Islam : les voix de la réforme
(MFI) Bien sûr, ces musulmans-là ne font pas la une des journaux. Et pourtant, il serait temps de s’y intéresser, au lieu de toujours ressasser les mêmes antiennes sur l’islam, le fondamentalisme et ses dérives terroristes. Ces musulmans-là ont le sens critique. Depuis plus d’un siècle et demi, ils tentent de remettre en question certains dogmes islamiques en pointant leur irrationalité, leur contingence et l’opportunisme des califes et autres despotes qui les entretiennent depuis quatorze siècles. Certains de ces penseurs ont disparu mais beaucoup tentent encore, aujourd’hui, de faire entendre leur message : pour sortir les sociétés musulmanes du blocage, il faudrait admettre que le Coran n’est pas « incréé », comme le veut l’orthodoxie, mais bien issu d’un terrain anthropologique et de circonstances historiques donnés, et, partant, en relativiser certains commandements. De même, disent-ils entre autres, la charia n’est pas un corpus divin mais bien un « slogan idéologique », une somme jurisprudentielle « inventée » par quelques oulamas aux premiers temps de l’islam et figée depuis lors. Le chercheur marocain Abdou Filali-Ansary a eu le génie de nous présenter une vingtaine de ces esprits brillants et courageux dans son dernier ouvrage intitulé Réformer l’islam ? A lire d’urgence.
Réformer l’islam ? Une introduction au débat contemporain, Abdou Filali-Ansary, La Découverte/Poche, 284 pages.
Sophie Boukhari
Ces enfants qui ont peur de tout
(MFI) Votre enfant a peur de tout et des autres, il a l’air gauche et gêné par son corps ; ou alors il est trop sage, parle peu et semble sans arrêt plongé dans ses mondes intérieurs. Bien sûr, c’est plus reposant qu’un bambin hyperactif ; mais pas pour autant moins inquiétant. C’est parce qu’on ne parle pas assez des enfants timides que la psychologue Emmanuelle Rigon leur consacre son dernier ouvrage. Pour expliquer aux parents concernés qu’il ne tient souvent qu’à eux d’aider leurs enfants à sortir de leur carapace et à s’épanouir. Exemples : Julia, 11 ans, refuse systématiquement de prendre le bus pour rentrer de l’école et exige que ses parents viennent la chercher. S’ils acceptent, il y a de fortes chances pour que Julia ne surmonte jamais sa peur des autres. Vittorio, 4 ans, est toujours en retrait et se fait tout petit. Pris en charge par un psychologue, il apprend que son papa avait peur de tout quand il était enfant, ce qui ne l’a pas empêché de devenir le grand homme qu’il vénère maintenant. La simple libération de la parole de son père lui a permis de surmonter ses inhibitions. Bianca, 23 mois, hurle quand on la laisse à la crèche puis passe la journée dans son coin. Or, il a suffi que ses parents, aux horaires chaotiques, lui disent chaque jour en la quittant à quelle heure ils viendraient la chercher pour qu’elle commence à surmonter ses angoisses.
J’ose pas, je suis trop timide, S’affirmer est un jeu d’enfant, Emmanuelle Rigon, Albin Michel, 218 pages.
S. B.
Développement durable : un concept à revoir ?
(MFI) Très dense, ce petit ouvrage s’attaque à un concept en vogue aujourd’hui, bien que souvent très flou : celui de développement dit « durable » ou « soutenable ». Du premier rapport « The limits to Growth » remis au Club de Rome en 1972 par un groupe de chercheurs du Massachusetts Institut of Technology, qui annonçait la nécessité de traiter le développement et l’environnement comme un seul et même problème, à l’idée de « décroissance » actuellement en débat dans les pays riches, en passant par les différentes théories économiques de la croissance : Franck-Dominique Vivien retrace ici de manière très didactique l’évolution de cette notion. S’il rend plus claire l’idée de « développement soutenable », son tour d’horizon permet aussi de constater les écarts dans les analyses et la définition d’objectifs auxquels sa concrétisation donne lieu. Si les uns pensent en effet que la croissance et l’accumulation du capital sont toujours indispensables pour y parvenir, les autres appellent au contraire à la remise en cause radicale des valeurs sociales dominantes… Finalement, « ce sont les rapports entre l’économie et les autres disciplines – sciences de la nature, sciences de l’ingénieur et sciences sociales – concernées par la problématique du développement soutenable, mais aussi les rapports entre l’économie et la politique, qui doivent être reconsidérés », conclut l’auteur, qui n’a pas choisi l’adjectif « soutenable » au hasard. Soulignant que celui de « durable » ne met l’accent que sur le seul problème de la durée du développement, il précise que la notion de « soutenabilité » permet, elle, de prendre en compte « d’autres questions relatives à la répartition des richesses entre les générations et à l’intérieur de chacune des générations ».
Le développement soutenable, Franck-Dominique Vivien, La découverte, 122 pages.
Fanny Pigeaud
Louis Chedid, paroles et musique
(MFI) Né en 1948 en Egypte, Louis Chedid a fait ses débuts sur la scène musicale parisienne en 1972 avec l’album Balbutiements. Dans ce petit livre élégant, la journaliste Brigitte Kernel retrace les épisodes marquants de la vie et de la carrière de l’un des plus fameux auteurs-compositeurs-interprètes français : enfance égyptienne, première guitare, vacances dans un petit cabanon du sud de la France et passion naissante pour le cinéma, jusqu’à ses derniers duos avec Matthieu, son fils. A cette biographie-express s’ajoute un choix de textes de chansons de Chedid : de « Anne ma sœur Anne » à « T’as beau pas être beau »…
Louis Chedid, Brigitte Kernel, Ed. Seghers, Collection Poésies et Chansons, 180 pages.
Elisabeth Lequeret
L’âge d’or des sciences arabes
(MFI) Quel point commun entre le perfectionnement de l’arithmétique décimale et de l’algèbre et l’invention de l’astrolabe ? Aucun a priori, sauf que dans ces trois domaines, de même qu’en botanique, en médecine ou en alchimie, c’est aux Arabes que le monde a longtemps dû ses plus décisives avancées. C’est un fait : du 8e au 15e siècle, la science se pense et s’écrit en arabe et en persan. Après avoir redécouvert l’héritage antique, les scientifiques du monde arabo-musulman déploient une intense activité dans tous les domaines. Avicenne, Al Biruni, Al Kwazarimi, leurs noms sont désormais connus. Mais sait-on qu’un geste aujourd’hui aussi banal que la palpation du pouls vient des médecins arabes ? Que l’alambic, inventé par le monde byzantin, dut à ces mêmes docteurs son perfectionnement ? Que l’encyclopédie Merveilles de la création et de l’étrangeté des êtres, célébrissime manuel de vulgarisation de la cosmologie, fut écrite par un savant irakien ? Ce petit livre concis et égayé d’illustrations vient fort à propos illustrer l’ouverture à Paris de l’exposition « L’âge d’or des sciences arabes ».
L’épopée de la science arabe, Danièle Jacquart, Découvertes Gallimard, 128 pages.
E. L.
|