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MFI HEBDO: Culture Société Liste des articles

14/10/2005
Chronique Livres

La France me tue

(MFI) En février 2002, Stéphane Béaud publie un livre intitulé 80% au bac, résultat d’une enquête menée entre 1991 et 2000 auprès d’un petit groupe de jeunes – presque tous des enfants d’immigrés – d’une cité HLM de la région de Sochaux-Montbéliard. A la suite de cette publication, le sociologue entretiendra une correspondance suivie avec un jeune homme de 28 ans, Younès Amrani, employé dans une bibliothèque de la banlieue lyonnaise. Cette correspondance va donner un document exceptionnel publié sous le titre Pays de malheur – un jeune de cité écrit à un sociologue. Compilés chronologiquement, les courriels (la correspondance s’est faite par internet) donnent à voir de façon crue, émouvante et parfois triste, la réalité de ce que tout le monde appelle « un jeune des cités ». Les confidences de Younès Amrani, d’abord générales, se font de plus en plus précises sur sa famille, ses amis, ses études interrompues à la fac (sa grande souffrance), ses galères, ses espoirs et ses désillusions. « J’aurais aimé être fils de profs, aller dans un lycée de bourges et voter socialiste ou Verts pour me donner bonne conscience. Mais non, je suis fils d’esclaves ayant grandi dans la merde, entourés de personnes sans espoir… » Cette correspondance, encouragée par Stéphane Béaud, finit par être une thérapie. « Plus je m’ouvre et plus les contradictions me taraudent l’esprit, plus je m’ouvre et plus des sentiments que je ne connaissais pas m’habitent. »
Pourtant, au-delà du choc de ce livre poignant sur l’intimité sociale de ce jeune homme, c’est à la naissance d’un intellectuel que l’on assiste. Ses analyses sur le paysage politique français, sur les hommes de gauche, sur les mouvements anti-racistes, sur les « Français » (c’est-à-dire les Blancs) et les « Arabes » et finalement sur lui-même, jeune homme né en France de parents marocains, font de lui un sociologue qui n’a rien à envier à Béaud.

Pays de malheur !, Younès Amrani et Stéphane Beaud, Editions La Découverte, 255 pages.

Nathacha Appanah


Apprendre à lire et à écrire

(MFI) Cet ouvrage s’adresse avant tout aux enseignants africains qui apprennent à lire et à écrire à leurs élèves dans un environnement multilingue, prévient son auteur. Avec un objectif : les aider à moderniser leur enseignement. S’appuyant sur des expériences menées au Ghana, en Ouganda et au Tchad, il part du principe, mis en évidence par la recherche, que les enfants apprennent à lire et à écrire plus facilement quand la langue d’enseignement est leur langue maternelle. Tout en prenant en compte les principales méthodes d’apprentissage aujourd’hui en vigueur et en soulignant certains principes de base (« les jeunes enfants considèrent qu’écrire est intéressant s’ils comprennent à quoi peut servir l’écriture »), ce manuel permet à l’enseignant de se poser un certain nombre de questions sur ses propres pratiques pédagogiques : « donnez-vous à vos élèves suffisamment d’occasions d’écrire dans leur langue maternelle des textes authentiques, tirés de la vie réelle, comme par exemple des invitations à venir à l’école adressées aux parents ?», demande-t-il. A l’aide de dessins, d’anecdotes, il fait diverses suggestions très pratiques pour, par exemple, fabriquer du matériel didactique avec les moyens du bord, compléter les livres scolaires habituellement utilisés, inventer des exercices de lecture ou d’écriture, organiser des clubs de lecture, monter une bibliothèque de classe, obtenir le soutien des parents à l’école, etc.

Langue et éducation en Afrique, Marie Chatry-Komarek, L’Harmattan, 232 pages.

Fanny Pigeaud


Femmes, violence : le couple infernal

(MFI) Identifier et reconnaître les violences faites aux femmes, c’est déjà engager le combat pour plus d’égalité. Les conventions des Nations Unies et les conférences mondiales ont beau se succéder depuis un demi-siècle, les résultats sont pour l’instant peu encourageants. Que ces violences soient engendrées par des guerres civiles, comme au Rwanda ou au Congo, par des coutumes patriarcales, par le monde du travail ou par le caractère irascible d’un conjoint, elles font chaque année de nombreuses victimes. Qu’elles soient verbales, psychologiques, physiques ou sexuelles, les violences faites aux femmes se repèrent dans tous les pays, dans tous les milieux, au sein de toutes les couches sociales. Tel est le propos de Maryse Jaspard, maître de conférences à l’Institut de démographie Paris-I. Pour mieux étudier le phénomène, l’auteur étudie les différentes méthodologies qui permettront de produire des statistiques autorisant des comparaisons internationales. La France a mené en 2000 l’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff) dont les résultats ont permis de mieux cerner la situation dans l’Hexagone. Si une enquête ne peut suffire, loin s’en faut, à éradiquer le phénomène, elle peut néanmoins susciter une prise de conscience salutaire, tant chez les victimes que chez les auteurs de violences.

