par Nicolas Falez
Article publié le 18/12/2007 Dernière mise à jour le 19/12/2007 à 09:09 TU
Le président palestinien Mahmoud Abbas, en conférence de presse à Paris, le 18 décembre 2007.
(Photo : Reuters)
Après la prise de contrôle de la bande de Gaza par le Hamas en juin dernier, le président palestinien Mahmoud Abbas a nommé un gouvernement de technocrates dirigé par le Premier ministre Salam Fayyad. Ce dernier est aujourd’hui porteur d’un plan de réforme et de développement de l’Autorité palestinienne.
C’est ce projet que les donateurs ont accepté de financer à Paris. L’argent permettra notamment à l’Autorité de payer ses fonctionnaires. Pour ce faire, le canal de financement lui-même doit être révisé. En effet, l’aide internationale aux Palestiniens transite actuellement via le « Mécanisme Financier Temporaire (TIM)» mis en place en 2006 pour contourner le gouvernement dominé par le Hamas, suite à la victoire électorale des islamistes. Or, ce système doit disparaître au printemps prochain, pour être remplacé par un canal plus direct.
Récemment désigné à la tête du Fonds monétaire international, le Français Dominique Strauss-Kahn a annoncé lundi à Paris que le FMI était prêt à offrir son aide au gouvernement palestinien, sous la forme d’un programme de surveillance du budget et des réformes engagées par l’équipe de Salam Fayyad.
Directeur général du FMI
«Le PRDP, le plan de réforme et de développement palestinien, est le meilleur schéma que nous ayons jamais eu pour le développement de la Cisjordanie et de Gaza. Et il mérite donc le soutien de la communauté internationale.»
Des projets concrets pour les Territoires
L’autre grand chantier du gouvernement de Salam Fayyad, c’est une série de projets de développement économique soutenus par le Quartet pour le Proche-Orient (Onu, Union européenne, Etats-Unis, Russie) et présentés le mois dernier par l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, aujourd’hui envoyé spécial du Quartet. Il s’agit de créer des zones industrielles (à Jéricho et à Hébron, en Cisjordanie) ou d’améliorer le traitement des eaux usées dans la bande de Gaza. Ce dernier exemple illustre parfaitement l’urgence de certaines situations dans les territoires palestiniens : dans le nord de la bande de Gaza, les habitants rejettent 17 000 mètres cubes d’eaux usées par jour dans un bassin en plein air. Les Palestiniens de ce secteur l’appellent « le lagon » mais il s’agit en fait d’un égout en plein air conçu dans les années 70 pour 50 000 personnes. Aujourd’hui la population locale a quadruplé.
La majeure partie des fonds recoltés servira à financer le budget de l'autorité palestinienne. En outre, une station d'épuration d'eau sera construite au nord de Gaza.Le financement d'une station d'épuration
De l’argent pour Gaza… Mais Gaza pourra-t-il en bénéficier ? C’est l’une des principales interrogations de l’après-Annapolis et de l’après-conférence de Paris. En effet, depuis juin dernier, le Hamas contrôle la bande de Gaza et de son côté le président Mahmoud Abbas ne dirige que la Cisjordanie. Dès lors, on voit mal comment des projets soutenus par la communauté internationale pourraient se concrétiser à Gaza. D’autant que le Hamas a immédiatement condamné les avancées de la conférence de Paris, parlant de « dangereuse conspiration ». « A Paris, on a donné de l’argent aux Palestiniens pour qu’ils oublient Jérusalem et les réfugiés », a fustigé Fawzi Barhoum, porte-parole du Hamas, interrogé à Gaza par l’un de nos journalistes dans la région, Karim Lebhour.
Porte-parole du Hamas
«Tous ces pays qui se sont retrouvés à Paris n'étaient là que pour soutenir la seule autorité palestinienne. Ils ont nié la légitimité palestinienne et ignoré le choix des Palestiniens qui ont voté dans leur majorité pour le Hamas.»
« Aucune reprise économique ne sera possible sans amélioration substantielle de la situation sur le terrain », affirme sans détour le communiqué final de la conférence des donateurs pour l’Etat palestinien. Là encore, c’est à la bande de Gaza qu’il est fait allusion, puisque le territoire est placé sous un strict régime d’embargo israélien depuis qu’il est tombé aux mains du Hamas. Mais la Cisjordanie aussi est concernée puisque Israël y a installé plus de 500 barrages. De strictes mesures de sécurité destinées à prévenir les attentats mais qui limitent profondément la circulation des biens et des personnes dans la région. La Banque mondiale a présenté lors de la conférence de Paris un rapport prédisant l’échec du plan de développement si l’Etat hébreu n’allège pas ses restrictions à la liberté de circulation des Palestiniens.
La colonisation israélienne de la Cisjordanie pourrait également menacer toute velléité internationale d’accompagner un processus de paix renaissant. Les espoirs prudents nés à Annapolis ont déjà pâti de l’appel d’offre lancé par Israël pour la construction de 307 logements dans la colonie d’Har Homa, près de Jérusalem. Les Etats et organismes internationaux présents à la conférence des donateurs sont bien conscients de l’effet désastreux de telles annonces : sans progrès sur le terrain, « il sera très difficile de convaincre la population palestinienne qu’il y aura des progrès politiques », admet ainsi le N°1 de la diplomatie européenne, Javier Solana.
Beaucoup d’incertitudes, résumées par Mahmoud Abbas mardi matin. Dans un point de presse organisé à Paris, au lendemain de la conférence des donateurs, le président palestinien a admis : « Nous n’avons aucune garantie que l’année 2008 sera celle de la paix ».
La colonisation est l’un des plus importants obstacles sur la voie des négociations, et nous demandons à Israël l’arrêt de toute colonisation et le démantèlement de 127 colonies construites illégalement depuis 2001.