République démocratique du Congo
Peur sur les urnes
(Photo : Monuc)
«La fin de campagne est très chaude», confiait vendredi Pathy Kobange président d'un petit parti «Alliance chrétienne» qui salue par ailleurs la décision de Jean-Pierre Bemba qui a renoncé à son dernier meeting au stade de Kinshasa. Les échauffourées qui ont fait de nombreuses victimes de part et d'autre ces derniers jours font craindre le pire. De nombreux observateurs nationaux et internationaux affirment «qu'un rien peut mettre le feu aux poudres». Les 80 000 policiers mobilisés pour prévenir les troubles ne pourront pas empêcher les provocations, vengeances et règlements de compte déjà constatés dans les deux camps. C'est pourquoi la Conférence épiscopale du Congo a renouvelé à l'endroit des militants des deux parties qui s'affrontent au second tour, un chapelet de «recommandations» censé garantir un retour effectif de la paix au Congo.
Des cadeaux, des menaces
En rappelant les candidats à leurs devoirs la Conférence épiscopale du Congo insiste sur le respect «du verdict des urnes». C'est aussi la démarche initiée par la Monuc qui appelle les leaders politiques «à discipliner leurs sympathisants». Les menaces sur la sécurité des deux candidats à conduit ces derniers à se faire représenter lors des réunions publiques. Ils se sont soigneusement évités n'échangeant que par médias interposés. Dernier événement de campagne, alors qu’aucun débat contradictoire entre le président sortant Joseph Kabila et son rival Jean-Pierre Bemba n’a eu lieu, le président Kabila s’est exprimé, vendredi soir, 45 minutes à la télévision nationale en violation des règles d’équilibre édictées par la Haute Autorité des médias. Le camp de Jean-Pierre Bemba a aussitôt protesté et porté réclamation auprès des observateurs des Nations unies. La fin de campagne s'est essentiellement déroulée autour de la distribution de cadeaux qui vont d'une simple casquette au groupe électrogène. La générosité des candidats fera la décision pensent certains lieutenants des états-majors de campagne. Ils s'accusent également d'installer des «bureaux de vote fictifs» dans le but de dérouter les électeurs.
Les alliances politiques sont très nettes, généralement constituées autour des mêmes groupes qui sont allés aux législatives du 30 juillet dernier. Sur les 500 sièges de l'Assemblée nationale l'Alliance pour la majorité présidentielle de Kabila avait remporté 290 sièges contre une centaine pour le Regroupement des nationalistes congolais (Renaco) qui soutient Jean-Pierre Bemba. Mais entre les deux tours certains partis politiques ont rejoint la coalition en faveur de Bemba. Ainsi le clivage Est-Ouest noté à l'issue du premier tour de la présidentielle ne semble plus être une règle infaillible. Néanmoins, c'est dans le Sud-Kivu, dans sa région natale que Joseph Kabila reste le maître absolu tout comme Jean-Pierre Bemba dans la région de l'Equateur. Par ailleurs nombreux sont les Congolais de l'étranger qui ne pourront pas voter ce dimanche. L'Etat congolais n'a pas pu organiser la tenue de cette consultation dans ses représentations diplomatiques faute de moyens financiers et logistiques. Les pays voisins de la République démocratique du Congo ont tous mis des troupes en alerte aux frontières.
par Didier Samson
Article publié le 28/10/2006 Dernière mise à jour le 28/10/2006 à 11:32 TU