par Heike Schmidt
Article publié le 15/10/2008 Dernière mise à jour le 15/10/2008 à 23:49 TU
La crise chamboule les marchés financiers et, dans la foulée, l’agenda des chefs d’Etat et de gouvernement. Lors du sommet européen mercredi 15 et jeudi 16 octobre à Bruxelles, les 27 devaient se mettre d’accord sur le paquet climat et énergie que la France souhaite faire adopter avant la fin de sa présidence de l’UE en décembre. Mais le risque de récession en Europe pourrait reléguer la lutte contre le réchauffement climatique au second plan. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, avertit : « J’espère qu’ils ne vont pas diluer les ambitions. »
Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a appelé l'UE à tenir ses engagements sur le climat.
(Photo : Reuters)
En mars 2007, sous la présidence de l’Allemagne, l’Union européenne avait pris trois engagements clés ambitieux, à réaliser d’ici à 2020 :
- réduire d’au moins 20% les émissions de gaz à effet de serre
- porter la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l’Union européenne à 20%
- améliorer l’efficacité énergétique de 20%.
La France a fait de l’adoption de ce « paquet climat » une des grandes priorités de sa présidence de l’UE. L’objectif, annoncé dans le programme de travail, est de mettre l’Europe à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique : « La présidence s’attachera à dégager avant la fin de l’année un accord sur les propositions du paquet climat/énergie, qui constituent une base solide pour une politique européenne ambitieuse en termes de lutte contre le changement climatique et pour assurer la transition de l’économie européenne vers une économie la plus sobre possible en carbone. »
L’Europe : le moteur qui entraîne le reste du monde ?
L’enjeu est crucial : le protocole de Kyoto arrive à échéance en 2012. La communauté internationale doit donc trouver un nouvel accord qui fixe le cadre de la lutte contre le changement climatique. Les négociations internationales, d’abord en décembre 2008 à Poznań en Pologne et ensuite en décembre 2009 au sommet de l’ONU à Copenhague, s’annoncent laborieuses. A l’occasion de ces débats avec les grandes puissances comme la Chine, les Etats-Unis ou encore l’Inde, l’Europe compte se positionner comme le moteur qui peut entraîner le reste du monde, en se fixant des objectifs plus ambitieux que le reste de la communauté internationale en matière de protection de l’environnement.
Mais la crise financière risque de freiner les dirigeants européens dans leur élan et donne de nouveaux arguments à ceux qui voient le plan européen d’un œil sceptique. L’Allemagne, la Pologne et l’Italie craignent des coûts trop importants pour leurs industries, censées payer pour chaque tonne de CO2 émise dès 2013. « Le monde a changé depuis la présentation du paquet climat en janvier, avec l’instabilité financière et le renchérissement des matières premières », a averti le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, lors d’une rencontre avec ses homologues au début de la semaine à Luxembourg. Face à la récession qui pèse sur l’Europe, le chef de la diplomatie italienne demande la renégociation du paquet climat dans sa totalité.
Le « tsunami financier » freine les Européens dans leur élan
La Pologne, elle, met aussi en avant « le tsunami financier » pour justifier son refus catégorique du plan de lutte. 90% de sa production d’électricité dépendent de l’exploitation du charbon, particulièrement polluant. Si les Polonais devaient réduire les émissions de CO2 de 20%, l’industrie aussi bien que les particuliers paieraient la facture : le Premier ministre Donald Tusk estime que le dispositif « conduirait à augmenter le prix d’électricité de 90% ».
Dans sa lettre d’invitation pour le sommet européen qui se tient le 15 et le 16 octobre à Bruxelles, le président français Nicolas Sarkozy a mis de l’eau dans son vin en reconnaissant que le contexte économique pesait sur les discussions: « Il faut progresser de manière décisive vers l’objectif d’une adoption du paquet énergie climat avant la fin de l’année, en tenant compte des difficultés économiques actuelles », a-t-il écrit à ses collègues européens.
« Le changement climatique ne disparaît pas à cause de la crise financière »
Le président de la Commission européenne a appelé l’UE à tenir ses engagements sur le climat pour ne pas mettre en doute sa crédibilité : « J’espère que l’éthique de la responsabilité l’emportera sur les préoccupations à court terme », a dit José Manuel Barroso, en rajoutant : « Sauver la planète n’est pas une question de digestif, à prendre ou à laisser. Le changement climatique ne disparaît pas à cause de la crise financière. »
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