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Israël

Le président Katsav dans la tourmente

Le président israélien, Moshé Katzav, accusé de viol et de harcèlement sexuel, est de plus en plus contesté. 

		(Photo : AFP)
Le président israélien, Moshé Katzav, accusé de viol et de harcèlement sexuel, est de plus en plus contesté.
(Photo : AFP)
La police israélienne a déclaré dimanche avoir réuni assez de preuves pour recommander à la justice l’inculpation du chef de l’Etat israélien. Moshé Katsav, 61 ans, est notamment impliqué dans des affaires de viol et de harcèlement sexuel sur plusieurs de ses collaboratrices, ce qui pourrait lui coûter jusqu’à 16 ans de prison. Ecartant, jusqu’ici, l’éventualité d’une démission, il se dit victime d’un «complot» et d’une «chasse aux sorcières». Mais face à l’ampleur du scandale, il a dû renoncer à se rendre, lundi, à l’ouverture solennelle de la session d’hiver du Parlement.

C’est la première fois, en Israël, dont la vie politique n’a jamais été avare d’affaires de mœurs, que le président est lui-même impliqué. Et même si la fonction présidentielle est essentiellement honorifique, le scandale est d’autant plus retentissant qu’il vient s’ajouter à une affaire analogue. Haïm Ramon, ex-ministre de la Justice, est dans l’attente de son procès pour harcèlement sexuel. Il est accusé d’avoir embrassé de force une jeune collaboratrice du ministère.

Pour Moshé Katsav, les charges sont plus lourdes. Au terme d’une enquête de trois mois durant laquelle il a été interrogé à cinq reprises, la police israélienne a estimé, dimanche, que le président devait être inculpé et traduit devant la justice. Selon le communiqué publié après une rencontre entre les enquêteurs et le procureur de l’Etat, Menahem Mazouz, « il existe suffisamment de preuves indiquant que, dans plusieurs cas (…)  le président a commis des actes de viol (…) et de harcèlement sexuel ».

A 61 ans, marié et père de cinq enfants, ce président issu du Likoud (droite) est notamment accusé du viol de son ex-secrétaire et d'une employée, alors qu'il était ministre du Tourisme. Il devrait également être poursuivi pour harcèlement sexuel à l'encontre de cinq autres femmes, actes indécents, écoutes illicites, obstruction à la justice et prévarication.

De source policière, on révèle qu’il aurait contraint des employées à entretenir des relations avec lui, en menaçant de les licencier en cas de refus. Il aurait aussi installé des micros pour surveiller les conversations téléphoniques de ses collaborateurs. Enfin, le quotidien Haaretz (gauche) indique qu’il aurait détourné des fonds publics pour offrir des cadeaux à ses proches. Le procureur Menahem Mazouz devrait se prononcer d’ici deux ou trois semaines sur les suites à donner à l’enquête.

« Des motifs personnels de vengeance »

Jusqu’ici, Moshé Katsav a toujours clamé son innocence. Le 21 septembre dernier, il s’exprimait sur les ondes de la radio militaire : « La presse mène contre moi une chasse aux sorcières et se livre à un lynchage public (…) Durant plus de vingt ans d'activité au service de l'Etat, j'ai travaillé avec des dizaines de jeunes femmes. La presse a réussi à mettre la main sur quelques-unes qui avaient envers moi des motifs personnels de vengeance parce que j'avais refusé de les employer à la présidence », a-t-il déclaré. Avant d’accuser, sans vouloir nommer quiconque : « Il y a un complot ourdi de longue date contre moi par une bande de malfrats ».

Aujourd’hui, il maintient sa ligne de défense. Selon un communiqué de la présidence publié lundi matin, « le président a été surpris et choqué par les recommandations de la police (...) Il rappelle et souligne qu'il est victime d'un complot, et que tôt ou tard les allégations contre lui s'avéreront mensongères ».

Pourtant, Moshé Katsav devait, dans la foulée, se résoudre à céder à des pressions venues de toutes parts. Certes, il refusait toujours de remettre une démission exigée par de nombreux députés et la plupart des journaux. Mais il a renoncé à se rendre, dans l’après-midi, à l’ouverture solennelle de la session d’hiver du Parlement israélien, à laquelle il devait prendre part conformément au protocole. « Au vu des circonstances, M. Katzav ne participera pas, lundi, à la séance inaugurale de la session d’hiver de la Knesset », a annoncé le bureau de la présidence.

Jusqu’à quand va-t-il tenir ?

Il faut dire qu’à la perspective de voir le président assister à la séance, même sans prononcer de discours comme il l’avait suggéré pour tenter d’apaiser la polémique, plusieurs parlementaires avaient violemment réagi. Ils avaient indiqué qu'ils resteraient délibérément assis à son arrivée au Parlement ou s'abstiendraient d'être présents en signe de protestation contre sa venue. « Je ne me lèverai pas à son arrivée, et je baisserai la tête en attendant que passe la vague de honte », avait de son côté menacé la députée Zehava Gal-On, du parti Meretz (gauche laïque).

Jusqu’à quand Moshé Katsav, en fonction depuis 2000, va-t-il pouvoir résister aux appels réclamant sa démission ? « Il est impensable qu'il continue d'assumer les fonctions de président, alors que des faits aussi graves lui sont reprochés », a déclaré à la radio la ministre travailliste de l'Education, Youli Tamir. Tandis que Nahum Barnea, l’éditorialiste du Yedioth Ahronoth (droite) estimait que « Moshé Katsav a servi comme président durant les six dernières années et il s'est servi de la présidence. Il n'a d'autre choix que de dire au revoir ».

par Philippe  Quillerier

Article publié le 16/10/2006 Dernière mise à jour le 16/10/2006 à 16:10 TU