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01/10/2004
FMI : le pétrole, une menace pour la reprise ?

(MFI) L’économie mondiale pourrait connaître au final une croissance de 5 % en 2004, le taux le plus élevé depuis près de trente ans, à moins que de nouvelles turbulences sur le marché pétrolier ne viennent perturber les prévisions plutôt clémentes du FMI, qui estime que la reprise économique s’est bien consolidée au cours de l’année écoulée.

Le prix du pétrole venant de toucher la barre de 50 dollars le baril pour le brut léger américain, l’économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI), Raghuram Rajam, a admis dans une interview que le pétrole cher peut freiner la reprise, mais a mis en garde contre toute réaction « hystérique » qui pourrait saper la confiance. Pour les experts du FMI, le marché pétrolier reste vulnérable à des « chocs » imprévus, et chaque hausse durable du prix de vente de 10 dollars par baril est susceptible de réduire la croissance de 0,5 %.
Dans son rapport semestriel sur les perspectives économiques mondiales, publié à la veille des réunions annuelles à Washington début octobre du FMI et de la Banque mondiale, le Fonds considère que l’expansion restera solide, même si les principales locomotives de la croissance, les Etats-Unis mais aussi la Chine, se sont quelque peu essoufflées depuis le premier trimestre 2004. Ce qui explique, selon les prévisionnistes, que la croissance mondiale devrait retrouver un niveau plus modéré, de l’ordre de 4,3 % en 2005. Ils ont, en effet, revu légèrement à la baisse l’expansion de l’économie américaine, à 4,3 % en 2004 et 3,5 % en 2005, qui serait dépassée de peu cette année par celle du Japon (4,4 % suivi de 2,3 %), sorti enfin d’une décennie de marasme. La reprise aura aussi pris racine en Europe, où une croissance cependant toujours modérée de 2,2 % en moyenne est attendue en 2004/05 dans les pays de la zone euro, avec des performances nettement meilleures en Espagne et en France. La forte croissance dans les économies émergentes en Asie aura été poussée par la Chine, qui devrait connaître une baisse de régime à 7,5 % en 2005 après deux années à 9 %, et par l’Inde, l’autre géant de la région, dont l’économie tourne autour de 6,5 %.


Accélération africaine malgré la « catastrophe » au Soudan et « l’effondrement » du Zimbabwe

Le FMI a par contre revu à la hausse ses prévisions pour l’Afrique sub-saharienne, à 4,6 % en 2004 et 5,8 % en 2005, grâce, estime-t-il, à une stabilité économique et politique accrue dans la région, mais aussi en raison de l’augmentation de sa production de pétrole et la reprise de la production agricole après la sécheresse de 2003. Le Fonds a cependant tempéré son optimisme en soulignant que l’évolution dans certains pays, « notamment la catastrophe humanitaire dans l’ouest du Soudan et l’effondrement économique au Zimbabwe », constitue une « préoccupation sérieuse ». Il rappelle que les conflits armés et la corruption reflètent des défaillances de la gouvernance et freinent la croissance. « Néanmoins, les perspectives pour une grande partie de l’Afrique apparaissent plus favorables que depuis de nombreuses années, ce qui constitue un aspect particulièrement positif de la situation actuelle. »
La forte montée du prix du pétrole, ajoutée à l’augmentation de la production de pays comme l’Angola, le Tchad et la Guinée Equatoriale, a bénéficié aux producteurs africains, gonflant le PIB de ces pays – dont le Nigeria, le Gabon et le Congo – de plus de 3 %. Le brut plus cher n’a évidemment pas arrangé les affaires des pays africains importateurs. Mais la hausse des cours des matières premières, dont l’indice a grimpé de 27 % depuis le début de l’année sous l’impulsion surtout d’une forte demande chinoise, a plus ou moins compensé le surcoût des produits pétroliers importés, surtout pour les exportateurs de minerais du continent, notamment la Zambie. Le ralentissement prévu de la demande chinoise constitue un facteur d’incertitude, note le rapport. Pour quelques pays, le gonflement de la facture pétrolière représente une perte nette, combiné avec des facteurs particuliers, comme, pour la Côte d’Ivoire, la chute des cours du cacao. Le Kenya, la Guinée Bissau et Djibouti sont ainsi parmi les perdants, selon le FMI.


Le conseil : mettre de côté les gains inattendus pour parer à de futures fluctuations

Le Fonds conseille fortement aux pays africains ayant bénéficié de l’amélioration de la conjoncture pour les matières premières de mettre de côté leurs gains inattendus pour parer à de futures fluctuations des cours, et demande à tous les pays du continent de redoubler d’efforts pour assurer la stabilité économique, réduire les interventions de l’Etat dans l’économie et encourager l’expansion du secteur privé tout en accentuant les réformes des institutions. Le FMI se félicite des progrès de plusieurs pays africains vers une meilleure gouvernance globale et considère « encourageant » le fait que 23 pays ont désormais souscrit au Mécanisme africain de contrôle par les pairs, institué dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique. Le Fonds réaffirme avec force que la communauté internationale doit jouer « un rôle clé dans le développement de l’Afrique, notamment en réduisant les restrictions aux importations en provenance des pays en développement, en diminuant les subventions agricoles, en augmentant les flux d’aide et en continuant à alléger la dette ».
Les pays pétroliers africains connaîtront des taux de croissance exceptionnellement élevés : la Guinée Equatoriale détiendra le record, avec 13,6 % en 2004 et 48,1 % prévus pour 2005. Le Tchad verra des taux de 30,8 % et 12 % respectivement, et ceux de l’Angola atteindront 11,2 % et 15,5 %. En Afrique du Sud, le géant économique du continent, la croissance restera modérée à 2,6 % et 3,3 %, sous l’effet notamment de la forte appréciation de sa monnaie contre le dollar. Fait notable: malgré la crise, la Côte d’Ivoire renoue avec la croissance, à 1,7 % en 2004 suivi de 4,3 % en 2005, et les économies de la Zone franc CFA devraient enregistrer des taux de 6,8 % et 10,7 % respectivement.

Jan Kristiansen




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