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25/11/2002
Fest’Africa : 10 ans dans les étoiles

(MFI) Organisé depuis une décennie à Lille, dans le Nord de la France, ce festival de littérature africaine est devenu un rendez-vous de référence. Loin de s’arrêter à ce premier succès, Fest’Africa doit encore accoucher d’un projet grandiose : réunir, en 2003 sur le continent, le 3e Congrès des écrivains et artistes noirs, dont la dernière édition remonte à… 1959 !

Pour sa première édition, le festival comptait 3 auteurs participants… Près d’une décennie plus tard, ils étaient une trentaine d’écrivains à assister à la 9e manifestation de ce rendez-vous unique en son genre. Non seulement Fest’Africa est le seul festival en France entièrement consacré à la littérature d’Afrique et des Caraïbes, mais il connaît aussi un succès grandissant qui a largement dépassé le cadre de la région du Nord de la France, au point d’être désormais un lieu de ralliement international. En outre il faut bien mentionner cette autre caractéristique : c’est la seule manifestation culturelle d’une certaine ampleur, en France, à être entièrement conçue et gérée par des Africains.

Un festival entièrement animé par des Africains

Fest’Africa est né du pari lancé par de jeunes étudiants de l’école de journalisme de Lille. Parmi eux, Nocky Djedanoum, originaire du Tchad, et l’Ivoirienne Maïmouna Coulibaly deviennent la cheville ouvrière d’une toute petite structure (aujourd’hui encore celle-ci ne compte que trois permanents) qui aura réussi à mobiliser pour son projet de nombreux appuis, d’abord dans la région, puis par cercles concentriques jusqu’à l’Union européenne désormais l’un des principaux bailleurs de fonds. Aujourd’hui, le couple (qui l’est également à la ville) est à la tête d’une association prospère, qui jouit d’une bonne notoriété et qui a démontré deux qualités essentielles dans ce secteur de l’entreprenariat culturel : la ténacité sur le long terme, et la capacité à lancer d’année en année de nouvelles idées. Le succès a suivi et les écrivains d’Afrique, du Maghreb ou des Caraïbes, dont certains sont devenus de vieux habitués, montrent un plaisir constant à se retrouver dans la chaude ambiance lilloise, pour débattre, échanger sur leur métier, et rêver à des aventures communes.

L’une de celles-ci a constitué un tournant dans la vie du festival. Traumatisé par le drame du génocide au Rwanda, Nocky Djedanoum conçoit avec quelques amis un projet aussi ambitieux que novateur : il propose aux écrivains, ainsi qu’à d’autres créateurs africains, plasticiens, metteurs en scène ou cinéastes, de se rendre ensemble au Rwanda pour prendre conscience de cette tragédie et en témoigner. Ce sera, à partir de 1998, l’opération Rwanda : écrire par devoir de mémoire, qui devient un phénomène éditorial sans précédent, puisqu’une dizaine d’auteurs (notamment Boubacar Boris Diop, Tierno Monenembo, Véronique Tadjo, Abdourahmane Wabéri…) publieront finalement des livres, fictions ou essais, illustrant leur confrontation avec la réalité rwandaise. Le retentissement dans la presse française est important. Il conforte la réputation de l’association Arts et Médias d’Afrique (animatrice de Fest’Africa) et son ambition d’être un catalyseur d’énergies et de projets autour de la littérature africaine. A un degré plus modeste, Fest’Africa renoue quelques années plus tard avec un projet d’édition collectif : c’est le livre Amours de Villes, publié en 2001 aux éditions Dapper, qui réunit des contributions d’écrivains sur le thème de la ville.

Pendant ce temps le festival poursuit sa route. Après l’édition 2000 qui connaît sa plus large participation (une quarantaine d’écrivains), l’année 2001 est un moment important avec les hommages croisés à Mongo Béti et Léopold Sédar Senghor, disparus la même année. En novembre 2002, le festival a proposé de réfléchir sur un thème assez provoquant, si l’on pense aux tabous encore en vigueur en Afrique : celui de la sexualité dans la littérature et la création. Les participants se passionnent pour le sujet. « C’est la première fois, me semble-t-il, que les écrivains parlent de sexualité entre eux » souligne Nocky Djedanoum, en signalant ce paradoxe : à quelques exceptions près, la littérature africaine reste très pudique, alors que « dans les langues africaines les gens s’expriment de manière très crue là-dessus… mais quand on passe à l’écriture et au français, c’est fini ! »

Cap sur le 3e Congrès des écrivains, 50 ans plus tard…

L’édition 2002 à peine achevée, s’avance une année symbolique : en 2003 ce seront les 10 ans du festival. Et cet anniversaire doit être l’occasion de lancer une entreprise d’une toute autre ampleur. Comme au Rwanda voici quelques années, le festival veut se décentraliser, cette fois-ci au Tchad. Avec une devise « Fest’Africa sous les étoiles », et une ambition : faire renaître le fameux Congrès des écrivains et artistes noirs, organisé en 1956 à la Sorbonne, sous l’égide de la revue Présence africaine. Y figuraient tous les grands noms de la littérature africaine de l’époque, aux côtés des Alioune Diop, Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire et de quelques représentants afro-américains ou caribéens. Cette effervescence historique autour de la valorisation de la culture négro-africaine allait se prolonger en 1959 avec le 2e congrès du même nom, tenu à Rome. Le mouvement allait ensuite suivre d’autres chemins, et l’idée à la fois audacieuse et provocante de Fest’Africa est de rééditer l’exercice, dans un tout autre contexte, et près d’un demi-siècle après. « Nous voulons examiner à cette occasion l’évolution de la littérature africaine… et ramener le festival en Afrique, en examinant des questions comme la situation de la lecture en Afrique, ou encore s’interroger sur ce qu’est devenu le rapport de la Caraïbe à l’Afrique… », indique Nocky Djedanoum. En mettant sous les feux du festival son pays, le Tchad, l’intention de l’animateur du festival est aussi de faire connaître la culture tchadienne et de créer un engouement chez les jeunes Tchadiens autour du livre et de la lecture. Le rendez-vous est pris pour octobre 2003, il pourrait voir la participation, c’est du moins le souhait des organisateurs, d’une centaine d’écrivains.

Thierry Perret

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