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Afghanistan / Présidentielle 2009

La décevante campagne d'Hamid Karzaï

Article publié le 15/08/2009 Dernière mise à jour le 15/08/2009 à 13:10 TU

Grand favori, le président sortant n'a fait que très peu d'apparitions publiques. Son principal rival, Abdullah Abdullah, a quant à lui multiplié les meetings dans le pays, suscitant une ferveur inattendue.

Le président afghan, Hamid Karzaï (D) salue ses partisans, lors d'un discours dans un stade d'Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan, le 14 août 2009. (Photo : Reuters)

Le président afghan, Hamid Karzaï (D) salue ses partisans, lors d'un discours dans un stade d'Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan, le 14 août 2009.
(Photo : Reuters)

 
De
notre correspondant à Kaboul, Luc Mathieu

A l'ombre d'un chêne du campus de l'université de Kaboul, Housnia, 19 ans, s'énerve. « Hors de question que j'aille voter ! Aucun candidat ne tiendra ses promesses. Le pays est dans un état catastrophique. Tout est détruit, même à Kaboul ! », explique cette étudiante en psychologie.

A cinq jours du scrutin, la campagne électorale afghane s'achève dans une ambiance maussade, qui laisse craindre une abstention massive. « Franchement, pourquoi faudrait-il que j'aille voter ? Hamid Karzaï a un bilan catastrophique mais il est sûr d'être réélu. Ca ne sert à rien de se déplacer », estime Omar, un chauffeur de taxi de la capitale afghane.

Au pouvoir depuis sept ans, Hamid Karzaï reste le grand favori. Selon un sondage publié vendredi 14 août par l'International Republican Institute, il est crédité de 44% des intentions de vote au premier tour, loin devant Abdullah Abdullah (26%), Ramazan Bashardost (10%) et Ashraf Ghani (6%). Mais le président sortant n'a pas réussi à susciter l'enthousiasme de la population durant la campagne. Alors que son portrait est placardé à chaque coin de rue, il n'a fait que peu d'apparitions publiques et a refusé de participer au seul débat télévisé organisé avec ses principaux rivaux.

 « C'est une menace très dangereuse »

Le 7 août, plusieurs tribunes du stade où il avait organisé un meeting sont restées vides. Son discours n'a pas duré plus de dix minutes : « L'Afghanistan a progressé sur la voie de la paix et de la fraternité. Je vous promets que mes vice-présidents et moi-même n'avons qu'un objectif : vous servir. Si vous votez pour mois, votre avenir sera meilleur ». Au pied de la tribune présidentielle, Khonamali, 22 ans, se montrait sceptique : « Il fait beaucoup de promesses mais je ne sais vraiment pas s'il va les tenir. Je voulais voter pour lui mais je commence à hésiter. »

Abdullah Abdullah, le candidat à l’élection présidentielle afghane, devant la mosquée bleue de Mazar-i-Sharif, le 13 août 2009. (Photo : Reuters)

Abdullah Abdullah, le candidat à l’élection présidentielle afghane, devant la mosquée bleue de Mazar-i-Sharif, le 13 août 2009.
(Photo : Reuters)

A l'inverse, Abdullah Abdullah a réalisé une campagne efficace, suscitant une ferveur que personne n'avait imaginée. Depuis quatre mois, cet ancien proche du commandant Massoud a sillonné le pays, donnant meeting sur meeting dans presque toutes les provinces, y compris les plus dangereuses. Jeudi dernier, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont écouté son discours à Mazar-i-Sharif, dans le nord du pays. A Ghor, dans l'ouest de l'Afghanistan, il lui a fallu une demi-heure pour rejoindre son avion, situé à une centaine de mètres du parc où il avait tenu son meeting. Des dizaines d'Afghans courraient en criant entre les 4x4 de son convoi. Calme et souriant, Abdullah Abdullah serrait des mains à travers le toit ouvrant de sa voiture.

Son entourage s'est peu à peu persuadé que la victoire était acquise. « Si Hamid Karzaï remporte les élections, ce ne sera que grâce aux fraudes. Nos supporters descendront dans la rue », a récemment déclaré Abdul Sattar Murad, le directeur de campagne d'Abdullah Abdullah. « C'est une menace très dangereuse. Une manifestation peut rapidement dégénérer et tourner à l'émeute. En Afghanistan, tout le monde est armé ou peut l'être, y compris à Kaboul », s'alarme Haroun Mir, analyste au Centre d'études et de sciences politiques afghan.