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Présidentielle 2007

Sarkozy et l'Afrique : «tourner la page»

Lors de sa visite à Dakar, en septembre 2006, Nicolas Sarkozy avait reçu comme cadeau un boubou blanc et or. 

		(Photo : AFP)
Lors de sa visite à Dakar, en septembre 2006, Nicolas Sarkozy avait reçu comme cadeau un boubou blanc et or.
(Photo : AFP)

Dans son premier discours, juste après l’annonce de sa victoire, dimanche soir, Nicolas Sarkozy a lancé un «appel fraternel aux Africains» pour «décider ensemble d’une politique de l’immigration maîtrisée et d’une politique de développement ambitieuse». Les dirigeants africains ont félicité le nouveau président de la République française, alors que bon nombre d’entre eux s’interrogent sur les relations futures entre Paris et l’Afrique, après les positions défendues en matière d’immigration par Nicolas Sarkozy pendant la campagne électorale.


Dimanche soir, place de la Concorde à Paris, devant quelque 30 000 partisans venus célébrer sa victoire, Nicolas Sarkozy a placé l’Afrique en tête de ses priorités. Très récemment, il avait indiqué, qu’en cas d’élection, il comptait se rendre «très vite» en Afrique et avait placé la crise au Darfour au centre de ses préoccupations, la qualifiant de «véritable scandale».

«Je veux lancer un appel à tous les Africains, un appel fraternel pour dire à l'Afrique que nous voulons l'aider; aider l'Afrique à vaincre la maladie, à vaincre la famine, à vaincre la pauvreté, à vivre en paix. Je veux leur dire que nous allons décider ensemble d'une politique d'immigration maîtrisée et d'une politique de développement», a déclaré Nicolas Sarkozy, qui n’a pas utilisé l’expression d’ «immigration choisie» qui, pendant la campagne électorale, avait suscité beaucoup de polémique et une certaine inquiétude parmi les Africains.

Bon nombre d’Africains craignent un durcissement de la politique de l’immigration en France, notamment une reprise des expulsions des immigrés clandestins, comme lorsque Nicolas Sarkozy, alors au ministère de l’Intérieur, avait fait en expulsant par «charters» des immigrés vers le Mali et le Sénégal. Des expulsions qui avaient alors suscité un fort émoi en Afrique. D’où une certaine méfiance au sein des opinions publiques, en Afrique francophone, envers le nouveau président de la République française.

Réactions

Plusieurs chefs d’Etat africains ont immédiatement salué la victoire de Nicolas Sarkozy. Parmi les premiers à réagir, le président tunisien, Zine El Abidine Ben Ali. Tout en adressant ses «chaleureuses félicitations» au nouveau président français, le président Ben Ali salue les «qualités humaines» et la «large expérience politique» du futur président français et se déclare «convaincu» que l'élection de Nicolas Sarkozy va permettre de «franchir de nouvelles étapes dans le raffermissement du dialogue entre les deux rives de la Méditerranée en vue de bâtir ensemble un partenariat stratégique et solidaire». Le chef d’Etat tunisien souligne que ce partenariat doit permettre «de relever les défis du développement, de la stabilité et de la sécurité».

Le chef de l’Etat algérien, Abdelaziz Bouteflika a, lui aussi, chaleureusement félicité Nicolas Sarkozy en se disant convaincu qu'il saura donner un nouvel élan aux relations bilatérales. «Vous connaissant homme d'engagement et de conviction, je sais pouvoir compter sur vous pour impulser ensemble les relations algéro-françaises et leur conférer une ampleur et une profondeur correspondant aux ambitions que nos deux pays se sont assignés», a déclaré le président Bouteflika. Malgré la visite à Alger du président français, Jacques Chirac, en mars 2003 et la signature de la Déclaration d’Alger par les deux chefs d’Etat pour la relance des relations bilatérales, les deux capitales n’ont pas encore réussi à signer un traité d’amitié scellant le rapprochement. En effet, les relations entre Alger et Paris s’étaient tendues suite à l’article 4 de la loi française du 23 février 2005  sur le «rôle positif» de la colonisation.

