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31/10/2003
Pillage de la RDC : l’union fait la force

(MFI) Les experts des Nations unies qui travaillent, depuis trois ans, à mettre au jour la face cachée du pillage des richesses de la République démocratique du Congo risquent de se trouver confrontés « à la raison d’Etat ». Aussi ont-ils pris la précaution d’établir une coopération avec l’OCDE qui lutte contre le blanchiment de l’argent sale.

L’insécurité règne toujours dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) et le pillage des richesses minières continue d’alimenter les trafics d’armes. Ce lien direct est au cœur du dernier rapport des experts des Nations unies (Onu), remis à la mi-octobre au Conseil de sécurité, qui doit à présent décider de la marche à suivre. Mais d’ores et déjà, les experts qui travaillent depuis trois ans pour découvrir la face cachée des pilleurs – gouvernements, sociétés ou simples privés –, et qui risquent de se trouver confrontés « à la raison d’Etat », ont pris la précaution d’établir une coopération avec l’OCDE (1) qui se bat contre le blanchiment de l’argent et cherche à moraliser les activités des sociétés multinationales enregistrées dans ses pays membres.
Présidé par l’Egyptien Mahmoud Kassem, le groupe d’experts avait déjà créé la sensation en citant, en 2002, les noms de ceux qu’il estimait impliqués dans le pillage ; sa longue liste comprenait aussi bien des personnalités congolaises qu’ougandaises, rwandaises ou du Zimbabwe. Cette fois-ci, pour son ultime rapport, le groupe pourrait être empêché de divulguer publiquement l’identité de ceux qui continuent à y être mêlés, officiellement pour ne pas mettre en péril le processus de réconciliation en cours, même si les membres du Conseil de sécurité en auront la primeur. Leur rapport reste toutefois explicite sur les démarches à suivre.
Le groupe d’experts précise ainsi qu’il s’est mis dès mars dernier en rapport avec le Comité de l’investissement international et des entreprises multinationales (Cime), instance chargée de contrôler le respect des principes directeurs établis par l’OCDE à l’intention des multinationales. En avril, le groupe a participé à une table ronde du Cime consacrée à l’applicabilité de ces principes au monde en développement et aux régions en proie à des conflits. Les experts de l’Onu ont ensuite conclu un arrangement avec le Cime pour transmettre leurs informations sur les entreprises, sous réserve de la protection de leurs sources. Dans ce cadre, 13 dossiers concernant 18 sociétés enregistrées en Belgique, en Allemagne et en Grande-Bretagne ont été transmis.


Démanteler les grandes entreprises minières

Concernant l’Afrique, les experts ont identifié les États à travers lesquels des marchandises en provenance de la RDC étaient susceptibles de transiter – Burundi, Rwanda, Ouganda, Zimbabwe, Angola, République centrafricaine, Kenya, Mozambique, République du Congo, Tanzanie et Zambie – et les a interrogés sur les mesures prises pour endiguer l’exploitation illégale des ressources de la RDC. Seuls le Rwanda, l’Ouganda, la Zambie et le Zimbabwe ont répondu.
L’Ouganda a indiqué que la création de la Commission Porter ainsi que son rôle positif et sa participation au processus de paix dans la région constituaient les mesures les plus importantes qu’il avait prises. Le Rwanda a souligné que le retrait de ses forces de RDC pouvait être considéré comme la principale mesure prise mais s’est refusé à formuler des recommandations. Le Zimbabwe a relevé qu’il n’était pas « à même de prendre des mesures quelconques... puisque ni lui-même [l’Etat], ni ses ressortissants n’étaient ou ne sont impliqués dans des transactions illégales en RDC ». Quant à la Zambie, elle a indiqué qu’en dehors des contrôles administratifs et du contrôle de sécurité à la frontière, aucune mesure supplémentaire n’avait été prise. Quant aux autorités de la RDC elles-mêmes, elles étudient toujours la possibilité de saisir le Parlement sur la création d’une commission chargée de réviser toutes les concessions et contrats signés depuis 1997, mesure recommandée dans les deux précédents rapports de l’Onu.
Les experts préconisent à présent le démantèlement des grandes entreprises d’exploitation minière détenues par l’État telles que la Gécamines et la Minière de Bakwanga (MIBA). « Ces entités, d’une inefficacité flagrante, constituent traditionnellement les véhicules par lesquels les richesses tirées des ressources congolaises ont été détournées de leurs propriétaires légitimes, à savoir le peuple congolais », soulignent-ils. Ils estiment qu’il ne serait pas rentable de chercher à rétablir une gestion rationnelle de ces entreprises vu l’immensité de la tâche ; ils conseillent à Kinshasa de se dessaisir de ces entreprises soit sous leur forme actuelle soit en partie, selon l’intérêt manifesté par des investisseurs potentiels, avec l’assistance de la communauté internationale.
Les experts réaffirment que l’exploitation illégale des ressources demeure l’une des principales sources de financement des groupes qui tentent de perpétuer le conflit, en particulier dans les régions de l’Est et du Nord-Est de la RDC, estimant « qu’à l’heure actuelle, une grande partie de l’exploitation des ressources est centrée sur l’or et les diamants, qui présentent une forte rentabilité par unité de poids, sont aisément transportables et peuvent être utilisés à la place de devises dans les transactions ». « Faute d’un gouvernement fort, central et démocratiquement élu qui ait le contrôle de son territoire, l’exploitation illégale se poursuivra et continuera d’engendrer et d’attiser les conflits dans la région », ajoutent les experts, se félicitant toutefois des efforts accomplis vers une transition démocratique.
Pour eux, la communauté internationale doit aider le pays sur le plan technique et financier, le tout dans la transparence à tous les niveaux. Les experts incitent donc la Banque mondiale et le Fonds monétaire international à faire de l’adoption de l’initiative « Publiez ce que vous payez » une condition d’octroi de futurs financements à la RDC et recommandent la création d’un fonds des ressources naturelles et d’audit au sein de la cour des comptes. Mais la priorité demeure pour eux d’enrayer, et si possible, éradiquer, le trafic d’armes à destination de la RDC car « c’est là le maillon le plus faible de l’engrenage, et c’est là que la communauté internationale peut intervenir efficacement ».

(1) L’Organisation de coopération et de développement économique rassemble les 30 pays les plus développés de la planète.

Marie Joannidis

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