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22/12/2005
OMC : des progrès mais l’Afrique reste sur sa faim

(MFI) Les ministres des 149 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont évité in extremis un autre échec cuisant en adoptant à Hong-Kong un compromis remettant sur les rails les négociations en cours du cycle de Doha. Il ne s’agit cependant que d’un programme de travail devant mener d’ici fin 2006 à un accord final favorable aux plus pauvres, notamment africains.

A l’issue de la conférence, son président, John Tsang, ministre du commerce et de l’industrie de Hong-Kong, s’est félicité des acquis du document final : « Nous avons une date butoir pour mettre fin à toutes les subventions à l’exportation dans le domaine agricole, même si c’est sous une forme qui ne plaira pas à tout le monde ; nous avons un accord sur le coton ;(et) nous avons un accord solide sur l’accès sans droits de douanes ni quotas pour les 32 pays membres les moins avancés (PMA) ». En outre, a-t-il précisé, la conférence a élaboré « un cadre significatif » pour les réductions tarifaires des produits agricoles et industriels, qui restent à négocier, et elle est tombée d’accord « sur un texte concernant les services qui indique positivement le chemin à suivre. » Pourtant, les modestes progrès acquis à Hong-Kong n’éloignent pas la menace d’une marginalisation durable du continent à l’heure de la mondialisation - alors que les Africains représentent 14 % de la population de la planète et que leur part dans le commerce mondial dépasse à peine 2 %.

Un soutien et des protections spécifiques pour les plus pauvres ?

Néanmoins, les pays riches ont fini par répondre à leur demande constante et plus largement à celle des pays en développement pour la fin des subventions agricoles. Les Etats-Unis et l’Union européenne (UE) se sont en effet engagés à mettre fin « progressivement » à leurs régimes de subventions aux exportations agricoles d’ici à la fin 2013. Ils ont également promis d’éliminer les aides pour le coton dès la fin 2006, reconnaissant ainsi le bien-fondé des demandes pressantes des producteurs africains représentés par le Bénin, le Burkina Faso, le Mali et le Tchad. Les Etats-Unis, que ce groupe de pays accusait de ruiner la vie de 15 millions d’Africains dépendant de la production du coton, ont aussi promis d’accélérer l’élimination des autres formes de soutiens accordés aux producteurs américains.
Le compromis final, acquis à l’arrachée le 18 décembre après six jours de marchandages pratiquement sans pause, prévoit par ailleurs la continuation des efforts pour réduire les obstacles aux échanges des produits industriels et des services, et d’assurer un soutien et des protections spécifiques pour les pays en développement les plus pauvres. L’accord fixe au 30 avril 2006 la date butoir pour élaborer un éventuel accord d’ensemble sur les questions soulevées par le cycle du Doha depuis fin 2001. Il faudra ensuite plusieurs mois pour peaufiner et finaliser un tel accord global au plan technique.

L’agriculture au centre d’âpres marchandages

Les 25 pays membres de l’UE ont subi dès l’ouverture de la réunion une attaque en règle contre leur politique agricole commune, jugée protectionniste, par une coalition de circonstance des pays exportateurs, amenée par le Groupe des 20 (G20), économies émergentes sous la houlette du Brésil et de l’Inde, et des pays africains. Les Américains et d’autres exportateurs agricoles importants, comme le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, les ont soutenus. Les négociateurs de l’UE ont fermement résisté aux pressions de cette alliance pour mettre fin aux subventions à l’exportation dès 2010 mais se sont déclarés prêts à abandonner ces aides fin 2013 – à condition que les Américains fassent le ménage dans les soutiens à leur propre agriculture, comme les crédits à l’exportation et l’aide alimentaire, et que les autres pays riches fassent des concessions en ce qui concerne leurs entreprises commerciales publiques. En effet, Washington achète à ses paysans au cours du marché les céréales distribuées à travers le monde sous forme d’aide aux pays pauvres.
Les alliances ont changé d’un sujet à l’autre, reflétant une constellation d’intérêts complexes, souvent contradictoires, y compris entre pays en développement. En effet, la plupart des Africains redoutent une libéralisation poussée qui entraîne une invasion de leurs pays par des produits bon marché fabriqués en Asie ou en Amérique latine aux dépens de leurs propres productions. L’UE, qui avait offert aux 49 PMA un accès libre de droits et de quotas au marché européen – pour faire avaler son intransigeance sur l’agriculture, selon certains observateurs –, a de son côté qualifié de « honteuse » la réticence des Américains et des Japonais à accepter des importations sans restriction de textiles et de riz venant de ces pays, qui réduiraient de 3 % la part des exportations des PMA jouissant de ce privilège. De même, les producteurs de coton africains n’ont obtenu aucun engagement précis concernant l’élimination des près de 4 milliards de dollars d’aides intérieures que Washington paye à ses 25 000 producteurs, et qui contribuent selon les Africains à déprimer les cours mondiaux de cette matière première. De plus, l’UE, les Etats-Unis et le Japon se sont alliés pour demander une libéralisation des marchés des services, notamment dans les domaines des banques, des assurances et des télécommunications, qui favoriserait selon eux le développement des pays pauvres. Mais cette n’a pas encore été tranchée.

Réactions négatives en Afrique

Au final, le directeur général de l’OMC, le Français Pascal Lamy, a estimé que l’effort concédé par les ministres aura « réussi à remettre le cycle de Doha sur les rails après une période d’hibernation ». Plusieurs participants se sont déclarés soulagés d’avoir évité de justesse un échec comme celui de la dernière conférence de l’OMC à Cancun (Mexique) en 2003. Le négociateur en chef de l’UE, Peter Mandelson a ainsi considéré que si le résultat ne constituait pas un "réel succès", il suffisait pour « nous sauver de l’échec ». Autre son de cloche en Afrique, où la presse et la plupart des analystes se sont déclarés consternés par le manque de progrès concrets obtenus à Hong-Kong. Ils ont accusé les pays riches d’avoir encore une fois failli à leur devoir de solidarité à l’égard d’un continent où 300 millions de personnes survivent avec moins d’un dollar par jour. Décidément, a affirmé la Cosatu, la centrale syndicale sud-africaine, « il vaut mieux être une vache au Japon, subventionnée à hauteur de sept dollars par jour, qu’un être humain en Afrique ».

Marie Joannidis

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