Le roi du Maroc, Mohammed VI a félicité le vainqueur : «Votre accession à la présidence de la République est un évènement qui retient particulièrement l'attention du Maroc en raison des liens séculaires, variés et profonds qui unissent nos deux pays». Mohammed VI s’est dit, en outre, convaincu que Nicolas Sarkozy est animé par la volonté d’approfondir les liens «historiques» entre les deux pays, et a mis l’accent sur «l’urgence à trouver des solutions à certaines crises persistantes dont l'acuité met en péril la stabilité, la sécurité et le développement de certaines régions, notamment en Afrique et au proche Orient».

Le président sénégalais, Abdoulaye Wade, a adressé ses «très chaleureuses félicitations» à Nicolas Sarkozy saluant sa «brillante» élection, qui «illustre incontestablement la confiance» des électeurs dans son «projet de société». Le président Wade assure le nouveau chef d’Etat français de « sa ferme détermination à œuvrer (…) au renforcement de la coopération et à l’amitié franco-sénégalaise».

Le chef de l'Etat sud-africain, Thabo Mbeki, a adressé ce lundi ses «sincères félicitations» au président élu, soulignant la «grande importance» que l’Afrique du Sud attache à ses «excellentes relations avec la France». Le président sud-africain souligne : «Etant donné ses liens historiques avec le continent africain, la France sera toujours un interlocuteur respecté et un partenaire dans nos efforts pour construire la paix et la stabilité, renforcer la gouvernance démocratique et favoriser le développement social et économique en Afrique».

En Côté d’Ivoire, l’opposition a saluée la «victoire méritée» de Nicolas Sarkozy. «Nous comptons sur lui pour la modernisation des relations entre la France et les pays africains», indique notamment l'ancien Premier ministre et opposant ivoirien, Alassane Ouattara, alors que son parti, le Rassemblement des Républicains (RDR), souligne les valeurs partagées par les deux hommes qui entretiennent des «relations amicales anciennes». «Nous saluons la belle leçon de démocratie donnée par les Français», a déclaré à l’AFP, le secrétaire général du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), Alphonse Djédjé Mady. Egalement porte-parole de la coalition du G7, qui regroupe l’opposition et la rébellion, Alphonse Djédjé Mady ne pense pas que l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence française ne va «fondamentalement changer les relations» entre les deux pays, «même s'il y aura une nécessaire remise à jour pour les améliorer», a-t-il ajouté. Saluant «un homme courageux et intelligent, qui a notamment eu le courage de prendre à bras-le-corps le problème de l’immigration en France», le  président du Mouvement des forces d'avenir (MFA), Innocent Anaky Kobenan, a ajouté : «Ce sera une bonne chose, car nous étions un peu englués ces dernières années avec les relations difficiles entre Jacques Chirac et Laurent Gbagbo».

Pour sa part, la presse d’Abidjan considère que l’élection de Nicolas Sarkozy devrait entraîner un changement d’attitude de la France en Côte d’Ivoire et les quotidiens d’opposition estime qu’elle représente un revers pour le président socialiste Laurent Gbagbo qui avait «joué à fond la carte Ségolène». Tandis que Le Courrier d’Abidjan, journal pro-gouvernemental appelle le nouveau président français à «mettre un terme aux nuisances» au lieu de se donner une «posture missionnaire».

En Libye, les journaux officiels s'en sont pris ce lundi à Nicolas Sarkozy, affirmant qu'il n'aurait pas dû «se mêler de l'affaire des infirmières bulgares» condamnées à mort, accusées d’ avoir inoculé le virus du sida à des enfants libyens, écrit notamment le journal Al-Shams dans son éditorial, après l'annonce dimanche soir par Nicolas Sarkozy que la France serait aux côtés des infirmières bulgares «enfermées depuis huit ans».



par Elisa  Drago

Article publié le 07/05/2007 Dernière mise à jour le 07/05/2007 à 17:16 TU