Nouvelles technologies
Galileo sort de la crise à petits pas
Galileo, le système européen de radionavigation par satellite, concurrent du GPS américain, peine à voir le jour, alors que sa mise en service est promise pour 2010 et qu’il faut compter trente-six mois pour construire un satellite. Pendant ce temps, les Américains améliorent leur programme et Beidu, le projet équivalent conduit par la Chine, pousse aux portes. Ce dernier est prévu pour ne couvrir que l’Asie, dans un premier temps, mais pourrait rapidement s’étendre au reste de la planète. Face à ces deux concurrents, l’Union européenne piaffe : le projet Galileo dépend de financement privés et européens et, faute d’entente entre les huit industriels concernés (*), désignés pour le développement et l’exploitation des trente satellites du système, tout est bloqué.
Jacques Barrot a mis en garde chacun des acteurs contre les retards qui pourraient désormais compromettre le bon déroulement du programme. Il a établi un calendrier serré : avant le 10 mai, «les industriels impliqués dans le projet devront présenter une structure d’exploitation commune, dotée d’un directeur général, [c’est-à-dire] une structure commune autonome pour parler d’une seule voix», a-t-il déclaré. D’ici juin, des avancées sensibles doivent être obtenues dans les négociations sur les financements, entre fonds privés et fonds communautaires. En septembre 2007, «les industriels doivent être en mesure de signer un accord sur les principaux points de ce qui constituera le contrat de concession final du projet [avec l’UE et son agence spatiale]». Enfin, le choix de la ville d’accueil du centre de gestion du réseau de navigation européen devra être arrêté.
Si cet échéancier n’était pas respecté, le consortium pourrait alors être remis en cause : Jacques Barrot a mentionné sa volonté d'«explorer des alternatives», qui pourraient consister à changer la structure de financement du projet. Actuellement, il est prévu que les concessionnaires financent les deux-tiers du projet, à hauteur de 2,5 milliards d’euros, tandis que le financement public est censé s’élever, quant à lui, à un milliard et demi d’euros. Si les industriels semblent avoir entendu le coup de semonce de Jacques Barrot en acceptant, sur le principe, de se constituer en société, c’est bien parce qu’une augmentation des fonds publics ferait perdre des revenus d’exploitation aux industriels. Pour autant, si ces derniers se montrent aussi prudents, c’est parce qu’ils financent à 90% le projet.
Jacques Barrot craint ces «surenchères nationalistes»
Indépendamment des difficultés techniques, inhérentes au déploiement des quelque trente satellites à vingt mille kilomètres d’altitude, le projet est retardé à cause des tergiversations des industriels des différents pays européens, tentés par ce que le Premier ministre français Dominique de Villepin désigne comme le «patriotisme économique». Les huit concessionnaires se déchirent sur le partage du travail et des responsabilités, et sur la localisation des équipes. La Grande Bretagne, citée par l’Expansion, accuse l’Espagne : «C’est Hispasat qui est à l’origine des blocages, personne d’autre. Ils essaient (…) de faire paniquer tout le monde pour obtenir tout ce qu’ils veulent». «En clair, ajoute le journal, l’Espagne cherche à hériter de responsabilités plus nombreuses et de centres de contrôles».
Jacques Barrot craint que ces «surenchères nationalistes» créent un «syndrome Airbus», que le projet capote et, rapporte le quotidien le Monde, que «le navire amiral de l’Europe spatiale soit menacé de naufrage» alors qu’il s’agit d’un projet-phare de l’Europe.
par Dominique Raizon
Article publié le 22/03/2007 Dernière mise à jour le 22/03/2007 à 17:41 TU
(*)Les huit concessionnaires : le groupe européen EADS (maison-mère d’Airbus), le britannique Inmarsat, les français Thales et Alcatel, les espagnols Hispasat et Aena, l'italien Finmeccanica et l'allemand Teleop (Deutsche Telekom).