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Soudan

Brève arrestation de l'opposant Hassan al-Tourabi

par  RFI

Article publié le 12/05/2008 Dernière mise à jour le 13/05/2008 à 04:45 TU

Hassan al-Tourabi, le 20 mars 1999 à Khartoum.(Photo: AFP)

Hassan al-Tourabi, le 20 mars 1999 à Khartoum.
(Photo: AFP)

Le chef de l’opposition islamiste Hassan al-Tourabi a été relâché lundi soir après avoir passé une douzaine d'heures entre les mains de la police. Trois autres membres de son parti, arrêtés en même temps que lui, restent incarcérés. Ils sont accusés de collusion avec le MJE, le Mouvement pour la Justice et l'Egalité, le groupe de rebelles du Darfour qui a attaqué samedi la ville d'Omdourman. Accusation que les deux mouvements ont démentie. Lundi soir, le Tchad a fermé sa frontière avec le Soudan et annoncé le gel des relations économiques. Khartoum avait annoncé dimanche la rupture de ses relations diplomatiques avec Ndjamena. Le couvre-feu a été levé ce dimanche à Khartoum, mais il est maintenu à Omdourman. Des habitants de la ville témoignent de soldats déployés dans les rues et de tirs sporadiques.

Dans une interview accordée lundi soir à RFI, Hassan al-Tourabi revient sur son arrestation.

Hassan al-Tourabi

Homme politique et islamiste soudanais

Je savais que j'allais être arrêté car le gouvernement militaire se comporte toujours comme ça. Je n'ai aucun rapport avec ce mouvement.

écouter 05 min 33 sec

13/05/2008 par Laurent Correau

 

Le leader islamiste Hassan al-Tourabi, 76 ans, était devenu un critique du régime soudanais, après avoir été son mentor. Ancienne éminence grise du pouvoir, il accompagna et même inspira selon certains, le coup d’Etat militaro-islamiste qui conduisit, en 1989, le général Omar el-Béchir à la tête du plus vaste pays d’Afrique. Fondateur des Frères musulmans, il fut aussi proche d’Oussama ben Laden qui se fixa au Soudan de 1992 à 1996.

Les arrestations d’Hassan al-Tourabi et d’au moins quatre cadres de son parti, le Congrès populaire, sont intervenues deux jours après l'attaque sans précédent du mouvement pour la justice et l'égalité (MJE), groupe rebelle du Darfour, l'un des plus puissants de la région.

Hassan al-Tourabi et le MJE

Des combats ont éclaté samedi à Omdourman, la ville jumelle de Khartoum, reliée par un pont sur le Nil. Dès le lendemain, les autorités soudanaises affirmaient avoir repoussé cette attaque. Même si elles ne se sont pas exprimées sur les raisons de l'arrestation, les autorités font a priori un lien très clair entre l'attaque d'Omdourman et cette arrestation. Depuis les premières actions des rebelles du MJE dans le Darfour, les autorités soudanaises affirment que la rébellion a été fabriquée par Hassan al-Tourabi. Le chef islamiste aurait, selon cette thèse, encouragé la création d'un mouvement armé après sa rupture en 1999 avec Omar el-Béchir. C'est une thèse que soutient le gouvernement, c'est aussi ce que disent d'anciens compagnons de route du MJE qui ont fait défection depuis. Ils dénoncent les convictions islamistes de Khalil Ibrahim, le chef du MJE, et rappellent que, avant d'être rebelle, Khalil était un cadre du parti d'Hassan al-Tourabi.

Dire que le MJE serait du coup un « mouvement islamiste », ou que la rébellion serait dirigée en sous-main par Hassan al-Tourabi, ce serait pourtant aller vite en besogne. Plusieurs cadres du MJE sont passés par le mouvement islamiste mais, à l'époque, c'était pour eux le meilleur moyen d'accéder à la scène politique nationale. Il y a eu dans leurs rangs des déceptions sur ce que le mouvement islamiste pouvait apporter à leur région. Si les connections tourabistes du MJE existent, notamment en la personne d'un cadre islamiste originaire du Darfour qui vit en Allemagne, Ali el-Hadj, l'emprise des tourabistes sur la rébellion est loin d'être démontrée.

Khartoum dit avoir repoussé l'attaque du MJE. Le porte-parole du MJE, Adam Hussein Ahmad, joint à Londres, affirme que ses combattants se préparent pour de nouvelles attaques.

Ahmad Hussein Adam

Ils ne nous ont pas chassés d'Omdourman... Nos combattants ont détruit certains des meilleurs éléments de l'armée soudanaise.

écouter 00 min 30 sec

12/05/2008 par Laurent Correau


Accusations contre le Tchad

Les hommes du MJE ont fait plusieurs centaines de kilomètres pour se retrouver aux portes de Khartoum. Et pourtant, leur attaque a été une véritable surprise, une attaque éclair. Le président el-Béchir du Soudan a tout de suite mis en cause la responsabilité du Tchad dans cette attaque, qui serait comme une réponse à la bataille de Ndjamena des 2 et 3 février derniers. On aurait assisté, dans ce cas à un nouvel épisode du conflit auquel le Tchad et le Soudan se livrent par groupes rebelles interposés.

C'est vrai que depuis plusieurs mois, le Tchad a fourni un nombre important de véhicules aux hommes du MJE, notamment après la bataille de Ndjamena. Il est vrai, également, que certains responsables tchadiens rêvaient depuis longtemps de porter la guerre à Khartoum. Mais Khalil Ibrahim a toujours eu une relation tendue avec le régime d'Idriss Déby, il pose ses propres choix. Et donc si l’on peut dire qu'il y a une convergence d'intérêts très claire au sujet de cette attaque entre Khalil Ibrahim et les autorités tchadiennes, le rôle précis du Tchad dans cette attaque reste à établir.

A écouter

Omer Ismaïl : Il y avait deux colonnes

Analyste pour l'association Enough

« Il y avait une deuxième colonne au Kordofan... qui a été prise dans des accrochages avec les troupes gouvernementales... 48 heures avant l'attaque sur Khartoum, on savait qu'il y avait un mouvement du MJE... Le gouvernement pensait qu'ils allaient venir de l'ouest, du Kordofan, mais en fait le groupe qui a attaqué, c'est la colonne qui venait du Nord. »

13/05/2008 par Olivier Rogez

Mahamat Hissene, ministre de la Communication du Tchad

« La mesure la plus importante, c'est la fermeture de la frontière, qui s'appliquera aussi aux éleveurs transhumants. Le gouvernement interdit aussi les atterrissages de la compagnie nationale soudanaise, les transferts financiers, l'exportation du bétail sur pied et l'importation des marchandises fabriquées au Soudan ou transitant par le Soudan ».

13/05/2008

Rabi Abdal Ati Obeid

Conseiller du ministre de l'Information soudanais.

« Je ne pense pas que l'atmosphère soit propice à quelque négociation que ce soit en ce moment, parce que ce que vient de faire le régime tchadien témoigne d'une très vive hostilité à l'égard du gouvernement soudanais et du peuple soudanais. Ces rebelles ont commencé leur voyage pour attaquer Omdurman à partir de la frontière tchadienne...»

13/05/2008 par Sarah Tisseyre