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Proche-Orient

Jérusalem-Est, enjeu majeur du conflit israélo-palestinien

par Nicolas Falez

Article publié le 03/06/2008 Dernière mise à jour le 03/06/2008 à 16:51 TU

Lundi 3 juin, Israël célébrait la « Journée de Jérusalem », en souvenir du 41e anniversaire de ce que l’Etat hébreu appelle la « réunification » de la ville, après sa conquête pendant la Guerre des Six Jours. Au même moment, les dirigeants israéliens annonçaient leur projet de construire plus de 800 nouveaux logements dans deux quartiers juifs de Jérusalem : Pisgat Zeev et Har Homa, tous deux situés dans la partie orientale de la ville. La politique de colonisation israélienne de Jérusalem-Est est régulièrement dénoncée par les Palestiniens et par la communauté internationale.

L'implantation juive de Har Homa à Jérusalem-Est.(Photo : AFP)

L'implantation juive de Har Homa à Jérusalem-Est.
(Photo : AFP)


Jérusalem et ses enjeux en 3 questions-réponses.

Quel est le statut de Jérusalem ?

Dans le Plan de partage de la Palestine adopté par l’ONU en 1947, Jérusalem devait être placé sous contrôle international. Ce ne fut jamais le cas puisque la première guerre israélo-arabe (1948-1949) allait aboutir à une division de la ville : le nouvel Etat juif occupant la partie occidentale et la Jordanie occupant l’est de la cité, ainsi que la vieille ville. Pendant près de 20 ans, un no man’s land et des barbelés allaient donc couper Jérusalem en deux. En juin 1967, la Guerre des Six-Jours bouleverse ce décor : Israël conquiert la partie orientale de Jérusalem (ainsi que la Cisjordanie, la Bande de Gaza, le Sinaï et le Golan).

Dès 1967, Israël annexe Jérusalem (alors que l’Etat hébreu n’a jamais annexé la Cisjordanie ni la Bande de Gaza). Depuis 1980, Israël considère la ville comme « la capitale éternelle et réunifiée du peuple juif ». Les Palestiniens qui y vivent n’ont pas la nationalité israélienne (contrairement aux Arabes israéliens) mais ils disposent du statut de résidents.

La communauté internationale n’a jamais reconnu l’annexion de Jérusalem-Est. Quant aux Palestiniens, ils revendiquent la souveraineté sur cette partie de la ville, souhaitant en faire la capitale de leur futur Etat.

Fait important : Israël a incorporé dans les limites municipales de Jérusalem des terrains que les Palestiniens et la communauté internationale considèrent comme faisant partie de la Cisjordanie. Lorsque l’Etat hébreu annonce des constructions dans ces zones, il affirme poursuivre sa politique de renforcement de Jérusalem (annexée) alors que les Palestiniens et la communauté internationale dénoncent une poursuite de la colonisation des territoires occupés, en contradiction avec les engagements israéliens de la Feuille de Route (2003) et d’Annapolis (2007).

Qui vit à Jérusalem ?

Selon les chiffres publiés en ce mois de juin 2008, la ville compte 746 300 habitants. 66% sont des Juifs, 34% des Arabes.

200 000 juifs israéliens vivent dans la partie orientale de la ville, dans une douzaine de quartiers de colonisation construits après 1967 (dont Pisgat Zeev et Har Homa où doivent être construits les logements annoncés dimanche dernier).

Il est intéressant de noter que malgré les restrictions imposées par Israël (et malgré l’érection du mur de sécurité qui coupe certains quartiers arabes), la population arabe de la ville a fortement augmenté (+257% d’habitants arabes depuis quatre décennies). Par ailleurs, le solde migratoire de la population juive entre Jérusalem et le reste d’Israël est négatif : les juifs israéliens sont plus nombreux à quitter la ville (280 000 depuis 1990) qu’à s’y installer (175 000 dans la même période).

Quelle est l’importance de Jérusalem dans le processus de paix ?

Le conflit israélo-palestinien achoppe sur une poignée de questions ultra-sensibles : le droit au retour des réfugiés palestiniens, la question des frontières des deux Etats, la question de la colonisation et le statut de Jérusalem.

On l’a dit : Israéliens et Palestiniens sont en conflit sur la souveraineté de Jérusalem-Est (les premiers rejetant l’idée d’une nouvelle division de la ville, les seconds voulant y établir leur capitale). La question des lieux saints est également brûlante : l’Esplanade des Mosquées (ou Noble Sanctuaire) est le troisième lieu saint de l’Islam. Elle surplombe le Mur des Lamentation, premier lieu saint du judaïsme car unique vestige du Temple. La contiguïté des deux monuments fait de ce secteur de la Vieille Ville un des épicentres du conflit : la question de la souveraineté sur cette zone est bien souvent considérée comme l’une des causes de l’échec des négociations israéliennes de Camp David (en 2000). Et quelques semaines plus tard, la visite d’Ariel Sharon sur l’Esplanade des Mosquées provoqua des émeutes violemment réprimées (c’était le début de la deuxième Intifada).

Enfin, la question des constructions israéliennes dans la partie orientale de Jérusalem inquiète aussi les Palestiniens car ces chantiers grignotent l’étroit corridor de terre qui relie le nord et le sud de la Cisjordanie. A terme, l’extension des quartiers juifs dans l’est de Jérusalem compromet la continuité territoriale entre le nord et le sud d’un futur Etat palestinien.