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JO / France

Le président Sarkozy aux JO, sans condition

par Sophie Malibeaux

Article publié le 09/07/2008 Dernière mise à jour le 09/07/2008 à 14:27 TU

Le président français Nicolas Sarkozy, devant le stade olympique de Pékin.(Photo : AFP)

Le président français Nicolas Sarkozy, devant le stade olympique de Pékin.
(Photo : AFP)

Cette annonce intervient au lendemain d’une offensive des médias officiels chinois contre la position adoptée jusque-là par le président français, qui avait lié son déplacement à Pékin aux progrès réalisés sur la question du Tibet. Cette condition n’est plus à l’ordre du jour. Aux yeux de la diplomatie chinoise, il s’agissait d’une « ingérence dans les affaires intérieures de la Chine ».

L’entretien de Toyako entre Nicolas Sarkozy et Hu Jintao visait à apaiser les tensions apparues après les émeutes de Lhassa. Les émeutes de mars et la répression qui s’en est suivie avaient alarmé la communauté internationale et les défenseurs des droits de l’homme, qui s’étaient ensuite manifestés lors du passage de la flamme olympique dans différentes capitales occidentales.

Le président Sarkozy avait lui-même condamné les violences et appelé à l’ouverture d’un dialogue entre les autorités chinoises et les représentants du Dalaï Lama. Sous la pression de l’opinion de plus en plus favorable à un boycott de la cérémonie d’ouverture, le président français avait lui-même lié son voyage en Chine aux progrès réalisés dans les relations entre Chinois et Tibétains.

Le dialogue entre parenthèses

De fait, les autorités de Pékin ont fait un geste en reprenant contact avec les représentants du Dalaï Lama, une première fois le 4 mai 2008, puis le 2 juillet. Mais les discussions n’ont porté aucun fruit. Lodi Gyaltsen Gyari, l’un des émissaires du Dalaï Lama s’est dit lui-même déçu à l’issue des derniers entretiens. En mai, il avait estimé que la rencontre avec les responsables du Parti communiste chinois n’avait rien à voir avec le processus entamé en 2002 afin d’établir un climat de confiance entre les différents interlocuteurs, processus interrompu en juillet 2007, après six occasions de rencontre.

Pour Lodi Gyari, le 4 mai, il s’agissait d’une réunion d’urgence dans un contexte de crise, pour demander notamment le retrait des forces de sécurité déployées jusque dans les monastères. Il misait en revanche sur la rencontre suivante. Or, les discussions des 1er et 2 juillet à Pékin se sont avérées tout aussi décevantes. Les Tibétains n’ont pas réussi à convaincre la partie chinoise de publier, ne serait-ce qu’un communiqué commun afin d’engager un processus de dialogue.

Seul résultat de la rencontre, une promesse de se revoir en octobre après les Jeux Olympiques.

Un discours officiel hostile au Dalaï Lama

Côté chinois, aucune information ne filtre sur l’état d’avancée du processus en cours. Surtout, la diplomatie chinoise estime que ce qui se passe au Tibet ne regarde que la Chine. Les déclarations en faveur du leader tibétain en exil sont invariablement qualifiées d’ingérence. La diplomatie chinoise n’a de cesse de critiquer « la clique du Dalaï Lama » , suspectée d’inciter à l’émeute et de jouer un double jeu, modéré devant les diplomates occidentaux, mais beaucoup plus agressif devant les militants de la cause tibétaine.

En dépit des appels au calme lancés par le Dalaï Lama et de son renoncement à l’indépendance du Tibet, les Chinois l’accusent de chercher encore et toujours la reconstitution d’un territoire grand comme le quart de la Chine, incluant les minorités ethniques tibétaines dans un vaste ensemble au-delà des frontières de l’actuelle province dite « autonome ».

Les Tibétains répliquent qu’il ne s’agit pas de sortir de la Chine mais d’acquérir une plus grande autonomie et d’obtenir des garanties quant au respect de leur culture et de l’environnement dans lequel ils vivent, de plus en plus asphyxiés par un développement accéléré au profit des Hans, l’ethnie dominante devenue majoritaire jusque sur le haut-plateau tibétain.

