par RFI
Article publié le 13/05/2008 Dernière mise à jour le 13/05/2008 à 13:53 TU
RFI : Hassan al-Tourabi, pouvez-vous nous raconter dans quelle circonstances vous avez été arrêté ce lundi à Khartoum ?
Hassan al-Tourabi : J’étais au sud de Khartoum dans une province qui s’appelle Sénar depuis 4 jours. Au vu des événements, à Omdourman je savais que j’allais être arrêté, parce que le gouvernement militaire a l’habitude de se comporter comme ça. Dès qu’il y a une crise, le pouvoir politique multiplie les détentions et arrestations…. C’est vrai, j’ai été arrêté parmi un groupe de 21 personnes, membres et dirigeants du parti populaire. Les maisons étaient contrôlées par la sécurité. Dès 4 heures de l’après-midi j’étais confronté au grand comité d’investigation mais j’ai préféré ne pas répondre aux questions. « Est-ce qu’il ya des rapports entre vous et le mouvement qui est arrivé à Omdourman ? », j’ai dit que je ne sais pas… « Vous condamnez le mouvement ou pas ? », j’ai dit le parti va se réunir demain et c’est au parti de le dire. Et j’ai pensé en ce moment-là que j’allais retourner en prison, mais après ils m’ont ramené à la maison.
RFI : Mais sur le fond qu’est-ce que vous répondez aux critiques du gouvernement qui vous accuse de soutenir les rebelles du Darfour ?
Hassan al-Tourabi : C’est une idiotie. Les dirigeants du mouvement étaient dans le Congrès national et après les différends sur la démocratisation, sur la libéralisation, ils ont compris qu’il était difficile de parler politique avec un gouvernement militaire de ce type. Ils ont alors choisi de prendre les armes contre le régime. Mais il n’y a pas de rapport entre nous et le mouvement rebelle. Pas du tout.
RFI : Est-ce que vous avez encore des contacts avec Khalil Ibrahim ?
Hassan al-Tourabi : Rarement.
RFI : II n’y a pas de relations entre vous et les rebelles du Darfour ?
Hassan al-Tourabi : Il n’y a pas de relations organiques, de relations militaires. Mais ici, au Soudan, on dit que le parti populaire a toujours défendu le système fédéral, vers le Darfour en particulier, parce qu’il était moins libre que les autres régions du Soudan. De fait, on croit qu’il y a quelque chose de commun entre nous et les mouvements de résistance ou les mouvements politiques du Darfour.
RFI : Vous diriez que vous vous battez pour les mêmes choses que les mouvements du Darfour.
Hassan al-Tourabi : Oui, Oui et pas pour le Darfour uniquement ; pour le Sud, pour l’Est... C’est un pays qui est trop vaste pour être gouverné de façon centralisée. Tout le monde insiste pour qu’on maintienne une égalité entre les différentes régions du Soudan et qu'on permette au gouvernement de chaque région ou province d’être autonome et élu par le peuple.
RFI : Comment analysez-vous votre arrestation ?
Hassan al-Tourabi : Le choc pour le gouvernement. Il a toujours maintenu une attitude autoritaire « nous sommes un régime solide pour terroriser l’opposition ». (Rires) Mais maintenant les forces ont pénétré sur des centaines de kilomètres et sont aux portes de Khartoum. Elles sont arrivées à Omdourman … Alors ils (gouvernement) voulaient faire quelque chose pour restaurer le pouvoir et la dignité du gouvernement. Mais maintenant je crois que le choc de l’initiative militaire à Omdourman et ma détention ont entièrement changé l’atmosphère nationale. Tout le monde va se rendre compte maintenant qu’on doit poursuivre une voie de dialogue et de paix, et non pas celle de la la force, parce qu’à la force on répond par la force. Les rebelles étaient à Ndjamena maintenant ce sont des forces de résistance soudanaises qui sont à Khartoum même.
RFI : Que pensez-vous des tensions actuelles entre votre pays le Soudan et le Tchad ?
Hassan al-Tourabi : Pour avoir attaqué le Tchad comme ça, on dit maintenant que le Tchad aussi a répondu dans les mesures. L’exploitation de l’opposition tchadienne dirigée contre le Tchad par le gouvernement soudanais, et, de l’autre côté l’opposition soudanaise supportée et mobilisée contre le Soudan… Ce n’est pas une politique de bon voisinage.
RFI : Faudrait-il changer cela ?
Hassan al-Tourabi : Pour nous, l’esprit de coordination comme dans la communauté européenne, entre toutes les régions, un marché commun, les frontières libérées, les échanges sociaux, politiques économiques libres, c’est ce qu’il faut pour de bons rapports entre les populations des deux pays comme le Tchad et le Soudan. Ce sont les mêmes ethnies, il n’y a pas de frontière naturelle. Mais malheureusement les dictateurs n’arrivent jamais à une bonne entente entre les deux pays. La politique des militaires est toujours ainsi : commander, imposer sa loi et regarder l’autre comme un ennemi.A lire