par Franck Weil-Rabaud
Article publié le 17/08/2009 Dernière mise à jour le 18/08/2009 à 14:00 TU
Dès dimanche soir, dans un communiqué, le président français Nicolas Sarkozy demandait « qu’il soit mis fin au plus vite aux procédures judiciaires à l’encontre de Clotilde Reiss et de Nazak Afshar (employée franco-iranienne de l’ambassade de France à Téhéran) que rien ne peut justifier ». Le gouvernement français est toutefois dans l’incapacité de dire quand le Tribunal révolutionnaire iranien rendra son verdict et encore moins ce qu’il sera. Tout du moins officiellement.
Il est en effet avéré que la France a versé une caution de plusieurs dizaines de milliers d’euros pour obtenir cette simple libération conditionnelle. Il faudra sans doute attendre encore pour savoir si d’autres contreparties ont été envisagées pour permettre un retour rapide de Clotilde Reiss en France. Ce qui est sûr, c’est que la France n’était pas seule pour mener ces tractations. Elle a bien sûr bénéficié du soutien de ses partenaires européens.
Mais plus surprenant dans le contexte géopolitique actuel, Paris a fait appel à la Syrie. Le régime syrien a de très bonnes relations avec la République islamique. C’est pour cette raison que la France l’a sollicitée pour jouer les médiateurs. Or ces derniers mois, la France, à l’instar de ses partenaires occidentaux a multiplié les tentatives pour distendre les liens entre Damas et Téhéran. Il s’agissait alors de convaincre en particulier le régime de Damas de cesser ses soutiens à des organisations comme le Hamas palestinien ou le Hezbollah libanais, accusées de déstabiliser le Proche-Orient. Pour Yann Richard, professeur à l’institut d’études iraniennes de l’université Paris III, « en sollicitant la Syrie la France a commis l’erreur de jouer sur le lien entre Damas et Téhéran que les Occidentaux cherchaient à dénouer ».
Des questions en suspens
La question se pose désormais de savoir quelles contreparties l’Iran serait en mesure d’attendre de la part de la France en échange d’un acquittement de Clotilde Reiss qui lui permettrait de quitter Téhéran. Il pourrait s’agir d’un assouplissement de la position française dans le dossier nucléaire iranien et plus particulièrement sur la question des sanctions qui frappent la République islamique.
Dès son élection en 2007, Nicolas Sarkozy a affirmé que seule de fortes sanctions pouvaient inciter l’Iran à renoncer à son programme d’enrichissement d’uranium. Lorsque le président américain Barack Obama avait laissé entendre qu’il était favorable à un dialogue sans conditions avec les responsables iraniens, le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner n’avait pas hésité à lancer une mise en garde contre une telle initiative qui, sans garantie, permettrait à la République islamique de gagner du temps pour poursuivre une politique nucléaire que les Occidentaux jugent suspecte.
Reste que l’instabilité politique intérieure en Iran, née de la contestation de la réélection de Mahmoud Ahmadinejad, a éclipsé le dossier nucléaire et que la question d’un renforcement éventuel des sanctions ne semblent plus une priorité pour les six pays occidentaux qui mènent depuis des années une négociation sur le sujet avec les autorités iraniennes.
Le sort réservé par la justice iranienne à Clotilde Reiss donnera sans doute une indication sur la direction que le régime iranien entend donner à sa politique étrangère. Mais la poursuite des procès d’opposants, la multiplication des allégations de torture et de mauvais traitements infligés aux personnes arrêtées lors des manifestations contre la réélection controversée de Mahmoud Ahmadinejad ne semblent pas indiquer de la part des autorités iraniennes une volonté d’ouverture qu’il s’agisse de politique intérieure ou de relations internationales.
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