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30/04/2004
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FMI-Banque mondiale : l’Afrique s’impatiente
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(MFI) Les pays d’Afrique sub-saharienne sont à la traîne dans la lutte contre la pauvreté, et pourraient donc ne pas atteindre le premier des objectifs de développement du Millénaire (ODM) – à moins de rétablir la paix un peu partout sur le continent et d’accélérer fortement leur croissance d’ici 2015.
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Les pays d’Afrique sub-saharienne sont à la traîne dans la lutte contre la pauvreté, constate un nouveau rapport de la Banque mondiale (BM) présenté à la veille des réunions d’avril à Washington de la banque et du Fonds monétaire international (FMI), en même temps que les dernières prévisions du FMI qui indiquent que le continent devrait largement bénéficier de l’impact de la reprise mondiale. Grâce à la forte croissance des économies asiatiques, la proportion de la population mondiale vivant en extrême pauvreté aura été réduite pratiquement de moitié entre 1981 et 2001 – de 40 % à 21 % – mais l’incidence de la pauvreté n’a que peu baissé dans d’autres régions, et a même augmenté en Afrique, où le premier des huit ODM, la réduction de moitié de la pauvreté entre 1990 et 2015, pourrait bien être hors d’atteinte.
Alors qu’en Asie de l’Est, le PIB par habitant a triplé en vingt ans selon le rapport, celui de l’Afrique a chuté de 13 %, et l’incidence de la pauvreté a augmenté de 42 % à 47 %, le nombre d’Africains vivant avec moins d’un dollar par jour ayant pratiquement doublé, de 164 millions à 314 millions. « Il est vraisemblable que le premier des ODM sera réalisé, mais pour que tous les ODM soient atteints dans tous les pays, il faudra consentir une aide beaucoup plus considérable, libéraliser davantage les échanges et généraliser les mesures de réformes », a constaté François Bourguignon, le nouvel économiste en chef de la BM.
Pour la Banque mondiale, la quasi-stagnation de l’aide n’est pas acceptable
Le président de la banque, Jim Wolfensohn, a souligné que la quasi stagnation de l’aide au développement contribue à l’instabilité politique dans le monde – avec le sous-développement et le manque d’éducation – et n’est pas acceptable alors que les dépenses militaires atteignent des niveaux sans précédent. « Nous dépensons 900 milliards par an pour la défense… et entre 50 et 60 milliards pour le développement », a-t-il dit, ajoutant que si les pays riches avaient consacré 900 milliards au développement, « nous n’aurions probablement pas besoin de dépenser plus de 50 milliards pour la défense ». Jim Wolfensohn a encore une fois rappelé le « consensus » de Monterrey (2002) qui proclamait un partenariat entre pays riches et pauvres, et la promesse des premiers d’augmenter sensiblement leur aide publique afin de soutenir les efforts des seconds. Il a aussi insisté sur la nécessité d’une ouverture rapide des marchés des pays industrialisés aux produits exportés par les pays en développement.
Les porte-paroles africains ont abondé dans le même sens, soulignant notamment que les pays de l’OCDE consacrent cinq fois le montant total de l’aide publique – 58 milliards de dollars en 2002 – aux subventions accordées à leur agriculture, estimées à 300 milliards de dollars par an. « Nous sommes consternés par un tel manque de cohésion entre les politiques poursuivies par les pays développés », a commenté Elzoubier Ahmed El Hassan, le ministre soudanais des Finances.
Dans son communiqué final, le Comité financier et monétaire international (CFMI), qui regroupe 24 ministres représentant les pays riches et pauvres, s’est félicité des mesures adoptées par le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) et par l’Union africaine « en vue d’améliorer la gouvernance et d’éradiquer la corruption ». Le comité, présidé par le Britannique Gordon Brown, a appelé la communauté internationale à « accroître son assistance de manière concertée, notamment par l’assistance technique, les conseils de politique économique, ainsi qu’une aide accrue et plus efficace, y compris sous forme de dons, d’allègements de dettes et d’une plus grande ouverture des marchés des pays industrialisés ».
Le FMI et la BM vont étudier, d’ici la réunion annuelle début octobre, les moyens de renforcer l’action du FMI en faveur des pays à faible revenu, la collaboration entre les deux institutions et des solutions pour assurer la viabilité de la dette des 27 pays qui ont bénéficié de l’initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE). L’accès à ce processus d’allègement pour 11 autres pays sortant de conflits sera également examiné.
Les ministres africains, qui font campagne pour une meilleure représentation du continent dans les conseils d’administration des deux institutions, ont tenu à présenter les problèmes de l’Afrique à Rodrigo Rato, l’ancien ministre espagnol des Finances, pressenti par l’Union européenne pour succéder à l’Allemand Horst Koehler à la tête du FMI.
Quant aux dernières prévisions du FMI, qui tablent sur une reprise accélérée de l’économie mondiale à 4,6 % en 2004 et 4,4 % en 2005, elles indiquent un rebond assez marqué pour l’Afrique sub-saharienne dont le taux de croissance dépassera 5 % cette année et atteindra 7 % en 2005. Les économistes prévoient même pour la Zone Franc des taux de près de 8 % et 11 %, mais soulignent que les perspectives varient fortement d’un pays à l’autre.
De notre envoyé spécial à Washington,
Jan Kristiansen
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