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06/01/2006
0ù va le rap africain ?

(MFI) Où en est le rap africain ? Quinze ans après son arrivée à Abidjan, nombre de groupes se sont créés aux quatre coins du continent. Mais rares sont ceux qui subsistent et arrivent à développer une carrière internationale, à l’instar de celles des Sénégalais de Daara J et de Didier Awadi avec son groupe PBS Radikal. Tour d’horizon d’un mouvement qui fédère la jeunesse et permet d’aborder en musique les problèmes de société.

« Le rap, c’est la musique des jeunes voyous qui ne réussissent pas à l’école. » Les clichés ont la vie dure et les rappeurs n’échappent pas cette étiquette qui leur colle à la peau. Avec l’arrivée des chaînes de télévisions par satellite comme MTV, MCM ou Trace TV, la jeunesse africaine a été inondée d’images de jeunes Américains pour qui réussite sociale rimait avec flot de paroles. Pour les jeunes Ivoiriens, les premiers à vibrer aux sons des ghettos new-yorkais, le rap a d’abord été un phénomène de mode vestimentaire. « C’était l’époque du gansta rap, se souvient MC Claver, rappeur historique de la scène ivoirienne et fils de l’ancien président du Burkina Faso Maurice Yaméogo. C’était la rivalité entre les fils de bourgeois de Cocody et ceux des prolétaires d’Adjamé. A l’époque, tout était dans le style vestimentaire : grosses chaînes, survêtements dernier cri, baskets. La musique n’était alors qu’une pâle copie des productions américaines ».
Ce n’est qu’à son arrivée à Dakar que le mouvement acquiert sa maturité et prend une véritable identité africaine. Didier Awadi et son compère Doug E Tee créent les bases du rap africain avec Positive Black Soul. Ils s’expriment en wolof et marient les instruments traditionnels comme la kora ou le tama aux beats saccadés du hip hop. Dakar, qui compte plus de mille groupes de rap, est alors considéré jusqu’à New York comme la ville du renouveau du genre. Point d’orgue de son influence, le mouvement hip hop participe activement à la victoire du mouvement « Sopi » (« changement » en wolof) d’Abdoulaye Wade aux élections présidentielles de 2000.

Sur tout le continent

Quinze ans après son arrivée au bord de la lagune Ebrié, le mouvement a pris de l’ampleur à travers tout le continent et un circuit des festivals de hip-hop africains se monte depuis quelques années grâce aux financements de partenaires du Nord comme l’Agence intergouvernementale de la Francophonie, preuve d’une véritable reconnaissance institutionnelle qui permet une meilleure circulation des groupes. Ouaga Hip Hop, Gabao Hip Hop à Libreville ou les Hip Hop Awards de Dakar pérennisent l’énergie de ces musiques et démontrent qu’elles ne s’arrêtent pas au flot des paroles débitées par les rappeurs. C’est toute la culture hip hop qui y est représentée, du deejaying au graffiti, de l’atelier d’écriture au cours de breakdance.
Pour Ali Diallo, président de l’association Umané culture qui organise depuis 2000 le Ouaga Hip Hop, la programmation du festival répond ainsi à des critères bien précis. Les groupes qui se produisent à Ouagadougou doivent s’inspirer de la musique africaine (mélangée au rap américain) et chanter dans leur langue nationale. C’est ainsi que l’on a vu à l’occasion de la cinquième édition du festival les Camerounais de Negrissime, les Guinéens de Fac Alliance, les Burkinabè de Yeelen et Faso Kombat ou les Sénégalais de Dakar All Stars, fers de lances avec le Gabonais BaPonga et les Algériens de MBS de la nouvelle génération.
Si, pour les rappeurs anglophones, le rap est avant tout un mouvement festif, chez les francophones, il représente un véritable mouvement revendicatif. Didier Awadi, leader incontesté depuis dix ans du mouvement en Afrique francophone, vient de sortir un nouvel opus remarqué, Un autre monde est possible, dans lequel il parle de son engagement auprès du mouvement altermondialiste. Toujours en mouvement, le DJ Awadi entreprend depuis quelques mois un tour d’Afrique au cours duquel, entre chaque spectacle, il prend le temps de travailler avec les rappeurs locaux. Le projet s’intitule Présidents d’Afrique. Dans cet album à paraître en 2006, il met en paroles et en musique les discours de présidents africains marquants, de Sankara à Mandela en passant par Nasser ou Nkrumah.
Véritables ambassadeurs de la culture africaine, les Daara J enchaînent depuis cinq ans pas moins de 200 concerts par an aux quatre coins de la planète. Eux ont compris bien avant les autres que le rap seul, même africanisé, risquait de s’essouffler. En le mâtinant de reggae et de ragga, ils ont trouvé une alchimie qui fait mouche auprès de tous les publics. Car l’avenir du rap africain passera demain sans aucun doute par ces mélanges musicaux d’un genre nouveau.

Pierre René-Worms

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