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06/02/2003
Les dix meilleurs romans de 2002

(MFI) Ils s’appellent Laurent Gaudé, Philip Roth, Pascal Quignard, Abdellatif Laâbi,Yvonne Vera… Par delà leurs différences, ces romanciers et quelques autres, nous ont offert en 2002 des bonheurs de lecture à nuls autres pareils. Genres dominants ? L’amour, la famille, l’enfance et l’histoire. Retour sur dix ouvrages, très appréciés, du millésime 2002.

Et pour commencer, les trois livres de Pascal Quignard, Les ombres errantes, Sur le Jadis et Abîmes, publiés chez Grasset. Oeuvre atypique, elle a valu à son auteur un prix Goncourt, très contesté par quelques membres éminents de l’Académie Goncourt. Car ces ouvrages, ni romans, ni essais, sont inclassables. Qu’importe. Quignard a ciselé en orfèvre, en érudit jamais ennuyeux, un dédale de textes courts qui posent la grande question du temps. Parcourant époques et civilisations, il nous fait découvrir des poètes inconnus, un paysage, une œuvre, évoque la philosophie chinoise ou la pensée arabe….Errez avec lui à travers ces fragments sans vous soucier de leur cohérence. A un moment leur unité apparaîtra, évidente. Superbe !
Egalement présent au palmarès, La tache (Gallimard) de l’Américain Philip Roth, prix Médicis étranger et dernier volet de la trilogie consacrée à une Amérique face à ses démons. Mort le triomphalisme américain, le temps du doute est arrivé. Ainsi, tout réussit au héros de Roth, universitaire exemplaire et plein d’assurance, jusqu’au jour où il est mis à la retraite pour avoir traité de « nègres » des étudiants afro-américains. Refus de s’expliquer, démission et désir de vengeance. Sa femme en meurt. En fait, victime du politiquement correct et du modèle social américain, l’odieux personnage cache un secret. Il n’est pas juif comme les gens l’ont toujours cru mais noir très très clair. Pourquoi ce refus d’assumer son origine ? Et cette imposture ? Pour élucider ce mystère, Roth bâtit une fresque foisonnante et passionnante. Un chef d’œuvre.
Autre roman, meilleur parmi les meilleurs, La mort du roi Tsongor (Actes Sud), de Laurent Gaudé. Récompensé par le prix Goncourt des lycéens, cette histoire d’amour et de pouvoir, en forme d’épopée inspirée tout à la fois de la Geste de Segou et de l’Illiade, raconte la guerre terrible que se sont livrés les prétendants de la fille du roi de Massaba, une terre située quelque part au cœur d’une Afrique ancestrale. L’auteur qui n’a jamais mis les pieds en Afrique fait preuve d’une imagination extraordinaire et parvient à faire passer dans ce roman éblouissant le souffle de la tradition orale. Bravo.
Autre élu de l’année, Le fond de la jarre (Gallimard) de l’écrivain marocain Abdellatif Laâbi. Ni thèmes éventés, ni poncifs usés comme on les trouve dans les récits sur l’enfance. Là, l’auteur nous invite à Fès dans la maison familiale et c’est Namouss, l’enfant – son double - qui se souvient. Sur le ton de la confidence, il raconte l’école, les parents, les copains, les voisins, les frasques, les premières découvertes, les secrets. Sans folklore. Avec poésie et humour. Et juste un peu de cette mélancolie pleine de charme qui naît de l’évocation des lieux d’une époque révolue. Un livre intime et exigeant.
A ne pas rater la révélation de l’année, la zimbabwéenne Yvonne Vera, auteur d’une œuvre riche et engagée, dont le sixième roman Papillon brûlé (Fayard) est le premier à être traduit en français. Mis en scène dans le décor de misère et de ségrégation du Zimbabwe colonial, le roman retrace l’histoire tragique d’une femme éprise de liberté qui se rebiffe contre l’oppression de la tradition patriarcale et coloniale. Il faut lire absolument, « cette voix des sans voix », qui sait écrire avec force la tragédie poignante de son pays et de ses femmes.
Autre coup d’essai tel un coup de maître, Triomf (Editions de l’Aube), premier roman de la Sud-Africaine Marlene Van Niekerk. Prix Noma 1995, cette comédie de moeurs raconte l’apartheid vu du côté des petits Blancs. Dénonciation féroce d’un système générateur de crétinisme et de narcissisme autodestructeur, ce portrait d’une famille de paumés, incestueuse et confite dans l’alcool, atteint des sommets en matière d’écriture. Un grand moment de littérature.
Et revoilà Patrick Chamoiseau, chantre de la créolité, merveilleux conteur au français délicieusement « chamoisisé » de la vie des petites gens de la Caraïbe. Son cinquième roman, Biblique des derniers gestes (Gallimard) relate l’extraordinaire destin de Balthazar Bodule-Jules qui décide de mourir non par désespoir mais parce que la colonisation a réussi. A travers les souvenirs des 727 femmes que le vieil indépendantiste a aimées, le narrateur reconstruit sur le mode héroïco-fantastique cette vie consacrée aux désirs et aux guerres anticoloniales. Un bijou, luxuriant, magique, du Chamoiseau pur jus.
Grec de naissance et français d’adoption, Vassilis Alexakis tel un Ulysse moderne se plaît à se promener d’une langue et d’un pays à l’autre. Il a bien raison. Car Les mots étrangers (Stock) sont une merveille de drôlerie et de sérieux. Il conte l’histoire d’un narrateur – lui ? – qui se met en tête d’apprendre le sango, une langue africaine parlée en Centrafrique. Pas par hasard. En fait ce pays est inscrit dans son passé familial. Et apprendre sa langue c’est le comprendre en profondeur au fil des mots. Une odyssée originale.
D’un style nouveau, le dernier Nadine Gordimer, Un amant de fortune (Grasset). A travers une passion singulière entre une Blanche, fille d’un riche homme d’affaires et un mécanicien musulman immigré, la romancière sud-africaine explore les relations que la mixité a rendu possibles en Afrique du Sud. L’aventure du couple prend une tournure inattendue lorsque Abdou se voit refuser l’autorisation de séjourner légalement dans le pays. Il doit rentrer chez lui. Julie le suit. Elle s’épanouit au contact de sa nouvelle famille. Mais Abdou, lui, ne rêve que de départ pour l’Amérique. Ce sera pour le couple l’occasion de reconnaître leurs différences, celles-là même qui les ont attirés l’un vers l’autre.
Difficile voire impossible de résumer Assam (Albin Michel), le récent roman de Gérard de Cortanze. Ample, flamboyant, il vous emporte au gré des aventures de l’aiëul de l’auteur, Aventino Roero di Cortanze. Obligé de fuir son château piémontais parce qu’un certain Napoleone Buonaparte pénétrant avec son armée en Italie chamboule sa vie, l’aristocrate se retrouvera à Assam dans les Indes orientales où il goûtera à tous les plaisirs de l’Orient, qu’il nous fera partager avec délices. Un roman épique au goût d’épices qui vaut le détour.

Elisabeth Nicolini

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