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Corée du Nord / Nucléaire

Retour à la case «crise» avec Pyongyang

par Alain Renon

Article publié le 26/08/2008 Dernière mise à jour le 27/08/2008 à 13:25 TU

La Corée du Nord a annoncé ce mardi 26 août  avoir suspendu le démantèlement de ses installations militaires et menace même de faire marche arrière. Motif : le refus des Etats-Unis de rayer la Corée du Nord de sa liste des Etats soutenant le terrorisme. Poussif depuis deux mois, le processus est à donc nouveau dans l'impasse.

La télévision nationale chinoise montre la destruction de la tour de refroidissement du site nucléaire de Yongbyon, en Corée du Nord, le 27 juin 2008.(Photo : AFP)

La télévision nationale chinoise montre la destruction de la tour de refroidissement du site nucléaire de Yongbyon, en Corée du Nord, le 27 juin 2008.
(Photo : AFP)


« Nous avons décidé d’interrompre le processus de dénucléarisation, mis en œuvre dans le cadre de l’accord du 3 octobre », indique le ministère nord-coréen des Affaires étrangères, cité par l’agence de presse officielle KCNA. En d’autres termes, Pyongyang affirme avoir suspendu le lent travail de démantèlement, spectaculairement engagé fin juin. Des diplomates et des journalistes des 5 pays associés aux pourparlers avaient alors assisté à la destruction de la tour de refroidissement de Yongbyon, le principal site atomique de l'armée nord-coréenne. Les images avaient fait le tour du monde et donné l'impression d'une application sérieuse de l'accord du 3 octobre 2007. D'autant que la veille, Pyongyang avait remis aux Chinois la déclaration tant attendue et longtemps retardée sur ses activités nucléaires, aussitôt transmise par Pékin aux Américains, aux Japonais, aux Russes, et aux Sud-Coréens.

Le régime stalinien estimait avoir accompli sa part de la première phase de l'accord. Autrement dit, c'était au tour de Washington de faire un geste, en rayant le pays de sa liste noire. Selon la législation américaine, ce retrait aurait pu intervenir 45 jours après la notification au Congrès de George Bush, favorable à cette mesure. Soit le 11 août. Mais les Américains ont exigé au préalable une vérification de l'inventaire nord-coréen. Sans obtenir gain de cause, malgré des discussions le week-end dernier encore, au siège de l’ONU à New York. D'où le coup de colère de Pyongyang, qui non seulement dit avoir gelé l'application de l'accord « depuis le 14 août » mais menace aussi de le dénoncer en évoquant « dans un deuxième temps » la remise en état et en service du réacteur de Yongbyon, en sommeil depuis un peu plus d'un an.

Question de calendrier ?

Ce raidissement nord-coréen n’est sans doute pas étranger au calendrier politique américain. Pyongyang a en effet choisi de rendre public ce coup d’arrêt à sa dénucléarisation – les gouvernements des 5 pays associés aux pourparlers ont déjà été informés, selon les Nord-Coréens – au moment de la convention du Parti démocrate, qui doit désigner officiellement Barack Obama dans la course à la Maison Blanche, pour accuser l’administration républicaine sortante du président Bush de mettre en péril un accord laborieusement négocié depuis 2003. La visite à Séoul, lundi 25 et mardi 26 août, du président chinois, Hu Jintao, peut également avoir joué un rôle. L’élection du conservateur Lee Myung-bak en décembre 2007 à la présidence sud-coréenne s’est traduite par un durcissement diplomatique à l’égard du voisin du Nord, sur le modèle de l’allié américain, avec lequel l’ancien président libéral Roh Moo-hyun avait, lui, pris ses distances.

Tout en se disant résolue à convaincre Pyongyang d’abandonner vraiment son programme nucléaire militaire, la Chine a d’ailleurs parfaitement reçu le message en invitant tous les pays engagés dans les négociations à « honorer leurs engagements ». Une façon diplomatique mais très claire de considérer que les Etats-Unis ont effectivement leur part de responsabilité dans ce regain de tension.

Il reste à savoir si cette crise peut réellement mettre en péril la dénucléarisation de la péninsule et, partant, la normalisation des relations entre les Etats-Unis, leurs alliés et la Corée du Nord. L’imprévisibilité du régime de Kim Jong-il ne permet pas d’écarter cette hypothèse, même si Pyongyang, à l’approche de l’hiver, a besoin de l’aide énergétique promise dans l’accord nucléaire, et plus encore d’une assistance alimentaire, alors que le pays serait confronté à sa pire pénurie alimentaire depuis près de 10 ans.