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France

Livre blanc : régime spartiate pour l'armée française

par Patrice Biancone

Article publié le 17/06/2008 Dernière mise à jour le 17/06/2008 à 22:20 TU

Les effectifs de l'armée seront réduits d'ici 2014.(Photo : AFP)

Les effectifs de l'armée seront réduits d'ici 2014.
(Photo : AFP)

Nicolas Sarkozy a présenté, ce mardi, le Livre blanc de la défense, les grandes orientations de la défense française pour les douze ans à venir. Le président français annonce que la première menace pour la France, c'est la menace terroriste avec des attaques radiologiques, chimiques, biologiques. Ce qui explique l'effort mis en particulier sur les moyens de renseignement. Nicolas Sarkozy a aussi annoncé une réduction très sévère des effectifs. Mais pour le président français on ne peut pas parler de déclin. Enfin, il promet un nouveau rapprochement avec l'Otan. La France participera désormais aux structures militaires de l'Alliance. Mais aucun contingent ne sera sous commandement de l'Otan en temps de paix et la dissuasion nucléaire restera nationale.

Le principe de réflexion est simple. Nicolas Sarkozy l'a livré en une phrase répétée à trois reprises à l'occasion de la présentation du Livre blanc : « Il n'est pas raisonnable de payer plus que le budget de la défense pour rembourser les intérêts de la dette ». Voici donc les militaires rappelés à la raison et à leurs responsabilités. Militaires, certes, mais aussi citoyens qui se doivent de contribuer à l'effort réclamé à la nation en période de crise. Résultat : les effectifs de l'armée seront réduits. 54 000 postes sur les 320 000 actuels devraient disparaître d'ici 2014. Cela revient à tailler à la hache. « Mais, a expliqué le chef de l'Etat, ce n'est pas le déclassement militaire de la France. Elle restera une grande puissance diplomatique et militaire ».

Nicolas Sarkozy

Président de la République française

« Comme vous, j'entends les déclinistes et les pessimistes. Ils annoncent que le Livre blanc donnerait le signal du déclassement militaire de la France. Je retourne la question : où est-il le déclassement militaire de la France ? »

écouter 00 min 58 sec

17/06/2008 par Philippe Leymarie


Priorité au renseignement

Pour Nicolas Sarkozy, il faut tout simplement la vérité sur la cohérence des moyens et ne plus soutenir à bout de bras des matériels qui ont fait leur temps. Autrement dit, l'Elysée est désormais convaincu que la réalisation de l'ambition affichée  - occuper son rang diplomatique -, passe par une armée forte, mais une armée qui fera des économies humaines de grandes échelles au profit des technologies de pointe. Les crédits à la défense seront maintenus en volume, 377 milliards d'euros pour la période 2009-2020 avec une priorité à la modernisation dans un monde qui bouge. Priorité notamment au renseignement avec l'accent mis sur les satellites d'observation, d'écoutes électromagnétiques et de détection de lancements de missiles ; et création du CNR, (le Conseil national du renseignement) qui regroupera, sous l'autorité du chef de l'Etat, les ministres concernés et les patrons de services. C'est une nouveauté. « La première fois que seront traitées simultanément des questions de défense et de sécurité intérieure », soulignent les auteurs du Livre blanc, puisqu'il s'agit également de prévenir les cyber-attaques, les catastrophes naturelles et le terrorisme. 

Inquiétudes de l'opposition

Pourtant, malgré les assurances données par Nicolas Sarkozy, et tout particulièrement malgré son annonce du renforcement du contrôle du Parlement sur les questions militaires, ce projet de réforme n'a pas convaincu l'opposition, pas plus qu'il n'a convaincu les gaullistes qui refusent de voir brader l'héritage du général. Le premier secrétaire du Parti socialiste a pour sa part dénoncé la contrainte budgétaire qui « l'emporte sur la vision stratégique avec pour conséquence le retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan ». Une remarque appuyée par Paul Quilès, l'ancien ministre de la Défense de François Mitterrand, pour lequel l'initiative du Livre blanc aurait dû intervenir « d'emblée dans un cadre européen » et qui accuse le chef de l’Etat de produire volontairement de l'anxiété et de faire le jeu d’une administration Bush finissante, néoconservatrice et en échec sur tous les territoires où elle intervient. Le chef de l'Etat a tenté de désamorcer cette crainte pour l’indépendance de la France en insistant sur sa volonté de développer, parallèlement, une Europe de la défense autonome avec notamment la mise en commun d'un certain nombre de moyens. Un choix que le Livre blanc résume en précisant que l’objectif premier est d’organiser la « complémentarité » et non pas la concurrence entre les deux organisations.

Nicolas Sarkozy

Président de la République française

« Il ne peut y avoir de progrès sur l'intégration de la France dans l'OTAN que s'il y a préalablement un progrès dans l'Europe de la Défense. »

écouter 01 min 05 sec

17/06/2008 par Philippe Leymarie


Message aux territoires

En fait, la réorientation de la défense pose d'autres problèmes économiques auxquels le gouvernement n'a pas encore apporté de réponses concrètes. Celui des villes de garnisons notamment. 450 communes possèdent une implantation liée à la défense. Une cinquantaine pourrait se retrouver privée de leurs installations, troupes ou bases aériennes. Et certains élus ont déjà fait part de leurs angoisses pour l'avenir. Les militaires participent aux économies locales. Ils en sont même souvent les principaux moteurs et les maires ne voient pas quelle compensation ils pourraient obtenir pour éviter la fragilisation et la paupérisation de leurs cités après leur départ. A tous ceux-là, Nicolas Sarkozy a rappelé une vérité qui aura du mal à passer. « L'armée assure la sécurité du territoire et pas l'aménagement du territoire » a-t-il dit. Un rappel assorti d'une promesse : « Les territoires seront accompagnés ».

A écouter

Yannick Malenfant, secrétaire général de la CGT au ministère de la Défense

« Là, on donne allégeance à l'Otan plutôt qu'à la défense européenne. »

18/06/2008 par Elodie Raitière