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06/08/2004
Les tirailleurs africains : un rôle historique

(MFI) Créés par décret sous Napoléon III, les régiments de soldats coloniaux d’Afrique ont participé massivement aux deux grandes guerres du 20e siècle et ont largement contribué à la victoire des Alliés en 1945.

Une des caractéristiques des grands conflits européens du dernier siècle a été la participation massive aux combats des soldats issus des pays colonisés. Les effectifs des contingents africains (Algériens, Marocains, Tunisiens, Malgaches et tirailleurs africains confondus) qui ont combattu aux côtés des Français s’élevaient à quelque 416 000 hommes pendant la Grande Guerre et à près de 500 000 en 1939-1945. Malgré les rigueurs climatiques, les maladies et l’attitude des états-majors qui les assignaient systématiquement à des corvées subalternes, ces soldats ont joué un rôle décisif dans la victoire de la France en 1918 et ont contribué à la libération en 1944-45. Comme le rappellent les historiens, la France n’aurait probablement pas pu l’emporter avec ses seules forces, ni en 14-18, ni en 39-45.

Et l’Empire créa les tirailleurs

L’empire colonial français n’aurait sans doute pas existé non plus sans les troupes noires qui ont participé à toutes les opérations de conquête de territoires menées par la République tout au long du 19e siècle en Afrique et à Madagascar. Elles ont remplacé progressivement les soldats européens de base qui résistaient mal aux conditions climatiques tropicales. Dès 1820, les recruteurs militaires engagèrent des Africains comme « laptots » (marins) et soldats. Il s’agissait pour la plupart de captifs que les autorités françaises avaient rachetés à leurs maîtres et dont le temps de service était considéré comme un remboursement. Le décret créant formellement « au Sénégal un corps d’infanterie indigène sous la dénomination de tirailleurs sénégalais » date du 21 juillet 1857 et fut signé par Napoléon III. Ces soldats qui venaient de toute l’Afrique noire étaient souvent des « volontaires forcés », désignés par les chefs de villages qui se débarrassaient ainsi des gêneurs de toute nature. Leurs effectifs n’ont cessé d’augmenter ; ils sont passés de 1 000 en 1867 à 15 000 hommes en 1913.
Cette dépendance croissante à l’égard des bataillons d’Afrique n’a pas pour autant conduit le gouvernement français à inclure l’Afrique dans l’appel à la mobilisation à la veille de la guerre en 1914. A l’époque, l’état-major était profondément divisé sur l’utilisation des troupes noires pour la défense ou la reconquête du territoire métropolitain. Certains pensaient, comme le colonel Mangin, que l’Afrique était un formidable réservoir de soldats pour la métropole. Par ailleurs, l’Afrique n’avait-elle pas une dette de sang envers la France, comme on pouvait le lire en 1909 sous la plume du ministre des colonies de l’époque Adolphe Massimy : « L’Afrique nous a coûté des monceaux d’or, des milliers de soldats et des flots de sang. Mais les hommes et le sang, elle doit nous les rendre avec usure. » ?


Une véritable chasse aux recrues

Les cadres coloniaux comme Mangin avaient en face d’eux des spécialistes militaires franchement sceptiques quant à l’efficacité de l’emploi de troupes coloniales sur les fronts européens. Mais ces réserves furent balayées par les énormes besoins en hommes de cette guerre totale. Dès 1916, une véritable chasse aux recrues est mise en place pour combler les rangs vides. La direction des territoires coloniaux fit pression sur les chefs de village, organisant de véritables rafles. Des révoltes éclatèrent ici et là. La France de Clémenceau envoya le Sénégalais Blaise Diagne en 1917 pour convaincre la jeunesse de l’Afrique noire de s’enrôler massivement pour sauver la métropole en danger.
La France établit la conscription obligatoire dans les colonies dès 1919 et appelle de nouveau l’Afrique à la rescousse dès l’imminence d’une nouvelle guerre avec l’Allemagne. Au cours de la décisive bataille de France, en mai et juin 1940, 10 000 soldats noirs furent tués et 7 500 sur 11 000 moururent dans les camps de prisonniers de guerre. Les prisonniers africains, gradés et simples soldats, étaient sommairement exécutés par les Allemands.
Est-ce pour affirmer que la France restait essentiellement une nation européenne et qu’elle était libérée d’abord par les Français que de Gaulle décidera en 1944, au lendemain du débarquement de l’armée française en Provence et à la surprise générale, de démobiliser 20 000 tirailleurs ? Ce « blanchissement » des Forces Françaises Libres ne peut nullement déposséder l’Afrique du rôle historique qu’elle a joué dans cette guerre.


Tirthankar Chanda

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