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Politique française

Juppé, le retour

De retour de son exil canadien, Alain Juppé reconquiert la mairie de Bordeaux. 

		(Photo : AFP)
De retour de son exil canadien, Alain Juppé reconquiert la mairie de Bordeaux.
(Photo : AFP)
La liste conduite par Alain Juppé a remporté l’élection municipale anticipée, organisée dimanche 8 octobre à Bordeaux, au premier tour avec 56,24% des voix. Après sa condamnation à un an d’inéligibilité dans l’affaire des emplois fictifs de la ville de Paris et son exil au Canada, l’héritier préféré de Jacques Chirac a choisi d’opérer son retour dans le peuple des élus par «sa» ville.

Il fallait d’abord reconquérir Bordeaux. C’est fait. Alain Juppé est satisfait : «C’est une belle victoire, le taux de participation pour une élection partielle, dans les conditions où elle s’est déroulée est inespéré. C’est un score net et pour moi un formidable encouragement». Malgré un dimanche doux et ensoleillé dans le Bordelais qui incitait plus à la promenade qu’au vote, un peu plus de 44% des électeurs ont trouvé un petit moment pour aller déposer leur bulletin dans l’urne. Et au bout du compte, la liste d’Alain Juppé a obtenu un score encore meilleur que lors des deux précédents scrutins municipaux de 1995 et 2001, où il avait déjà remporté la victoire au premier tour. L’ancien Premier ministre a gagné son pari. Il va retrouver sa mairie mais aussi une légitimité par le suffrage universel.

Et il en avait besoin. Après sa condamnation en décembre 2004, Alain Juppé avait pris un sérieux coup au moral. Quatorze mois de prison avec sursis, un an d’inéligibilité : le jugement dans l’affaire des emplois fictifs de la ville de Paris avait été sévère pour un homme qui pouvait prétendre aux plus hautes fonctions de l’Etat. Du jour au lendemain, ou presque, il avait été obligé de démissionner de tous ses mandats et mis hors-jeu de l’ensemble des courses électorales. Pas facile à assumer pour celui que Jacques Chirac décrivait comme «le meilleur d’entre nous». Du coup, il avait choisi de s’éloigner de la vie politique française en traversant l’Atlantique et en s’installant avec femme et enfant à Montréal.

Partir, revenir

Alain Juppé a pris du recul en étant physiquement absent, mais pas totalement inexistant dans le débat grâce à son blog sur lequel il a commencé à établir un autre lien avec les Français. Comme un expatrié attentif à la vie de son pays, il a fait part aux internautes de ses réflexions de ses coups de cœur, coups de gueule… sur le Québec, la société française et aussi la vie politique. C’est encore via son blog qu’Alain Juppé a préparé petit à petit son retour en France, au fil de son année passée à enseigner à l’Ecole nationale d’administration publique de Montréal.

Quelques flacons de sirop d’érable plus tard, il a pris le chemin du retour au bercail à l’été 2006, affichant plus de sérénité et de décontraction. Il a repris ses habitudes et a fait savoir aux Bordelais qu’il était prêt à honorer la promesse qu’il leur avait faite de revenir dès que possible aux affaires municipales. Grâce à son fidèle second, Hugues Martin, qui avait accepté d’assurer l’intérim, la transition a eu lieu sans délai. La majorité municipale a démissionné, le 28 août dernier, pour permettre l’organisation d’un nouveau scrutin avec Alain Juppé en tête de liste UMP. La décision de provoquer une élection anticipée n’a pas été appréciée par l’opposition. Jacques Respaud, qui a mené la liste PS-PC, a évoqué «un coup de force», Pierre Hurmic des Verts «un tripatouillage». Et Jacques Colombier du Front national a parlé d’une élection «subie par tous au profit d’un seul».

L’impatience d’Alain Juppé à se soumettre au suffrage universel est certainement significative de son désir de compter à nouveau dans la vie politique nationale, à l’orée d’une année électorale majeure. Il a d’ailleurs d’ores et déjà annoncé qu’il serait candidat aux législatives de 2007 dans l’espoir de retrouver son siège de député. Concernant la présidentielle, il n’a encore fait part d’aucune intention précise. Il paraît néanmoins difficile, pour lui, d’envisager une candidature. Cela ne signifie pas, pour autant, qu’il ne jouera aucun rôle dans la campagne électorale. Alain Juppé est considéré dans son camp comme une référence et un soutien potentiel de poids. Reste à savoir pour qui et quand il décidera de s’engager.

par Valérie  Gas

Article publié le 09/10/2006 Dernière mise à jour le 09/10/2006 à 15:09 TU