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Colombie

Les paramilitaires rejettent le désarmement

Après des mois de détention dans un centre de loisirs, 59 dirigeants paramilitaires colombiens ont été transférés contre leur gré, dans une prison de haute sécurité. 

		(Photo : AFP)
Après des mois de détention dans un centre de loisirs, 59 dirigeants paramilitaires colombiens ont été transférés contre leur gré, dans une prison de haute sécurité.
(Photo : AFP)
Les chefs des organisations paramilitaires d’extrême-droite ont dénoncé le processus de paix engagé depuis 2003 avec le gouvernement du président Uribe. Cette décision a été prise suite à l’installation dans une prison de haute sécurité, d’une soixantaine de dirigeants des forces du mouvement d’Autodéfense unie de Colombie (AUC), un mouvement créé il y a une vingtaine d’années pour contrer les activités des groupes guérilleros gauchistes, notamment le FARC. Plusieurs dirigeants paramilitaires sont soupçonnés d’être liés à la grande criminalité et d’avoir participé à des massacres.

Les chefs des milices d’extrême-droite ont déclaré mercredi qu’ils allaient abandonner l’accord conclu avec les autorités, menaçant de mettre un terme au processus de paix initié il y a trois ans. Ce processus avait permis le désarmement de plusieurs milliers d’éléments paramilitaires liés à l’organisation d’extrême-droite Autodefensas Unidas de Colombia (AUC). La décision a été rendue publique lors d’une réunion tenue à prison de haute sécurité de Itagüi, près de Medellin. Les 59 dirigeants paramilitaires venaient d’y être transférés contre leur gré, après avoir été détenus pendant plusieurs mois dans le centre de loisirs de La Ceja. Les autorités ont justifié ce transfert, en affirmant que les détenus se préparaient à réaliser un plan d’évasion massif.

Ernesto Baez, l’un des dirigeants détenus, a déclaré à la chaîne de télévision CMI que la rupture des négociations de paix était le résultat de la perte de confiance dans un processus «rempli de mensonges qui n’honorait pas ses promesses». Le gouvernement du président Alvaro Uribe a accusé ces chefs paramilitaires détenus d’avoir donné des instructions à leurs hommes de main qui se trouvent en liberté, pour qu’ils commettent des crimes en tuant des ennemis et même des lieutenants de l’organisation. Il y a actuellement près de 30 000 combattants de groupes d’extrême-droite  désarmés et les autorités craignent qu’ils ne reprennent des actions violentes à grande échelle.

Miliciens accusés de massacres

Les forces paramilitaires, comme celles de l’AUC, ont été crées il y 20 ans environ, avec l’appui des grands propriétaires terriens et des cartels de la cocaïne. Il s’agissait de combattre les mouvements guérilleros de gauche, comme c’est les Forces révolutionnaires armées colombiennes, plus connues sous le sigle FARC, et l’Armée de libération nationale (ELN). L’AUC est aussi accusée d’avoir massacré des paysans colombiens, ainsi que des militants des partis de gauche et d’organisations humanitaires, voire même des fonctionnaires du gouvernement colombien.

Le président Uribe voulait neutraliser, d’abord, les paramilitaires de droite pour établir, ensuite, un processus de paix avec les rebelles du FARC, sans abandonner totalement l’hypothèse de les vaincre militairement. Ainsi, en juillet 2003, les dirigeants de l’extrême-droite  paramilitaire ont commencé à rendre leurs armes, suite à un premier accord avec le gouvernement Uribe. Ces miliciens ont alors suspendu les opérations militaires et décidé de fournir des informations importantes au sujet de leurs activités précédentes et de leurs sources de financement.

L’accord prévoyait que les repentis ne seraient condamnés qu’à des peines légères, en échange de leurs confessions. La loi « Justice et paix » fixe à huit ans la peine de prison maximale pour un paramilitaire démobilisé, même s’il est accusé de massacres et de trafic de drogue. Mais le président Uribe a menacé d’extrader vers les  Etats-Unis plusieurs de ces paramilitaires, qui avaient réussi a continuer à diriger leurs activités criminelles à partir du centre de détention de La Ceja, où ils disposaient notamment de chambres individuelles, de téléphones portables et d’accès à internet  et pouvaient aussi recevoir des visiteurs.

Les Etats-Unis demandent l’extradition des paramilitaires

Selon la presse américaine, plus de 20 de ces dirigeants des milices d’extrême-droite  sont recherchés par la justice des Etats-Unis qui les soupçonne de trafic de drogue et de crime organisé. L’AUC est considérée comme étant un groupe terroriste par le gouvernement américain, dont le président Alvaro Uribe est un important allié.

La rupture du processus de désarmement des paramilitaires est un grave coup porté au plan du président colombien pour mettre un terme à la guerre civile qui dure depuis plus de 40 ans dans ce pays latino-américain. Cette crise intervient aussi à la suite de révélations concernant des liaisons entre des éléments de la classe politique de Bogota et des chefs paramilitaires.

Trois parlementaires de la majorité présidentielle ont été arrêtés et six autres font objet d’une enquête au sujet de leurs liens avec les miliciens d’extrême-droite . L’Organisation des Etats américains (OEA), qui a participé avec l’Eglise à la médiation entre le gouvernement et les paramilitaires, souhaite que cette crise puisse être réglée à court terme, soulignant qu’une suspension de la loi «Justice et paix» pourrait «générer un scénario avec des conséquences imprévisibles».

par Antonio  Garcia

Article publié le 07/12/2006 Dernière mise à jour le 07/12/2006 à 15:13 TU