s’[il] avait besoin d’une aide». Sa demande, en revanche, a été entendue par le président du Mouvement pour la France (MPF). Philippe de Villiers a demandé vendredi au président Jacques Chirac de «symboliquement héberger [Robert Redeker ] à l’Elysée (…) palais de la République, plutôt que de le laisser errer».

Le ministre de l’Education et le Premier ministre ont tous les deux qualifié ces menaces de représailles comme «inacceptables». «Nous sommes dans une démocratie, chacun doit pouvoir s’exprimer librement, dans le respect des autres. C’est la seule limite qui doit être acceptée à cette liberté», a déclaré le Premier ministre Dominique de Villepin. Le Figaro soutient totalement Robert Redeker en insistant sur le fait que «pour comprendre notre monde, pour se faire une opinion, il faut aussi savoir regarder ceux qui vivent autrement et écouter ceux qui pensent différemment». Le ministre de l’Education a rappelé le devoir de réserve des fonctionnaires : «Cet enseignant a impliqué l’Education nationale. Un fonctionnaire doit se montrer prudent, modéré, avisé en toutes circonstances».

Abdallah Zekri, le président de la Fédération régionale du sud-ouest de la Grande Mosquée de Paris, chargé de mission auprès du président du Conseil français du culte musulman Dalil Boubaker, appelle de son côté à la sagesse : «Si ce monsieur (Redeker) a envie d’aboyer avec les loups, qu’il aboie ! Mais les menaces de mort sont inacceptables. C’est uniquement par la plume qu’il faut le combattre», a-t-il déclaré.

par Dominique  Raizon

Article publié le 29/09/2006 Dernière mise à jour le 29/09/2006 à 18:06 TU

(*) : Un décret du ministre de l’Information Anas al-Fekki a interdit dimanche à la vente trois journaux jugés «offensants pour l’islam» : le quotidien français le Figaro, l’allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung et l’hebdomadaire britannique The Guardian weekly.