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05/04/2001

Afrique : la rude bataille des télécommunications

(MFI) L'Afrique, qui veut accéder aux technologies modernes de télécom-munication, est devenue, depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, l'enjeu d'une dure bataille entre opérateurs privés africains ou étrangers, attirés par ce vaste marché encore pratiquement vierge, à l'exception notable de l'Afrique du Sud.

En 1996, il n'y avait que 1,46 million de lignes téléphoniques en service, en dehors de l'Afrique du Sud qui en comptait déjà près de 4 millions, pour une population de près de 600 millions de personnes. A l'époque, la Banque mondiale avait estimé que 6 à 8 milliards de dollars étaient nécessaires pour ajouter 4,5 millions de lignes afin d'atteindre une télédensité de 1 % en 2001, soit une ligne par 100 habitants. Cette estimation a cependant été revue à la baisse et d'ambitieux projets de lancement de satellites abandonnés car, désormais, des faisceaux peuvent être loués à prix plus modérés sur des satellites existants comme IntelSat ou des engins russes.
Les différences de développement entre l’Afrique subsaharienne et le reste du monde sont plus accentuées dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC) que dans d’autres plus classiques. Ainsi, plus d’un Africain sur deux n’a jamais fait un appel téléphonique, bien que l’usage des lignes internationales y soit très supérieur à la moyenne mondiale, ce qui s’explique en partie par l’importance de la diaspora africaine et par le tracé arbitraire des frontières. L’irrégularité de l'approvisionnement en électricité, voire son inexistence, est en outre un obstacle majeur à une intensification de l’utilisation des TIC, surtout en dehors des grandes villes.

Ne pas ajouter une fracture numérique à la fracture sociale

Selon plusieurs experts, la révolution de l’information est, pour l’Afrique, « la dernière chance de rattraper son retard » et d'accélérer sa croissance économique. La majeure partie des progrès enregistrés n’a toutefois eu lieu qu'à partir de 1995 et n’est pas encore prise en compte dans la plupart des statistiques officielles. Pour le Camerounais Claude Ondobo Ndzana, qui dirige la division de la communication de l'Unesco, les satellites, les fibres optiques utilisées pour la téléphonie numérique et les téléphones portables donnent la possibilité à l'Afrique de sauter des étapes pour entrer dans l'ère de la haute technologie.
Mais il faut veiller à ce que les nouveaux outils ne coûtent pas trop cher et ne pénalisent pas les populations pauvres, en ajoutant « une fracture numérique » à la « fracture sociale ». « Il faut protéger le domaine public, surtout dans des pays faibles qui ont, eux aussi, droit à l'accès libre à la communication, que ce soit par téléphone ou à travers Internet », souligne-t-il. Il reproche aux sociétés privées de vendre trop cher leurs services et d'accaparer des espaces et des données aussi bien sur la télévision par satellite que sur Internet. « Elles achètent non seulement des retransmissions de matchs de football mais aussi des stocks de bibliothèques et de musées », déplore-t-il.

La radio, un relais pour les zones rurales

« En Afrique l'électricité fait souvent défaut – surtout en zone rurale où se trouve la majorité de la population – et la radio, le transistor, peut servir de relais là où il n'y pas de réseau de téléphone classique », estime encore Claude Ondobo. Ainsi, les stations de radio deviennent « inter-actives » : les populations, ou les professionnels comme les médecins par exemple, peuvent envoyer leurs questions et reçoivent les réponses dans les émissions. L’Unesco estime qu’en 1995, près de 18 % des Africains possédaient un poste de radio alors qu’il n’y avait que 3,5 postes de télévision et 0,3 micro-ordinateur pour 100 habitants.
L’utilisation des outils de communication était, jusqu’à une époque récente, entièrement entre les mains de monopoles d’État. Les progrès vers une démocratie plus ouverte et des politiques plus libérales se sont traduits par une nette amélioration de l’accessibilité et de la diversité des moyens de communication. Ainsi, les taux d’installation de lignes téléphoniques n’ont jamais augmenté aussi vite, des centaines de nouveaux médias sont apparus au cours des dernières années et, en 1998, Internet est devenu accessible localement dans les capitales de tous les pays d’Afrique.

Le géant nigérian en sommeil

Le groupe allemand Siemens, l'un des grands des télécommunications mondiales, a estimé début mars que ce secteur progresse de 25 à 30 % par an en Afrique au sud du Sahara, et rêve déjà de l'énorme potentiel que représente le Nigeria où le gouvernement a décidé la privatisation partielle de l’opérateur public Nitel. Avec un cinquième de la population sub-saharienne, le Nigeria est l'un des géants en sommeil du monde de la communication : certains experts pensent que dix millions de lignes seront disponibles dans ce pays d’ici dix ans contre 720 000 à présent.
D'autres pays comme le Botswana, le Rwanda ou le Cameroun, qui ont fait des télécommunications une de leurs priorités, ont déjà installé des commutateurs numériques avec artères en fibre optique entre les villes et la plus récente technologie du téléphone portable. A l’autre extrême, plusieurs pays d'Afrique de l'Est ou centrale ont encore des systèmes téléphoniques analogiques vétustes et des liaisons inter-urbaines nationales médiocres.

Le cellulaire, solution de rechange

La téléphonie cellulaire mobile représente une solution de rechange aux réseaux publics restreints, et fait intervenir le secteur privé qui a su mettre en place des politiques commerciales plus agressives. Des services de téléphonie cellulaire sont maintenant offerts dans la plupart des Etats, dans les capitales, certaines agglomérations secondaires et le long des principaux axes routiers. Le nombre d’abonnés en 1997 était estimé par l’Union internationale des télécommunications (UIT) à plus de 225 000 en dehors de l’Afrique du Sud, pays qui a franchi le cap des deux millions d’abonnés en 1998.
Côté Web, les experts de l'Unesco ont noté que les pays francophones ont un meilleur profil sur le réseau mondial que les autres pays. Ils bénéficient notamment de l'assistance des organismes francophones et des gouvernements français et canadien, préoccupés par la prépondérance de l’anglais sur l’Internet.

Des projets internationaux et africains

Face aux besoins croissants de coordination, les bailleurs de fonds et les agences intervenant dans le domaine des TIC en Afrique ont décidé de mettre en place un forum permanent pour l’échange d’informations sur ce type de projets, appelé Partenariat pour les TIC en Afrique (Picta). L'Afrique a aussi bénéficié de l’Initiative spéciale des Nations unies, menée par Secrétaire général, dans laquelle les technologies de l’information et de la communication ont une place prépondérante. Le programme de l’UIT pour l’Afrique, qui porte sur divers projets de télécentres communautaires en milieu rural, en matière de santé publique, et projets satellites est aussi en cours avec d'autres bailleurs de fonds comme l'Organisation mondiale de la santé. La Banque mondiale, qui apporte son aide dans ce domaine à 25 pays africains, a créé le fonds InfoDev, qui a financé plusieurs projets et en particulier l’Université virtuelle africaine.
Sous l'impulsion de l'Afrique du Sud, dont les compagnies privées sont engagées dans un grand nombre de pays du continent, l’Union africaine des télécommunications a lancé en décembre 2000 le Programme africain de connexion, une initiative continentale gérée par des Africains pour accélérer l'entrée de l'Afrique dans la société d'information globale. L'Afrique du Sud doit également accueillir, en novembre prochain, un forum organisé par l'UIT, Telecom Africa 2001, pour consolider les avancées des dernières années.

Marie Joannidis





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