Les Violences contre les femmes, Maryse Jaspard, La Découverte, Collection Repères, 122 pages.

Geneviève Fidani


Sorciers d’Afrique et d’ailleurs

(MFI) Si elle fait désormais sourire les Occidentaux qui ont oublié qu’ils ont brûlé des sorcières au moins jusqu’à la fin du 17e siècle, la sorcellerie continue de faire partie du quotidien de bien des Africains. Peter Geschiere, anthropologue ayant effectué de nombreux séjours au Cameroun, apporte dans cet ouvrage son éclairage sur les pratiques actuellement en vigueur et leur signification. Pour lui, la sorcellerie, loin d’être en voie de disparition, connaît un net regain de pratique depuis les années 1980. A quoi attribuer ce soudain engouement pour l’occulte ? L’auteur note qu’il va de pair avec la détérioration des conditions de vie en Afrique. Malgré tout, le recours à la sorcellerie ne signifie pas forcément refus de la modernité. Après des débuts chaotiques sur le chemin de la modernisation, il semblerait que les populations cherchent à s’attirer les bonnes grâces des esprits pour favoriser leur réussite, ce qui les pousserait à recourir largement à des pratiques occultes. Ainsi, pas un match de football ne se joue sans que les sorciers des deux camps ne travaillent dans l’ombre. Même les politiques prendraient l’habitude de solliciter les forces du mal pour pallier les inconvénients de la démocratie et les risques d’échec aux élections. Largement axé sur le djambe (que l’on peut traduire par sorcellerie) des Maka au Cameroun, l’ouvrage évoque également les sangomas sud-africains que les gouvernements noirs essaient d’associer à leur action pour sensibiliser les populations noires à certaines campagnes de santé. Une mine pour les chercheurs et les curieux !

Sorcellerie et politique, la viande des autres, Peter Geschiere, Karthala, 300 pages.

Geneviève Fidani


Moyen-Orient, état de crise(s)

(MFI) Ce livre est issu d’une rencontre, celle survenue, au printemps 2001, entre les historiens Gérard D. Khoury et Jean Lacouture, et le dirigeant libanais Ghassan Tuéni. Au départ, un constat : pourquoi le monde arabe, qui rayonne sur le monde pendant plus de six siècles avant de s’assoupir, n’a-t-il connu au 20e siècle qu’élans éphémères et brusques retombées ? Pourquoi stagne-t-il dans une morosité crispée ? Telle est la somme de questions que ce livre, transcription d’un très long entretien, entend passer au crible, en retraçant les grandes étapes du siècle écoulé : naissance des Etats du Levant, luttes d’indépendance, création de l’Etat d’Israël, succession des conflits palestino-arabes, guerre du Golfe, Intifada, 11 septembre... Sa richesse tient à la double implication de ses protagonistes, notamment celle de Ghassan Tuéni, qui n’hésite pas à enrichir la vision synthétique des historiens de son point de vue de témoin engagé. Un siècle pour rien ? Le titre lui-même sonne d’une façon étrangement optimiste, une fois le livre refermé.

Un siècle pour rien, Jean Lacouture, Ghassan Tuéni, Gérard D. Khoury, Le livre de poche, 400 pages.

Elisabeth Lequeret


Cinéma africain

(MFI) Cinquante ans déjà ? De fait, un demi-siècle s’est écoulé depuis la réalisation du court métrage Afrique-sur-Seine, qui marque le début officiel des cinématographies africaines. Tandis que l’Afrique se cherche aujourd’hui de nouvelles voies artistiques (dont beaucoup passent par la vidéo), ce livre imposant se propose de revisiter son histoire cinématographique, chaotique et singulière, à travers des textes essentiels parmi lesquels se signalent quelques plumes majeures, celle du théoricien André Hennebelle ou du Tunisien Férid Boughedir. A signaler aussi, deux beaux textes signés Gaston Kaboré et Idrisssa Ouedraogo.

Afriques 50 : singularités d’un cinéma pluriel, Collectif sous la direction de Catherine Ruelle, L’Harmattan, 330 pages.

E. L.


La passion dans tous ses états

(MFI) Ce livre s’ouvre sur une anecdote : celle de la marche de Fabrice vers sa bien-aimée Béatrice. Pour lui, elle a tout quitté : mari, enfants, travail, amis. Pour elle, il est prêt à tout abandonner, à se débarrasser de son ancienne vie comme d’une peau morte. Histoire vraie ou apocryphe, peu importe. « Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre ! » : le cri de détresse du héros proustien trahi par ses propres sentiments, par lequel s’ouvre le premier chapitre du livre, donne le cadre. Ce dont le psychiatre Roland Gori nous entretient dans ces pages, ce n’est pas de l’amour ni même du sentiment amoureux, mais de la passion. Jalousie, haine, ignorance : tous ses mécanismes sont ici étudiés dans le détail, dans le sillage des écrits de Freud et du grand psychiatre Clérambault. La passion peut-elle passionner ? Affirmatif.

Logique des passions, Roland Gori, Champs Flammarion, 295 pages.

E. L.




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