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Thaïlande / Asean

Les « chemises rouges » font capoter le sommet de Pattaya

Article publié le 11/04/2009 Dernière mise à jour le 11/04/2009 à 15:30 TU

Le sommet de l'Asean à Pattaya qui rassemblait les dirigeants de seize pays d'Asie-Pacifique, a été brusquement reporté sine die ce samedi après la prise d'assaut, par des centaines de manifestants antigouvernementaux thaïlandais, de l'hôtel de luxe où il se déroulait. Les dirigeants participants ont tous été évacués par hélicoptère alors que l'état d'urgence était décrété à Pattaya, pour être finalement levé en fin de journée.

Avec notre envoyé spécial à Pattaya, Arnaud Dubus

Les chefs d'Etat participant au sommet de l'Asean ont du être évacués par hélicoptère.(Photo : AFP)

Les chefs d'Etat participant au sommet de l'Asean ont du être évacués par hélicoptère.
(Photo : AFP)

Les « chemises rouges » ont atteint leurs objectifs : faire capoter le sommet élargi de l’association des Nations de l’Asie du sud-est à Pattaya et humilier le Premier ministre thaïlandais Abhisit Vejjajiva.

La décision été prise de concert par tous les leaders de l’Asean lors du déjeuner : des hélicoptères ont évacué les seize chefs d’Etat et de gouvernement qui devaient participer au sommet y compris ceux de la Chine, de l’Inde et du Japon.

L’état d’urgence a été décrété par conséquent sur Pattaya et sur la province de Chonburi située à une centaine de kilomètres au sud-est de Bangkok. Concrètement, l’armée prend les choses en main et peut arrêter et détenir arbitrairement toute personne soupçonnée de créer des troubles. Cependant, il n’est pas question pour l’instant de couvre-feu et environ 500 « chemises rouges » qui avaient pénétré de force dans l’hôtel ce samedi matin continuent à manifester devant ce complexe de luxe où aurait dû se tenir le sommet.

Un très sérieux camouflet pour le Premier ministre

C’est un très sérieux camouflet pour le Premier ministre Abhisit Vejjajiva. Mais il est clair qu’il n’a pas voulu que la police et l’armée utilisent la force pour disperser les manifestants. Des questions se posent toutefois quant à leur incapacité totale à contrôler et contenir ces manifestants dont le nombre à Pattaya n’a jamais dépassé le millier de personnes.

Les longues vacances du Nouvel an thaï vont commencer à partir de demain dimanche, ce qui va calmer quelque peu les tensions, mais il est toutefois probable qu’après cette victoire, les « chemises rouges » reprendront dans une dizaine de jours, leur campagne pour faire tomber le gouvernement.

Les « chemises rouges » toujours aussi tenaces

« Les forces de l'ordre ont été complètement débordées. C'est assez étrange que ces miliers de militaires et policiers ne soient pas arrivés à repousser quelques centaines de manifestants. »

11/04/2009 par Arnaud Dubus


Qui sont ces « chemises rouges » ?

Dans leur majorité, les « chemises rouges » sont les partisans de l’ancien Premier ministre, Thaksin Shinawatra, renversé par un coup d’Etat en septembre 2006. Issues des classes modestes de la population, travailleurs migrants venus des provinces ou jeunes désœuvrés, ils avaient grandement bénéficié des politiques populistes de Thaksin, notamment de la couverture sociale universelle et des prêts revolving.

Depuis que Thaksin s’est exilé à l’étranger et qu’il a été condamné pour abus de pouvoir, il a utilisé cette masse informelle pour atteindre son objectif : récupérer environ deux milliards d’euros, gelés dans les banques thaïlandaises et éventuellement reconquérir le pouvoir.

Les « chemises rouges » qui ont fait capoter le sommet, ont été recrutés dans les bas fonds de Pattaya et Chonburi. Leurs revendications démocratiques sonnent un peu creux, comme un discours soigneusement appris, puis ânonné pour satisfaire le journaliste.

Au-delà de cette manipulation par des politiciens cyniques et sans scrupules, comme Thaksin, la révolte des « chemises rouges » reflète un profond malaise social qui ne date pas d’aujourd’hui. Ce sont surtout les classes moyennes urbaines, souvent sino-thaïlandaises qui ont profité des vingt années de croissance économique accélérée qu’a connues la Thaïlande.

Les « chemises rouges », souvent des provinciaux, souvent munis d’une simple éducation primaire, ont été les « laissés-pour-compte » de cette croissance. Leur colère actuelle exprime ce trop plein de frustration.

A.D.  

A écouter

Yvan Cohen, spécialiste de la politique thaïlandaise, basé à Bangkok

« C'est un problème de légitimité pour le gouvernement du Premier ministre thaïlandais qui n'a pas de mandat populaire et qui est perçu comme le représentant d'une élite. »

11/04/2009

Thaïlande : le sommet avorté

«Cette pantalonnade en couleurs est d'autant plus humiliante pour Abhisit Veijajiva, le Premier ministre thaïlandais qu'à plusieurs reprises des pays comme le Cambodge avaient fait part de leur craintes concernant la sécurité de tels sommets.»

11/04/2009