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Serbie

Le Kosovo au centre du référendum sur la Constitution

Les 28 et 29 octobre, le texte de la nouvelle Constitution de la Serbie sera soumis à référendum. 

		(Carte : RFI)
Les 28 et 29 octobre, le texte de la nouvelle Constitution de la Serbie sera soumis à référendum.
(Carte : RFI)
La Serbie doit approuver ce week-end sa nouvelle Constitution. Pourtant, alors que le statut du Kosovo devrait être tranché dans les prochains mois, l’avenir et les frontières mêmes du pays demeurent toujours incertains.

De notre correspondant dans les Balkans

La Serbie, devenue indépendante «malgré elle» après l’indépendance du Monténégro acquise en mai dernier, va mal, et le référendum sur la nouvelle Constitution a peu de chance de dénouer la crise dans laquelle le pays se débat.

On parlait d’une nouvelle Constitution depuis la chute de Milosevic, en octobre 2000. Faute d’accord entre les partis, le dossier traînait, mais l’indépendance du Monténégro et les discussions en cours sur le statut futur du Kosovo, ont précipité le processus. Samedi 30 septembre, le Parlement serbe a adopté à l’unanimité le texte constitutionnel qui sera soumis les 28 et 29 octobre au vote des électeurs.

Le préambule de cette nouvelle Constitution stipule que «le Kosovo est partie intégrante de la République de Serbie». De la sorte, Belgrade ferme la porte à toute reconnaissance de l’indépendance du Kosovo. Les diplomates occidentaux veulent cependant croire que ce baroud d’honneur de Belgrade ne devrait pas avoir de conséquence majeure, mais si le territoire obtient effectivement l’indépendance, Belgrade ne reconnaîtra pas cette nouvelle situation, ce qui pourrait ouvrir la voie à une sécession des zones serbes du Kosovo.

La perspective de l’adhésion à l’Union européenne s’est éloignée

Dans l’immédiat, le référendum constitutionnel et les rebondissements de la crise politique serbe vont retarder le calendrier prévu par la communauté internationale, qui entend toujours que le «statut final» du Kosovo soit défini «d’ici la fin de l’année 2006». En effet, des élections législatives anticipées devraient suivre dès le mois de décembre et, avant de trancher le sort du Kosovo, il faudra organiser un round de négociations avec le nouveau gouvernement serbe, qui ne sera pas formé avant janvier ou février 2007.

Il y a six ans, le 5 octobre 2000, les Serbes mettaient à bas le régime de Slobodan Milosevic. Les démocrates serbes fondaient alors leurs espoirs sur les perspectives d’intégration européenne de leur pays. Mais ces espoirs paraissent aujourd’hui bien lointains, et la Serbie va de plus en plus mal. En effet, l’Union européenne a interrompu au printemps toute discussion avec Belgrade, parce que le pays ne coopère pas de manière satisfaisante avec le TPI de La Haye – en clair, parce que Ratko Mladic, l’ancien chef de guerre des Serbes de Bosnie, n’est toujours pas arrêté, et se cache selon toute probabilité en Serbie.

Une Constitution pour un Etat serbe très centralisé

La longue cavale de Mladic est facilitée par les structures issues de l’ancien régime de Milosevic, toujours aussi fortes, et qui ont réussi à entraver pratiquement toutes les réformes, surtout depuis l’assassinat du Premier ministre démocrate Zoran Djindjic, en mars 2003. Depuis, toutes les réformes sont en panne, et la fermeture des espoirs européens a coupé l’herbe sous le pied des courants démocratiques. Dans les sondages, l’extrême droite et les nostalgiques de l’ancien régime caracolent à près de 40% des intentions de vote.

Le texte de la Constitution, qui a été adopté à l’unanimité par les députés fin septembre, reprend largement les conceptions du Premier ministre conservateur Vojislav Kostunica sur un État national serbe très centralisé, sans guère de reconnaissance pour les minorités nationales. Les opposants soulignent que ce texte est totalement incompatible avec les exigences européennes en ces domaines.

Il n’est pas certain que les électeurs approuvent ce texte. Pour être valide, le référendum exige en effet la participation d’au moins 50% des électeurs inscrits, un seuil difficile à franchir. Plusieurs petits partis d’orientation démocratique appellent au boycott du référendum, car le texte proposé, largement influencé par l’extrême droite nationaliste, ne convient pas pour une «Serbie européenne». La plupart des représentants des minorités nationales et les dirigeants de la province autonome de Voïvodine appellent aussi au boycott.

Moins que de ces appels au boycott, le principal obstacle risque cependant de venir de la lassitude des électeurs, déçus d’attendre des changements et des améliorations qui ne viennent jamais, et qui risquent donc de bouder les urnes. «Si le référendum passe, nous n’aurons rien gagné, car le texte est très mauvais, et il faudra de toute façon écrire une autre Constitution le jour où la Serbie commencera à discuter sérieusement avec l’Europe, mais s’il ne passe pas, nous plongerons encore un peu plus dans une crise politique à l’issue imprévisible», résume un journaliste de Belgrade.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 27/10/2006 Dernière mise à jour le 27/10/2006 à 12:32 TU