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29/11/2001

Le Japon reste fidèle à l’Afrique

(MFI) Malgré ses propres difficultés qui l’ont forcé à prévoir une diminution de son aide publique au développement (APD) pour 2002, le Japon entend poursuivre sa coopération avec l’Afrique et maintenir ses relations privilégiées avec ses voisins asiatiques plus pauvres.

Tokyo, qui avait fourni un soutien substantiel aux pays asiatiques en crise en 1997-1998, se prépare à fournir une contribution importante à la reconstruction de l’Afghanistan, proposant d’accueillir les bailleurs de fonds sous l’égide des Nations unies. Mais le Japon, qui reste la deuxième économie mondiale, a maintenu ses rendez-vous avec le continent africain en vue de préparer une nouvelle Conférence internationale de Tokyo sur le développement africain (Ticad), qui pourrait avoir lieu en 2003, après celles de 1993 et 1998.
Une réunion préliminaire s’est ainsi tenue fin octobre à Dakar avant la conférence ministérielle des 3 et 4 décembre dans la capitale nippone, organisée avec les Nations unies, la Coalition mondiale pour l’Afrique et la Banque mondiale. Cette conférence, à laquelle participent des Africains, des Asiatiques, des pays donateurs, des organisations internationales et régionales ainsi que des représentants du secteur privé et des organisations non gouvernementales (ONG), doit définir les thèmes de la prochaine Ticad, faire le bilan des projets lancés en 1998 et se pencher sur la Nouvelle initiative africaine pour le développement économique du continent, adoptée en juillet dernier par le sommet de l’OUA à Lusaka, en Zambie, et qui a reçu l’aval du G8 à Gênes. Parmi les secteurs à l’ordre du jour de cette réunion : la bonne gouvernance, la paix, l’éducation, la santé et la réduction de la pauvreté à travers la croissance économique fondée sur le développement de l’agriculture, des infrastructures et du secteur privé.

Solidarité plutôt que charité

L’intérêt japonais pour l’Afrique avait été souligné, début 2001, par le Premier ministre d’alors, Yoshiro Mori, qui s’était rendu en Afrique du Sud, au Nigeria et au Kenya, où il avait marqué la volonté de son pays, qualifié de « vrai partenaire de l’Afrique », d’aider les populations à s’en sortir. Au cours de cette visite, la première du genre, il avait parlé de « solidarité plutôt que de charité », renouvelant l’engagement de Tokyo de faire plus et mieux pour le continent. Ce dernier a bénéficié en 1999 d’une aide d’un peu plus d’un milliard de dollars, chiffre qui s’est maintenu en 2000 mais qui ne représente que moins d’un dixième de l’APD japonaise. Les principaux bénéficiaires africains sont le Ghana, la Tanzanie et le Kenya, mais le Japon s’intéresse de plus en plus à l’Afrique du Sud (voir encadré) et aux pays pétroliers.
Son successeur Junichiro Koizumi a renouvelé cet engagement en recevant en octobre dernier le président sud-africain Thabo Mbeki. Le Premier ministre japonais a cependant dû se résigner à une réduction de 10 % de l’APD dans le cadre de son prochain budget, qui vise à rétablir les grands équilibres en raison de perspectives économiques plutôt sombres. L’OCDE prévoit en effet une contraction de quelque 0,75 % de l’économie japonaise en 2001 et de 1 % en 2002 avant un redressement qui devrait commencer vers la fin de l’an prochain avec une amélioration du commerce extérieur.