Les Jeux Olympiques, une occasion ratée ?

Loin d’appeler au boycott des jeux, le Dalaï Lama a d’ailleurs félicité les autorités chinoises pour avoir été sélectionnées afin d’organiser les 29e olympiades. Les Tibétains ont alors nourri l’espoir d’attirer l’attention de la communauté internationale sur leur sort. Mais plus l’on se rapproche de la tenue des JO, plus l’étau se resserre. Les autorités de Pékin craignent un risque de contagion à d’autres provinces chinoises mécontentes, elles aussi, des relations avec le pouvoir central et des injustices commises par les potentats locaux. Toute évolution est désormais reportée au lendemain des JO.

C’est pourquoi les Tibétains, en exil en France, continuent d’espérer dans une possible rencontre entre le président Sarkozy et le Dalaï Lama.

Deux poids, deux mesures

Le leader tibétain sera en France du 12 au 23 août. Le président français n’a pas exclu de le rencontrer, il ne s’y est pas non plus engagé. Mais les pressions se sont accumulées afin de l’en empêcher.

D’après le représentant du Dalaï Lama en France, Wangpo Bashi,  aucune démarche n’a encore été accomplie pour fixer le cadre d’une éventuelle rencontre. Wangpo Bashi déplore cette « position boiteuse » des autorités françaises, qui ne cessent d’invoquer les grands principes, qui reconnaissent « un homme de paix » dans le Dalaï Lama, mais ne trouvent pas le courage de le rencontrer.

Wangpo Bashi

Le représentant à Paris du Dalaï Lama

« La position française porte atteinte à la diplomatie, mais surtout à l’image de la France. »

écouter 1 min 3 sec

09/07/2008 par Nicolas Vescovacci


Les exilés tibétains font d’ailleurs remarquer que l’Allemagne réagit différemment et ne semble pas en subir de quelconques préjudices. Angela Merkel a reçu le Dalaï Lama, en soutien à son peuple, elle a renoncé à se rendre à Pékin pour la cérémonie d’ouverture des Jeux, et l’affaire semble en rester là.

La réaction de Pékin est cependant beaucoup plus virulente à l’égard de Paris. L’ambassadeur de Chine en France, Kong Quan, expliquait à la veille des entretiens entre Nicolas Sarkozy et Hu Jintao, ce mardi, qu’une rencontre avec le Dalaï Lama aurait de graves conséquences sur les relations entre les deux pays.

Kong Quan

L'ambassadeur de Chine en France

« Si cet affront a lieu, je ne crois pas que ce soit une bonne chose, et même, ce serait une très mauvaise chose. »

écouter 1 min 18 sec

09/07/2008 par Sophie Malibeaux


On notera, que, selon ses proches, le président français a omis de parler du Tibet lors de ses entretiens avec Hu Jintao, alors que la Chancelière allemande elle, n’a pas hésité à évoquer le dialogue entre le gouvernement chinois et les représentants du gouvernement tibétain en exil, souhaitant le succès de l’entreprise.

Il est difficile d’expliquer cette différence de traitement dont les Français semblent faire les frais, à la différence des Allemands ou des Anglais, qui n’ont pas non plus réservé un accueil favorable au passage de la flamme olympique et qui, en revanche, ne se privent pas de fréquenter le leader tibétain.

Wei Jingsheng, dissident chinois

« Il faut boycotter les JO sinon la présence des chefs d'Etat donnera une légitimité et un encouragement aux agissements du gouvernement chinois. »

écouter 00 min 59 sec

09/07/2008 par Véronique Gaymard

A écouter

Robert Ménard

Secrétaire général de Reporters sans frontières

« Nicolas Sarkozy fait exactement le contraire de ce qu’il avait dit. »

09/07/2008 par Nicolas Vescovacci

Pierre Lellouche

Député UMP et conseiller de Paris

« Nous devons avoir des relations convenables avec la Chine, mais pas à n'importe quel prix. »

09/07/2008 par Eric Chaurin

Daniel Cohn-Bendit, député européen

au Parlement européen à Strasbourg

« Les Chinois sont en train de gagner ; plus ils sont durs, plus vous vous mettez à genoux. »

09/07/2008