Article publié le 02/06/2008 Dernière mise à jour le 02/06/2008 à 05:52 TU
Le Premier ministre macédonien, Nikola Gruevski, leader du parti victorieux aux élections législatives, entouré de ses partisans à Skopje le 1er juin.
(Photo : AFP)
Par l'un de nos envoyés spéciaux à Skopje, Jean-Arnault Derens
Dimanche soir, une marée de drapeaux aux couleurs du VMRO-DPMNE a envahi le centre de Skopje : les partisans du Premier ministre Gruevski fêtaient leur triomphe, attendu et confirmé.
C’était fête également à Tetovo, la principale ville albanaise de l’ouest du pays, où le Parti démocratique des Albanais (PDSH), allié traditionnel du VMRO-DPMNE, n’a pas attendu pour proclamer sa victoire. Pourtant, les premiers résultats donnent les deux partis albanais de Macédoine au coude à coude : le PDSH et son rival, l’Union démocratique pour l’intégration (BDI), obtiennent chacun un peu plus de 10% des suffrages. Aucune différence idéologique ou programmatique ne sépare ces deux formations qui prétendent représenter les Albanais de Macédoine - environ 500 000 personnes, soit un quart de la population du pays. Elles poursuivent néanmoins une lutte acharnée pour obtenir la première place au sein de leur communauté, afin de pouvoir participer au partage du pouvoir avec les partis macédoniens.
Climat de violence dans les zones albanaises
La journée de vote a été marquée par de très nombreuses violences et irrégularités dans les zones albanaises du pays, où un véritable climat de terreur s’est progressivement instauré. Les plus graves incidents se sont produits dans la matinée à Aracinovo, un gros bourg albanais proche de Skopje. Une fusillade a éclaté entre des sympathisants du BDI et la police. Un militant albanais a été tué, et cinq autres au moins, grièvement blessés. Une fusillade a aussi éclaté dans une école de Cair, un quartier albanais de Skopje. Au total, les premiers bilans évoquent un mort, plus d’une dizaine de blessés et autant d’arrestations.
Tous les incidents constatés se sont produits dans zones albanaises fidèles au BDI. Par contre, les opérations de vote se déroulaient sans violence dans les bourgs et les villages albanais acquis au PDSH, où la participation atteint même des niveaux « étonnants », ce qui laisse planer le soupçon de bourrages d’urnes massifs. À Kondovo, un village proche de Skopje, bastion du PDSH, le président du bureau de vote annonçait avec un grand sourire un taux de participation de plus de 60% dès 11 heures du matin…
Selon la commission électorale, la trentaine de bureaux de vote fermés dans la matinée, après des incidents ou des fraudes manifestes, auraient progressivement rouvert leurs portes. À Tetovo, cependant, plus personne ne votait dans l’après-midi, et les rues de la ville, écrasée par la chaleur, restaient étonnamment désertes. À Golema Recica, un village de la banlieue de Tetovo, la principale ville albanaise du pays, en milieu d’après-midi, une quinzaine d’hommes contemplaient les événements, assis dans le bureau de l’Union démocratique pour l’intégration (BDI), le principal parti albanais de Macédoine. Vers 16 heures, des hommes armés auraient pénétré dans l’école qui sert de bureau de vote, située à quelques dizaines de mètres. « Ce sont des voyous, des drogués, que nous connaissons bien, mais ils sont entrés avec la police, pour terroriser les électeurs ». Selon les militants du BDI, ces « voyous » seraient à la solde du Parti démocratique des Albanais (PDSH), le rival du BDI, qui participe à la coalition gouvernementale macédonienne du Premier ministre Nikola Gruevski. Dans cette région de Tetovo, la plupart des policiers sont encartés au PDSH.
L'Union européenne inquiète
« Jusqu’à maintenant, nous avions réussi à maintenir le calme, pour que les élections se déroulent normalement, mais des provocateurs voulaient faire dérailler le processus électoral », expliquait un des militants du BDI. « En 2001, nous avons fait la guerre, la guerre civile, mais qui a donc intérêt à ce que le pays plonge à nouveau dans la violence ? » L’Union européenne a fermement condamné les violences, demandant que le scrutin soit à nouveau organisé dans les zones où se sont produits les incidents.
A écouter
« Des centaines de drapeaux rouge et noir pour fêter la victoire du Premier ministre... C'est la continuité de la politique entamée il y a deux ans...»
02/06/2008 par François Cardona
« La victoire de Nikola Gruevski est sans appel. Son parti emporte deux fois plus de voix que le centre gauche. La participation est en hausse...»
02/06/2008 par François Cardona
« L'inquiétude domine chez les Albanais de Macédoine après la victoire sans appel de Nikola Gruevski... »
02/06/2008 par A Skopje, Jean-Arnault Derens
« C'est aussi l'avenir européen de la Macédoine qui est en jeu, le scrutin a valeur de test démocratique. Pour les 27, la tenue d'élections équitables est un point essentiel pour l'ouverture de négociations...»
02/06/2008 par Grégoire Lory
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