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Equateur

Le plus difficile reste à faire

Rafael Correa a prêté serment lundi 15 janvier, à Quito, et est devenu officiellement le président d'Equateur. 

		(Photo : AFP)
Rafael Correa a prêté serment lundi 15 janvier, à Quito, et est devenu officiellement le président d'Equateur.
(Photo : AFP)

Le nouveau président Rafael Correa a pris officiellement ses fonctions ce lundi pour un mandat de quatre ans, lors d’une cérémonie d’investiture à laquelle ont assisté onze chefs d’Etat, dont les principaux représentants de la gauche anti-américaine en Amérique latine, parmi lesquels son ami le président vénézuélien Hugo Chavez, mais aussi le président iranien Ahmadinejad, en tournée dans la région, dans un contexte de crise avec les Etats-Unis. L’arrivée au pouvoir de Rafael Correa, premier président de gauche en Equateur depuis le retour de la démocratie en 1979, renforce l’axe de gauche en Amérique latine, où les Etats-Unis voient leur influence remise en cause. Le nouveau président veut renégocier la dette extérieure et réformer la Constitution pour mener à bien ses réformes.


«Comme l’Amérique latine a changé! Et continuera de changer. Ce que nous vivons n’est pas une période de changements, mais plutôt un changement d’époque», a déclaré Rafael Correa ce dimanche, à Zumbahua, dans les montagnes de la province de Cotopaxi, au sud du pays, où il a été intronisé par les communautés indigènes, lors d’une cérémonie sans précédent et haute en couleur.

Vêtu d’un poncho traditionnel, entouré de ses «amis», les présidents vénézuélien Hugo Chavez et bolivien Evo Morales, et devant quelque 20 000 Indiens venus des quatre coins du pays, Rafael Correa a reçu «le bâton du chef», la plus haute distinction symbolique accordée par les Indiens. Geste d’autant plus significatif, que c’est la première fois que les Indiens équatoriens le remettent à un président élu. Avec l’attribution de cet insigne, ancien et vénéré, les communautés indigènes ont voulu ainsi exprimer leur affection et leur reconnaissance envers le jeune Rafael Correa qui, après ses études universitaires, s’était engagé comme volontaire auprès des Indiens d’Zambahua et a ainsi appris la langue quechua.

«C’est comme si un miracle avait renversé les gouvernements serviles et le modèle néo-libéral et qu’il ait commencé à apparaître au 21ème siècle une Amérique latine, libre, souveraine et socialiste» a déclaré Rafael Correa, entouré d'Hugo Chavez et d'Evo Morales. Il a ainsi donné le ton en rejoignant le camp anti-américain. Qualifiant Rafael Correa de «nouveau dirigeant d’une ère nouvelle en Amérique latine», Hugo Chavez a annoncé la signature d’accords d’intégration avec l’Equateur semblables à ceux qu’il a déjà signés avec la Bolivie. Tandis que le Bolivien Evo Morales a appelé à la «fin du modèle néolibéral et aux nationalisations».

Professeur d’économie, formé en Belgique et aux Etats-Unis, le nouveau président Equatorien n’a pas l’habitude de mâcher ses mots, prenant volontiers pour cible le président américain George Bush et sa politique qu’il a souvent qualifiée «d’hégémonique». Il a ainsi annoncé qu’il ne prolongerait pas en 2009 l’accord de 1999 permettant à Washington de disposer d’une base militaire sur le territoire équatorien, installée à Manta, ville portuaire de l’océan Pacifique pour mener les opérations de lutte contre la drogue, mais aussi contre les FARC, la guérilla marxiste colombienne. Il a aussi déclaré s’opposer à la signature d’un traité de libre-échange avec les Etats-Unis.

Investiture à Quito

Dans son premier discours à la Nation, lors de son investiture ce lundi à Quito, Rafael Correa a annoncé qu’il renégocierait pendant son mandat la dette extérieure de son pays, évaluée, en novembre, à 10 milliards et 328 millions de dollars, soit 25,3% du Produit intérieur brut (PIB), selon les chiffres de la Banque centrale.

Sur le plan intérieur, le nouveau chef de l’Etat a annoncé «la révolution Constitutionnelle avec un changement profond de la classe dirigeante» et souligné que «les institutions politiques en Equateur se sont effondrées». Rafael Correa est décidé à réformer la Constitution afin de mener à bien sa politique de réformes et mettre fin à une instabilité politique chronique. Au cours de la dernière décennie, aucun des trois présidents élus n'a réussi à terminer son mandat. Tous ont été chassés par des révoltes populaires.

Sa tâche ne s’annonce cependant pas facile. En effet, il veut organiser un référendum pour obtenir le soutien populaire afin de convoquer une Assemblée constituante, mais se trouve confronté à l’opposition de droite qui dirige le parlement et laisse planer la menace d’une crise politique. «Correa veut se convertir en un empereur du style Napoléon, et nous ne pouvons pas permettre cela» a déclaré le conservateur Jorge Cevallos qui vient d’être élu président du parlement.

Rafael Correa a compté avec la présence de onze chefs d’Etats, dont les principaux dirigeants socialistes d’Amérique du sud, récemment élus. En effet, à côté des représentants de la gauche la plus «radicale», le vénézuélien Hugo Chavez et le bolivien Evo Morales, se trouvaient aussi le nicaraguayen Daniel Ortega, la chilienne Michelle Bachelet, et le brésilien Lula da Silva. Egalement invité pour la cérémonie d’investiture de Rafael Correa, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, bête noire de l’administration Bush.

Alors que le nouveau secrétaire américain à la Défense Robert Gates vient de lancer une mise en garde à peine voilée à l'Iran, en présentant lundi le renforcement de la présence militaire américaine dans le Golfe comme un signal adressé à la République islamique, à Quito, le président Ahmadinejad a accusé les Etats-Unis d’être «en guerre contre le monde entier, y compris contre les latino-américains» et promis l’aide de l’Iran à «chaque peuple qui est décidé à se défendre».

Le président iranien avait entamé samedi une tournée en Amérique du sud par une visite à Hugo Chavez au Venezuela, le second entretien en cinq mois. A cette occasion, les deux chefs d’Etat dont les pays sont deux membres éminents de l’Organisation de pays producteurs du pétrole (Opep) ont  fait une annonce fracassante sur leur intention de «décupler les efforts» pour obtenir de nouvelles réductions de la production de l’Opep, face à la dégringolade du prix du baril, en baisse de 14% depuis le début de l’année. Ils ont aussi signé onze accords de coopération et la création d’une compagnie pétrolière mixte ayant pour but d’«explorer, produire et commercialiser le pétrole».



par Elisa  Drago

Article publié le 15/01/2007 Dernière mise à jour le 15/01/2007 à 20:12 TU