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01/02/2001

Le tourisme solidaire, une manne pour l’Afrique ?

(MFI) Après avoir encouragé le développement des industries touristiques, de nombreuses agences de voyage découvrent que le touriste peut nuire aussi au développement social et économique d'un pays. Peut-être faudrait-il pratiquer cette activité autrement ?

Y aurait-il une place pour un tourisme solidaire comme il en existe une pour le commerce équitable ? La réponse est en suspens, mais l'augmentation de la part de l'écotourisme (10 à 15 % de croissance annuelle, selon l'Organisation mondiale du tourisme) dans les revenus générés par l'industrie touristique, indique que l'état d'esprit des voyageurs, a quelque peu changé durant cette dernière décennie. L'Afrique, ses espaces et ses sites préservés, ses cultures locales, est devenue le bénéficiaire naturel de cette forme de séjour. La tendance s'est déjà traduite par une augmentation du nombre de visiteurs: 24,9 millions en 1998 contre 13,8 millions, dix ans plus tôt. Même en tenant compte de facteurs tel que l'engouement suscité par l'Afrique du Sud de l'après-apartheid ou considérant la croissance générale du marché mondial, cette nouvelle attraction n'est pas à négliger. Il reste aux agences de voyages de s'adapter à des clients de plus en plus avertis et exigeants.
Une étude de l'institut Panos (Londres) distingue trois catégories sociales parmi les éco-touristes: l'expert, retraité d'une organisation internationale, aux moyens financiers confortables, fatigué des circuits traditionnels, adepte d'un « retour aux sources », avant d'être immobilisé par le grand âge; le diplômé de classe moyenne, écologiste, sensible aux problèmes économiques des pays du Tiers Monde et l'étudiant(e), à budget restreint, qui se construit un CV à partir de séjours à l'étranger et frotte sa jeunesse à la sauvagerie de la nature. Tous ceux-là rejettent le voyage « trop organisé ». Ils sont souvent à deux doigts de l'organiser eux-mêmes puisqu'aujourd'hui ils disposent des services divers proposés par Internet.

Eviter les grands chocs culturels

De nombreux entrepreneurs se sont lancés sur ce marché de l'écotourisme. Ils se présentent comme des spécialistes du trek, de la bicyclette, du bateau, de l'aventure. Ils ont constitué des petites structures, indépendantes, appartenant à des sociétés étrangères aux pays et dont le personnel d'encadrement est majoritairement occidental. Néanmoins, ils ont le souci d'opérer en limitant leur impact sur l'environnement et en évitant les chocs culturels trop violents. Ils essaient d'intégrer les communautés locales à leurs projets et s'assurent que celles-ci bénéficient directement du passage des touristes sur leur territoire: soit en sollicitant leur participation, en offrant des emplois, ou en contribuant à l'amélioration de leurs conditions de vie.
« Prenez uniquement des photos, ne laissez que vos empreintes de pas », c'est le slogan des associations des professionnels de l'écotourisme. Ils prônent auprès de leurs clients une charte de bon comportement: ne jetez pas de plastique ni de papier gras sur votre chemin, refusez l'achat de corail, de carapaces de tortue, de coquillages etc. ; la nuit, ils n'emploient que des lampes au kérosène pour ne pas avoir à utiliser de générateur qui troublerait les animaux de la savane, et encouragent à limiter la consommation d'eau puisque « elle est plus précieuse que l'or ». Ces listes de recommandations se doublent de conseils de respect à l'égard des populations locales. Mais, la suggestion ne peut éviter les chocs. Chocs culturels nécessaires des deux côtés… selon certains spécialistes: à charge que ces chocs puissent être compensés par des explications et dans la mesure du possible par un dialogue dans une langue commune. Ce qui reste à pratiquer ! Pourtant, il semble que les éco-opérateurs qui intègrent les visites et séjours au village dans leurs programmes, parviennent à un peu plus de compréhension. Certes, à la longue, un guerrier masaï ou un touareg portera chaussettes blanches et chaussures de tennis au lieu de ses « si » typiques sandales en pneu et en cuir, mais peut-être que l'argent aura permis aussi d'acheter médicaments et nourriture de complément. Le développement sera passé par là.

Marion Urban



Encadré 1
Le partage des bénéfices : voyagistes et pays d’accueil

(MFI) Les touristes viennent du Nord de l'hémisphère et, selon la Banque mondiale, 55 % des recettes du tourisme mondial reviennent au Nord. Ce taux est largement sous-estimé, selon les éco-opérateurs qui évaluent à 75 % les bénéfices des compagnies aériennes, chaînes hôtelières et voyagistes occidentaux. Toutefois de nombreux pays africains, comme la Tanzanie ou la Zambie, ont réussi à réduire ces fuites de capitaux, en privatisant des réserves naturelles et des zones de chasse, avec priorité aux nationaux et en imposant un système implacable de taxes d'exploitation pour les étrangers. En 1995, le Ghana a inauguré une attraction unique en Afrique: le passage suspendu de Kakum, à une trentaine de mètres, au-dessus de la forêt tropicale. Les recettes des droits d'entrée des visiteurs ont été multiplié par dix en trois ans. Une partie est reversée au Wildlife Department pour l'entretien des parcs. Quand l'Ouganda ouvre en 1993, le parc de la forêt de Bwindi, les autorités promettent 8 % des droits d'observation des gorilles aux villages voisins. Cinq ans plus tard, la part ainsi allouée a été réduite à la portion congrue. Le tourisme est aussi un gros gâteau qui attire les gourmands.

M. U.



Encadré 2
La difficile relation entre tourisme et économie locale

(MFI) « Il faut tout d'abord que les gens ouvrent les yeux sur la richesse de leur milieu. Aussi bien culturel que naturel. Qu'ils décident des priorités de leurs besoins, et apprennent à gérer les fonds que leur rapporte l'activité touristique ». L'animatrice de cette association de protection de la nature du Burkina-Faso a longuement peiné pour obtenir le consensus des villageois sur la meilleure façon d'appréhender la visite des touristes occidentaux. En effet, il n'est jamais évident de comprendre ce qu'il y a d'attractif pour l'« autre » dans les éléments qui constituent son quotidien, ni d'apprendre à respecter ces éléments et à en tirer profit. Enfance Tourisme Environnement s'est fixé pour but d'inculquer aux enfants des notions pour la sauvegarde de l'environnement et Edutour s'est donné pour vocation d'informer les adultes sur leurs potentiels touristiques. A l'autre bout du continent, en Tanzanie, la collaboration « communautés locales-investisseurs touristiques », est presque une obligation. Elle se pratique sous différentes formes : organisations non gouvernementales proposant des séjours et des randonnées dans les villages, tour-operators payant directement les familles qui acceptent d'accompagner les touristes, ou hôteliers construisant des dispensaires ou des systèmes d'adduction d'eau. « Nous ne voulons pas commettre les mêmes erreurs qu'au Kenya, assurait un responsable du groupe de l'Aga Khan, multiplier le nombre d'hôtels, amener des milliers de touristes, sans que les villageois ne profitent des bénéfices. L'activité "hors-sol" n'est plus d'actualité ».

M. U.





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