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Turquie/Laïcité

L’AKP en accusation devant la Cour constitutionnelle

par Julie Lerat

Article publié le 01/07/2008 Dernière mise à jour le 01/07/2008 à 23:50 TU

Le parti au pouvoir, l’AKP, pourrait être dissout. La Cour constitutionnelle a entendu ce mardi un plaidoyer du premier procureur du pays. Il accuse le parti du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan de mener des activités anti-laïques. La Turquie pourrait affronter une profonde crise politique si le parti majoritaire était effectivement dissout. Le Premier ministre et le président turcs sont directement visés par l’action en justice intentée contre leur parti.
Le procureur général de la Cour constitutionnelle d'Ankara accuse l'AKP d'activités anti-laïques et souhaite le faire interdire. (Photo : AFP)

Le procureur général de la Cour constitutionnelle d'Ankara accuse l'AKP d'activités anti-laïques et souhaite le faire interdire.
(Photo : AFP)


La Turquie est plongée dans l’incertitude la plus totale depuis le début des audiences de la Cour constitutionnelle, ce mardi. Dans la presse, les spéculations vont bon train sur l’avenir du parti au pouvoir. Le Parti de la justice et du développement (AKP), parti de centre-droit issu de la mouvance islamiste, est mis en cause par le premier procureur de Turquie, qui l’accuse de mener des activités « anti-laïques ». Des représentants du parti du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan doivent à leur tour être entendus ce jeudi, avant que la Cour constitutionnelle ne rende sa décision, sans doute à l’automne.

La Cour Constitutionnelle imprévisible

Les journaux turcs s’accordent pour dire que les pronostics sont impossibles. Mais depuis que la Cour Constitutionnelle a décidé, en juin dernier, d’annuler une loi qui autorisait le port du voile dans les universités, les commentateurs estiment que la dissolution de l’AKP est de plus en plus probable.


Les Turcs ne savent pas à quoi s’attendre. Les dix juges de la Cour constitutionnelle ont la réputation d’être totalement imprévisibles : la dissolution de l’AKP est donc envisageable, et envisagée. En tout, 71 membres du Parti de la justice et du développement pourraient être bannis de la vie politique. Plus exactement, ils se verraient privés de leur droit à « diriger, créer, ou appartenir à un parti politique ». Parmi les personnes mises en cause, figurent l’actuel Premier ministre Recep Tayyip Erdogan – lui-même déjà incarcéré en 1997 pour avoir lu publiquement des textes islamistes – et le président turc, Abdullah Gül.

A Ankara, on s’interroge déjà sur l’avenir du Premier ministre : pourra-t-il se présenter à de futures élections en tant que candidat indépendant ? L’AKP pourra-t-il se maintenir à l’Assemblée, même amputé d’une trentaine de ses députés ? Des élections législatives anticipées seront-elles convoquées en cas de dissolution du parti majoritaire ? A ces questions, il n’y a aujourd’hui que très peu de réponses.

Face aux incertitudes, certains députés et membre de l’AKP envisageraient déjà de se tourner vers d’autres formations politiques, proches de leurs obédiences. Le Parti de la justice et du développement regroupe, en effet, des tendances politiques très diverses – d’anciens membres de partis islamistes interdits, des hommes politiques de centre-droit, d’anciens hommes de gauche, ou encore des libéraux. Le Premier ministre Erdogan a déjà averti ceux qui menacent d’abandonner le parti que « ceux qui descendent du train ne pourront pas remonter à bord ».

L’économie au ralenti

A l’instabilité politique, s’ajoutent les incertitudes économiques. L’inflation augmente, les investisseurs sont méfiants – eux, qui avaient placé beaucoup d’espoirs dans le parti AKP au cours des dernières années – et les capitaux étrangers, hésitants. Le pays entier est suspendu à la décision de la Cour constitutionnelle, qui a fait savoir, ce mardi, par la voix de son président, Hasim Kilic, qu’aucune date n’était fixée pour rendre sa décision. A Bruxelles, la possible dissolution de l’AKP est vue d’un mauvais œil. Elle pourrait ralentir le processus de rapprochement entre la Turquie et l’Union européenne.

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