Un instrument important pour la politique étrangère

La chute de la demande étrangère due au ralentissement économique mondial a contribué à une forte baisse de la production et des investissements industriels, accentuant les « forces déflationnistes » et aggravant le chômage. Le Japon dépend ainsi d’une amélioration sur ses marchés extérieurs. Les Japonais eux-mêmes ne cachent pas le fait qu’ils voient dans leur aide à l’Afrique un moyen de se créer de futurs marchés pour leurs exportations.
L’austérité budgétaire a incité le Japon à mettre l’accent sur la qualité plutôt sur la quantité de l’aide, selon Junichiro Koizumi lui-même. Les autorités cherchent donc les moyens de la rendre plus efficace et d’améliorer la coopération et la coordination avec leurs partenaires. La réforme de l’aide visera notamment à réduire la bureaucratie ; le rôle de l’Agence internationale de coopération du Japon sera renforcé pour éviter une dispersion des efforts entre plusieurs ministères et organismes. Les autorités souhaitent aussi renforcer le rôle des ONG qui connaissent bien le terrain et peuvent identifier les besoins des populations dans les pays partenaires.
La presse de Tokyo estime cependant que les problèmes intérieurs ne doivent pas servir d’excuse au Japon pour fuir ses responsabilités. « Malgré la mauvaise conjoncture de notre économie, le PIB par habitant reste parmi les plus élevés du monde. En même temps il y a quelque 4 milliards de pauvres dans le monde, pour la plupart en Asie et en Afrique, qui subsistent avec moins de deux dollars par jour. Cela est une bonne raison pour maintenir la machine de l’aide », écrit ainsi un éditorialiste. L’aide est aussi un instrument important pour la politique étrangère du Japon, au moment où les autorités font campagne pour que le pays obtienne un siège permanent au Conseil de sécurité de l’Onu.

Marie Joannidis



Encadré : M. Enoki Yasukuni, ambassadeur du Japon à Pretoria : « L’Afrique du Sud est un atout essentiel pour amener les hommes d’affaires japonais à investir dans la région »


Sylvie Clerfeuille : Quelle place occupe l’Afrique du Sud dans la coopération engagée par le Japon en Afrique ?

E. Y. : L’Afrique australe représente 40 % du budget de l’aide que le Japon consacre à l’Afrique subsaharienne. L’Afrique du Sud nous intéresse particulièrement à cause de son niveau de développement. Nous nous sommes engagés auprès du président Mbeki à investir la somme de 1,5 milliard de dollars de 1999 à 2004. La plupart de ces investissements se présentent sous forme de contrats commerciaux, mais l’APD s’élève à 500 millions de dollars dont 100 millions sous forme de dons. En Afrique du Sud, la priorité reste l’éducation qui absorbe à elle seule 30 % de l’aide. Nous avons construit cette année une vingtaine d’écoles primaires et secondaires. La seconde est le domaine de la santé. Pour le moment, nous approvisionnons le pays en matériel médical mais nous avons également des projets de constructions d’hôpitaux.

S. C. : L’Afrique du Sud représente une porte ouverte vers l’ensemble de l’Afrique australe…

E. Y. : C’est un pays moteur sur le marché régional, et un atout essentiel pour amener les hommes d’affaires japonais à investir dans la région. Ils préfèrent obtenir un engagement des grandes compagnies sud-africaines, ce qui représente une garantie sérieuse en matière de fiabilité de projets.
Nous avons un grand projet avec le Mozambique, le Mozad, qui concerne le traitement de l’aluminium. Ce projet industriel très important représente 7 % du PIB du pays. Il fait actuellement travailler 1 000 personnes mais il devrait en occuper dans sa phase finale plus de 3 000. Dans les pays comme la Tanzanie, le Botswana et la Namibie, nous nous sommes tournés vers l’exploitation minière. Par ailleurs, si la priorité est donnée à l’éducation, la santé et l’agriculture, nous sommes prêts à aider les petites et moyennes entreprises car c’est grâce à elles que le Japon s’est développé. Nous menons actuellement un projet en Tanzanie en ce sens, le projet du Kilimandjaro.

S. C. : Quelles difficultés rencontrez-vous ?

E. Y. : Le principal problème est la bonne gouvernance. Quand nous mettons en place un projet, le financement disparaît ou est mal utilisé. En Afrique, très souvent, je suis désolé de le dire, on ne fait pas de distinction entre argent public et argent privé.

S. C. : Que pensez-vous des formes de coopération mises en œuvre par les pays européens en Afrique ?

E. Y. : Les Anglais ont une approche de la coopération très nordique. L’approche japonaise est plutôt proche de celle de la France. Nous avons récemment lancé un premier projet de coopération conjointe avec la France à Madagascar dans le domaine de la déforestation.

Propos recueillis par Sylvie Clerfeuille





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