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24/06/2005
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Cinéma : Devine qui vient dîner ce soir ?
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(MFI) Autour des mésaventures d’un jeune Blanc que sa fiancée noire, Theresa, présente pour la première fois à sa famille, Kevin Rodney Sullivan brode Black/White, une comédie sur le choc des cultures et des races. Après 105 minutes de rebondissements en tous genres, un constat s’impose : l’Amérique café au lait n’est pas pour demain.
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Simon est dans ses petits souliers : sa girlfriend Theresa Jones va le présenter pour la première fois à ses parents. Examen d’entrée d’autant plus terrifiant qu’il a auparavant largement été brieffé sur « beau-papa », un despote dont la grande gueule a déjà terrorisé bien des prétendants. Dans ce match dont l’issue est pour lui cruciale (l’ogre paternel lui accordera-t-il ou non la main de Teresa ?), il part avec un double handicap. Il a perdu son travail deux jours plus tôt. Il est blanc. De quel œil les Jones verront-il débarquer un fiancé que sa seule couleur de peau propulse à des années-lumières du gendre idéal ? « Je ne le leur ai jamais dit, car ça n’a aucune espèce d’importance », martèle Theresa, optimiste, dans le taxi qui les conduit vers la villa paternelle. « Bien sûr que ça en a une ! » rétorque le taximan (quoique nul ne lui ait demandé son avis). De fait : l’arrivée de Simon chez ses futurs beaux-parents Percy et Marilyn va déclencher un maelström familial qui, de bourdes en malentendus, va mettre à mal les nerfs de la famille de Theresa et l’ego de Simon en capilotade.
Comment le petit Blanc saura-il, sinon mettre dans sa poche, du moins affronter le tyrannique colosse noir qui lui barre l’entrée de sa maison – et de sa famille ? Une fois posé ce moteur narratif – dispositif dont le scénario mettra 105 minutes à expurger tout le suc comique -, le film annonce ses références : mettons, quelque chose entre la variante café au lait de Mon beau-père et moi (sans burlesque et sans Ben Stiller, ce qui représente un sérieux handicap) et le remake inversé de Devine qui vient dîner ce soir ? Pour rappel des faits, cette comédie tournée en 1967 mettait en scène un riche couple de bourgeois new-yorkais (Katherine Hepburn et Spencer Tracy, parfaits) recevant -un peu crispés- le fiancé noir de leur fille. Produit dans l’esprit libéral qu’on devine, à une époque où la ségrégation hantait encore tous les esprits (1), le film fut par la suite très décrié pour sa vision d’une réconciliation entre les peuples rendue possible à la seule condition que le prétendant soit élégant, d’une exquise politesse, beau comme un Dieu (c’est Sidney Poitier qui joue le rôle) et pourvu d’un travail capable de lui procurer un chèque à quatre zéros à la fin du mois.
D’une certaine façon, Black/White reconduit ces prémisses (le gendre présumé, quoique blanc, est un trader tout ce qu’il y a de plus convenable) tout en les faisant glisser sur un nouveau terrain. Si le film démarre comme une comédie exploitant tous les ressorts de la confrontation communautaire (Simon aux prises avec trois générations diversement coriaces de Jones : le père, le grand-père, plus une petite sœur chipie-mais-pas-trop, habillée comme aux plus beaux jours de la Blaxploitation), c’est sur le mode de la guerre des sexes qu’il achève sa course : Theresa et sa mère plaquent successivement leurs compagnons et découchent chez une tante bienveillante, et voilà les deux hommes contraints de faire alliance pour les reconquérir, en mettant entre parenthèses leur rivalité raciale. C’est là, sur le terrain de l’étude de mœurs, bien plus que sur la corde de la comédie déjantée, que le film et son interprète principal, Ashton Kutcher, parviennent à trouver leur vitesse de croisière.
(1) Pour mémoire, les émeutes raciales de Watts datent de 1965, le meurtre de Martin Luther King de 1968, et les lois sur la non-discrimination raciale à l’école de 1954.
Elisabeth Lequeret
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