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11/06/2004
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1804-2004 : Le Père Lachaise a 200 ans
Bienvenue au royaume des esprits !
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(MFI) Installé au cœur de Paris, il est devenu l’un des plus célèbres cimetières du monde : c’est le cimetière du Père-Lachaise, où reposent tant de célébrités parmi un million d’hommes et de femmes venant des quatre coins de la planète, issus de très nombreuses religions, philosophies, cultures et civilisations.
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Il faut imaginer un vaste jardin, parsemé d’arbres tricentenaires, fleuri d’amour, de grâce, de talents et de gloires où poètes et romanciers, musiciens, peintres, hommes politiques et militaires, militants des bonnes ou mauvaises causes, riches et pauvres, anarchistes et royalistes, féministes et misogynes, célèbres ou inconnus de toutes origines… cohabitent en paix et en silence !
Ce jardin, dépositaire de l’histoire, n’est pourtant pas imaginaire. Il se situe depuis 200 ans au cœur de Paris : c’est le cimetière du Père-Lachaise, dont la grandeur est d’offrir un symbole à la fois de la diversité des hommes et de l’unité du genre humain : catholiques, protestants, orthodoxes, juifs, musulmans, bouddhistes, libres penseurs, francs-maçons ou croyants d’autres religions ou spiritualités sont réunis dans ce lieu magique où Marcel Proust repose dans le carré musulman tout comme l’écrivain athée iranien Sadegh Hedayat.
Une nécropole d’abord peu recherchée
Nous sommes au début du XIXème siècle, au lendemain de la Révolution. Une loi impose aux communes de construire les cimetières hors de la ville, les trois nécropoles intra-muros de Paris s’étant rapidement remplies. Situés à l’est de Paris, sur la colline de Charonne, les 17 hectares d’une ancienne propriété des Jésuites, devenue la maison de repos de François d’Aix de la Chaize, confesseur de Louis XIV avant de passer aux mains de la famille Baron, ruinée par la Révolution, semblent un bon emplacement pour créer la nouvelle cité des morts. Le préfet de la Seine, Nicolas Frochot, achète en 1803 le domaine et le confie à Alexandre Théodore Brongniart, célèbre architecte de la Bourse. Le « cimetière de l’Est », dit du Père-Lachaise, est ouvert le 21 mai 1804.
La nouvelle nécropole peine à se faire accepter. Trop loin de la ville, trop pauvre pour les Parisiens fortunés aux yeux de qui il est inconcevable de se faire enterrer dans un quartier populaire. Le cimetière ne compte que treize tombes fin 1804, et seulement 62 en 1807. Que faire ? Les plus grands artistes sont appelés à la rescousse pour rendre l’emplacement attractif. On y transfère les restes de Molière, de La Fontaine, d’Héloïse et Abélard. Le Père Lachaise gagne progressivement sa notoriété. En 1830, il comptait 33 000 tombes.
Aujourd’hui, on y dénombre plus de soixante-dix mille concessions et un million de morts, parmi lesquels un nombre non négligeable d’étrangers. On croit entendre la mélodie de « Riders on the Storm » au moment d’approcher de la dernière demeure de Jim Morrison, chanteur du groupe de rock The Doors, ou quelques notes échappées du piano de Frédéric Chopin. Yves Montand enlace à jamais Simone Signoret, et au fil des allées, on croise les noms d’Oscar Wilde, Guillaume Apollinaire, Honoré de Balzac, Beaumarchais, Colette, Alphonse Daudet, ou encore Eugène Delacroix et d’Edith Piaf. Lieu historique, le Père Lachaise accueille les éternels de notre mémoire : Le Temps des cerises (Jean-Baptiste Clément) est à quelques mètres de Poésie ininterrompue (Paul Eluard).
Le Père-Lachaise réunit aussi toute la palette des talents et de la créativité et exprime à sa manière le cosmopolitisme de la capitale française : les œuvres, monuments architecturaux ou sculptures dans le style Art nouveau, gothique ou grec s’y exposent sans s’opposer. La plupart des constructions de ce lieu mythique sont classées monuments historiques. Le Mur des Fédérés, symbole de la Commune de Paris, en fait partie. C’est ici que s’est déroulé l’ultime épisode de la Commune de Paris : les derniers insurgés se retranchent dans le cimetière, la troupe démolit l’une des portes d’entrée à coups de canon et y pénètre le 27 mai 1871 au soir… une lutte féroce et sanglante se livre parmi les tombes. Le lendemain, à l’aube, les cent quarante-sept survivants sont fusillés contre le mur d’enceinte, dans le coin nord-est du cimetière, les corps sont jetés dans une large tranchée ouverte sur place. Aujourd’hui le Mur des Fédérés est l’objet de nombreux pèlerinages politiques. Autre lieu, toujours saisissant : le monument consacré aux déportés d’Auschwitz, Dachau et Ravensbrük, un ensemble dédié à la Résistance dans le monde. Il y a encore le « Carré des Maréchaux d’Empire », conçu pour les fidèles de Napoléon, le Jardin du souvenir où sont répandues les cendres des morts incinérés, le Columbarium, et le Crématorium.
44 hectares, 5 000 arbres et… 2 millions de visiteurs
Le Père-Lachaise est décidément un cimetière à nul autre pareil. Conçu comme un parc à l’anglaise, amélioré au fil du temps à l’image d’une ville moderne, ses plus anciennes sépultures parfois abandonnées voisinent avec les tombes les mieux entretenues. Avec ses 44 hectares où sont plantés environ 5 000 arbres, il est également le plus grand parc de la capitale française. Chaque année quelque deux millions de visiteurs du monde entier s’y aventurent, sans oublier les Parisiens habitués du lieu. Tous viennent pour bouquiner, méditer ou simplement se promener. Des rumeurs entourent le site, insolites ou effrayantes, allant de rendez-vous romantiques à côté du temple gothique où sont les célèbres amants Héloïse et Abélard, à la célébration de messes noires. Et il y a ce jeune architecte qui a conçu sa propre tombe et s’y rend chaque semaine pour l’entretenir ou changer la décoration…
Peut-on parler de succès pour un cimetière ? Une chose est sûre, le Père-Lachaise attire et séduit dans les allées de son labyrinthe, où l’on aimerait se perdre pour quelques moments… ou une éternité.
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Darya Kianpour
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