accueilradio  actualités  musique  langue française  presse  pro
radio
Liste des rubriques
MFI HEBDO: Culture Société Liste des articles

31/10/2001

Sophia au pays des patriarches

(MFI) Un père autoritaire, une fille rebelle, un retour au pays natal aux allures de cauchemar : ce sont les motifs autour desquels tourne Les Siestes Grenadine de Mahmoud Ben Mahmoud. L'occasion, pour ce réalisateur tunisien, auteur de deux beaux longs métrages, Traversées et Poussière de diamants, d'interroger la réalité de son pays.

Les Siestes Grenadine, drôle de titre pour un film. Titre bucolique, qui respire le farniente et la dolce vita tunisienne, pour une histoire traversée de bout en bout par les rapports de force, le choc des convoitises, la violence des sentiments. Un film noir comme les amitiés lorsqu'elles se brisent et volent en éclats sous le poids du temps, la folie du pouvoir et l'argent, qui corrompt tout. Siestes Grenadine, drôle de titre pour un film pas si drôle que ça, à la fois histoire d'amour, de nostalgie, d'espérances déçues. Une histoire d'amour : celle d'un homme, Wahid, pour sa fille, Sophia, enlevée à sa mère après un divorce difficile. Une histoire de nostalgie : après des années d'exil volontaire au Sénégal, taraudé par le mal du pays, Wahid décide de reprendre le chemin du pays natal.
Histoire d'espoir déçus, enfin, car les pays, comme les enfants, suivent leur chemin, qui n'est pas toujours celui que l'on attend. La Tunisie que découvre Wahid est à des années-lumière du pays de Cocagne qu'il s'inventait depuis Dakar. Ses repères ont fondu comme neige au soleil du miracle économique, ses valeurs sentent le rance. Même les amitiés ont du plomb dans l'aile, son meilleur ami tente de mettre le grappin sur ses biens et sur sa fille. Autour de Wahid, tout se fissure et s'écroule. Mais le motif principal des Siestes grenadine, son centre de gravité, se noue autour de l'affrontement entre ce patriarche et Sophia, à qui ses années sénégalaises ont donné l'avant-goût d'une liberté sans entraves. « Wahid découvre que son pays natal a complètement changé. Sa fille n'arrive pas à s'insérer. Il la place dans une ferme loin de Tunis, il veut la marier de force, alors qu'elle veut vivre sa vie » résume Hassan Daldoul, qui a produit le film.
Après sept ans de silence, Mahmoud Ben Mahmoud s'est attaqué à ce drame familial, beau prétexte pour dresser un tableau de la Tunisie d'aujourd'hui, de ses espoirs et de ses dérives. Car bien sûr, derrière l'affrontement de ces deux générations que tout (culture, désirs, ambitions) oppose, ce sont bien les contradictions et les impasses d'un pays que le réalisateur entend pointer. Sept ans, c'est à la fois beaucoup et très peu quand on sait les trésors de ruse, d'intelligence et de ténacité que doit déployer tout cinéaste du Sud pour boucler un film, faire face sur tous les fronts, venir à bout de la réticence des bailleurs de fonds, endormir la méfiance des banquiers, mettre en veilleuse les visées des censeurs, assumer les caprices des acteurs et autres vents mauvais.

Elisabeth Lequeret





retour

Qui sommes nous ?

Nos engagements

Les Filiales

RMC Moyen Orient

Radio Paris-Lisbonne

Delta RFI

RFI Sofia